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Constructeurs

Après-vente : vers une digitalisation du parcours client

Publié le 17 mars 2023

Par Jean-Baptiste Kapela
10 min de lecture
Rémi Rivière, directeur de Consultant Digital France, a publié en février 2023 la nouvelle édition de son Qualiscore ABS. Les constructeurs commencent à proposer une meilleure digitalisation du parcours client pour leur service après-vente, dont la qualité s’approche de celle des enseignes multimarques.
Cette année encore, les enseignes multimarques obtiennent les meilleurs scores. ©tippapatt / Adobe Stock

Aujourd’hui, il suffit presque de deux clics pour obtenir un rendez-vous chez un garagiste. Le parcours digital représente souvent le premier contact entre le client et le garage après l’achat de son véhicule. Pourtant, ce dernier a longtemps été relégué au second plan, notamment par les constructeurs.

 

Rémi Rivière, directeur de Consultant Digital France, travaille pour rendre ses lettres de noblesse au parcours client en ligne, via une étude intitulée Qualiscore ABS - Après-vente. Cet ouvrage permet une analyse comparative des plateformes digitales et d’e-commerce de l’automobile "en situation réelle".

 

"Ayant été responsable de l’e-commerce à différents niveaux chez Renault, Nissan et Europcar, la donnée que nous regardions le plus était le taux de conversion. Soit le nombre de personnes qui viennent sur votre site et qui achètent quelque chose à la fin. Or, de simples ajustements peuvent améliorer le taux de conversion de quelques dixièmes de points, présente Rémi Rivière. Ce qui peut paraître peu, mais, quand vous améliorez d’un demi-point ce taux de conversion, à l’échelle d’un site de constructeur, les résultats peuvent se transformer en millions d’euros de gagnés. Les constructeurs ont donc tout intérêt à être performants sur leur plateforme."

 

Quatre catégories

 

Donnant une évaluation sur 100 points, le document se veut exhaustif, en précisant les points positifs et négatifs du parcours d’un prospect sur le web. Ainsi, Rémi Rivière s’est glissé dans la peau d’un client et a arpenté les différents services proposés par les enseignes de l’après-vente.

 

Premier élément qui figure sur cette dernière : "l’Essentiel". C’est un résumé présentant les principales remarques du consultant et, en parallèle, le score de la marque et la date de l’audit. Viennent ensuite les détails de la note divisée en quatre catégories : le parcours, qui compte pour 90 % de la note finale ; les services, sur quatre points, mettant en avant les options proposées par le site, comme les spécificités d’un véhicule électrique, ou encore la proposition d’un service de car jockey par exemple ; l’Interface Mobile Friendly (IMF), et pour finir la réalisation remarquable, qui octroie à la marque, jusqu’à quatre points supplémentaires pour une fonctionnalité originale ou un effort fourni par le constructeur ou l’enseigne multimarque depuis la précédente édition du Qualiscore ABS.

 

Après le détail de la note, la fiche présente une "to-do-list", où les points à améliorer sont présentés. Par la suite, la fiche revient sur la note du parcours avec des commentaires et des précisions. Et pour finir, le rapport présente dans une rubrique "Nous avons aimé", les aspects qui se démarquent de la concurrence et dans une autre, "Quelques doutes…" , les aspects qui ont gêné le consultant.

 

L’interface Mobile Friendly, une nouveauté

 

Par rapport à la première édition en 2020, la notation a évolué. Le premier système de notes était décomposé en cinq étapes, de la page d’accueil à la réservation de l’entretien, en passant par la recherche du réparateur et les tarifs. "La première évolution a été de pondérer certaines étapes. Ainsi, une page d’accueil avec le lien qui mène vers le rendez-vous ou le devis après-vente, est beaucoup plus facile à mettre en place qu’un système de gestion de rendez-vous avec les disponibilités et les heures de restitutions, précise Rémi Rivière. Ce qui est en bas du tunnel d’achat va peser plus de poids dans la balance. Ainsi, ce sont les marques qui auront le plus investi dans leur expérience client qui verront leur score augmenter par rapport à un site qui a moins investi dans des fonctionnalités moins sophistiquées."

 

Mais la nouveauté par rapport à l’année dernière, c’est l’ajout de l’IMF dans le score final. Ce dernier, noté sur six points, prend en compte en compte le parcours client sur un smartphone. "Nous n’avions pas vraiment exploré la compatibilité mobile lors du premier rapport. Désormais, nous regardons comment oeuvre le responsive design, c’est-à-dire, comment les plateformes des différents acteurs sont conçues pour fonctionner aussi bien sur PC que sur téléphone. Quand aujourd’hui, plus de 50 % du trafic sur internet provient d’un smartphone, il est important que cette interface soit soignée", souligne Rémi Rivière.

 

L’IMF, noté sur six points, prend en compte en compte le parcours client sur un smartphone. © tippapatt/Adobe Stock

 

Ce dernier remarque d’ailleurs que, pour la plupart des marques auditionnées, le responsive design a bien été assimilé… Parfois même un peu trop. Par conséquent, quelques-unes ont une interface principalement réfléchie sur mobile, pénalisant le web. "Nous nous retrouvons de temps en temps avec des blocs images trop grandes ou des zones de textes trop petites… Ce qui n’est pas agréable", se désole le consultant. Cette année encore, les enseignes multimarques obtiennent les meilleurs scores. Au total, sur les 32 marques auditionnées, 11 d’entre elles ont un score supérieur à 75 points, contre neuf constructeurs sur les 42 qui ont été auditionnés.

 

De plus, là où pour ces derniers, seulement deux marques "constructeur" ont un parcours catégorisé comme "excellent" (BMW et Mini qui détiennent un score qui dépasse les 80 %), au niveau des spécialistes de l’aftermarket, quatre atteignent ce rang. Et deux autres, Norauto et Vroomly, sont considérés par Rémi Rivière comme des "références" (score supérieur à 90 points). Par ailleurs, cinq enseignes multimarques font leur apparition : Go Mecano, Mecagoo, Wheely et Fixter. Précisons que dans le lot des enseignes multimarques auditionnées, certaines sont des comparateurs.

 

Les multimarques en tête

 

Néanmoins, il faut quand même noter que la grande majorité des constructeurs ont vu, par rapport à 2021, leur score fortement augmenter, en partie via l’ajout de l’IMF dans le classement. "Le responsive design étant devenu une norme, beaucoup de constructeurs ont déjà une plateforme sur mobile efficace. Si je prends la totalité des 70 marques auditionnées, il n’y en a que trois qui ont une note de 2 sur 6 dans leur partie IMF ", détaille Rémi Rivière. Sur les 42 sites de constructeurs interrogés, 16 marques ont vu leur score augmenter de deux chiffres.

 

Par ailleurs, certaines marques, mal notées et classées en 2020, ont connu de fortes progressions. À l’image d’Alfa Romeo qui grimpe de neuf places dans le classement, ou encore d’Opel, qui voit augmenter son score augmenter de douze points et qui passe de la catégorie faible à perfectible. En réalité, ces dernières ont bénéficié d’une dynamique de groupe et commencent à adopter la plateforme de certains acteurs plus performants dans ce domaine. Ainsi, il est possible de remarquer que les marques de l’ex-groupe FCA tendent à rejoindre dans le classement celles de l’ex-PSA, déjà bien classées l’année précédente.

 

© Rémi Rivière - Consultant Digital France

 

Disparité entre constructeurs

 

En observant plus en détail le classement, du côté des constructeurs, les marques européennes accordent plus d’attention à leur parcours client après-vente que leurs homologues asiatiques. De fait, les dix premières marques sont issues du Vieux Continent. "Plusieurs éléments expliquent cette différence entre les marques des deux continents. La première est historique. Les sont là depuis longtemps et ont développé un outil de bases de données qui existait avant l’ère d’internet et qu’ils ont pu exploiter , affirme Rémi Rivière. Les constructeurs asiatiques, même s’ils existent depuis plus de 40 ans, sont encore de nouveaux entrants et ne sont pas en position de domination. Certaines d’entre elles mettre l’accent sur le volume et un peu moins sur l’expérience client."

 

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Un constat d’autant plus visible sur les marques chinoises. "Concernant le site de ces nouveaux entrants sur le marché français, je constate que leur parcours digital est encore extrêmement faible… Au point que nous n’avons pas vraiment osé les classer", souligne-t-il. Pour pallier cette absence, il faut souligner que certaines de ces marques ont signé un partenariat avec des enseignes d’après-vente possédant déjà un maillage territorial. Citons par exemple Aiways qui a signé avec Feu Vert ou encore Seres qui collabore avec Point S.

 

"Agir de cette façon, c’est assez intelligent. Les marques chinoises paient ainsi un réseau après-vente à bas coût. Nous nous sommes dit qu’il s’agit d’une stratégie que pourraient adopter les marques en souffrance qui ne peuvent plus entretenir un réseau national. Je pense à Subaru, Suzuki, ou même Porsche, qui ont une centaine de points de service en France. Ça n’attire pas le client", explique le consultant.

 

© Rémi Rivière - Consultant Digital France

Le futur du Qualiscore

 

Néanmoins, cette édition apporte son lot de déceptions pour notre interlocuteur, comme Toyota et Lexus, qui perdent respectivement huit et six places par rapport aux autres constructeurs. Bosch Car Service également, qui perd dix places ou encore Alpine qui, avec un score de -22, est à la 32e place du classement, là où les marques Renault et Dacia siègent parmi les meilleures. "Une marque premium comme Alpine doit bénéficier d’un parcours digital après-vente exemplaire. Il devrait s’inspirer des plateformes Renault et Dacia", se désole Rémi Rivière.

 

Même constat pour Kia, qui chute de douze places et perd 42 points. "Le site de Kia demande la création d’un compte pour pouvoir accéder à ses services après-vente, ce qui ne rend pas fluide les démarches, constate-t-il. Je remarque que, pour le moment, les marques coréennes sont plutôt dans une logique de volume plus que de service client."

 

"L’idée derrière ce classement n’est pas de donner une mauvaise image aux enseignes ou aux constructeurs, mais de les pousser à améliorer leur plateforme. Qu’ils puissent s’inspirer des belles réalisations des autres marques pour et que le client final bénéficie d’un parcours de qualité", ajoute-t-il.

 

Pour Rémi Rivière, le Qualiscore ABS, est devenu un outil très précis et le travail est presque sans fin. "Il s’agit d’une démarche qui prend beaucoup de temps. Nous nous basons sur un premier système de notation, nous testons deux-trois sites, puis nous nous apercevons qu’il y a des sujets qui ne vont pas. Alors, vous peaufinez jusqu’à ce que ce soit un système de notation compréhensible. Pour le prochain rapport, nous allons encore améliorer les choses".

 

Ainsi, le consultant prévoit de prendre en compte de nouvelles données, telles que la longueur du parcours (le nombre d’étapes sur un site), le calcul du nombre de défilements pour chaque page ou encore, les précisions des règles sanitaires.

 

Rémi Rivière, directeur de Consultant Digital France et créateur du Qaliscore ABS.

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