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Constructeurs

Droits de douane : coup dur pour les constructeurs chinois ?

Publié le 13 juin 2024

Par Christophe Bourgeois
7 min de lecture
La mise en place par Bruxelles de droits de douane compensatoires concernant l'importation de véhicules électriques chinois en Europe risque de modifier le paysage automobile. Premières réactions à chaud des constructeurs et des opérateurs distribuant des marques et des modèles impactés par cette mesure.
frais de douane compensatoires
Les frais de douane compensatoires des véhicules électriques en provenance de Chine s'appliqueront à partir du 4 juillet 2024 en Europe. ©BYD

La décision de Bruxelles de mettre en place des frais de douanes allant jusqu'à 48,1 % pour les véhicules électriques produits en Chine à partir du 4 juillet 2024 a surpris tous les acteurs de l'automobile. Et en particulier les premiers intéressés, à savoir les constructeurs chinois. Mais d'une manière générale, cette taxe supplémentaire va concerner tous ceux qui assemblent en Chine et qui commercialisent leurs produits en Europe.

 

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Chez BYD France, la réponse à cette mesure tient en trois mots : "Pas de commentaire". Un message qui a d'ailleurs été diffusé auprès du réseau, raison pour laquelle celui-ci n'a pas souhaité s'exprimer en profondeur sur le sujet : "Cette décision de Bruxelles pourrait provoquer un ralentissement des ventes, mais je suis sûr que BYD devrait faire un geste pour compenser la hausse des taxes douanières", a réagi un important distributeur.

 

Chez MG, le réseau a appris l'information par voie de presse hier soir. "Nous n'avons eu aucun retour de la part de notre constructeur", déplore un important distributeur. "Visiblement, SAIC (maison mère de MG, mais aussi de Maxus, distribué en France par l'importateur Car East France, NDLR), qui sera taxé à 48,1 %, n'a pas été très coopératif avec Bruxelles. Cette mesure va raboter sérieusement l'avantage compétitif des constructeurs chinois."

 

"On voit d'ailleurs que toutes les mesures fiscales ont un impact sur les ventes. Depuis la fin du bonus, celles-ci sont à l'arrêt chez MG, surtout la MG4 qui représentait 50 % de nos immatriculations. Cette mesure va donc compromettre la gamme actuelle. Heureusement, en parallèle, la MG3 arrive et n'est pas concernée par ces droits de douane."

Implantation industrielle en Europe

 

Même discours chez d'autres acteurs du réseau MG. "Certes, la distribution risque de connaître quelques turbulences dans les mois à venir, mais si cette taxation concerne bien uniquement les voitures électriques, notre gamme de véhicules hybrides compensera les pertes. En outre, les constructeurs chinois sont riches et réactifs. Le problème sera réglé dès lors qu'ils produiront en Europe !", souligne l'un d'entre eux.

 

Car tous les plus grands constructeurs chinois ont des velléités sur le territoire européen, où il veulent s'implanter industriellement. Ce sont d'ailleurs plus que des velléités, car des réalisations concrètes sont en cours. La nouvelle usine de BYD est en cours de construction en Hongrie, d'où sortiront plusieurs modèles d'ici dix-huit mois à deux ans. Le constructeur compte en ouvrir une deuxième à court terme. De son côté, Chery, encore peu présent en Europe, a racheté l'usine Nissan de Barcelone.

 

La mort des start-up ?

 

Pour l'instant, seul MG n'a pas encore trouvé de site de production, mais le constructeur a clairement annoncé que sa maison mère, SAIC, cherche très activement. "Avec Ford, qui ferme le site de Saarlouis (Allemagne) et qui licencie en Espagne, il pourrait y avoir de belles opportunités pour MG", glisse un concessionnaire. Et si les Chinois ne peuvent pas reprendre une usine existante, tous les pays européens leur font les yeux doux pour implanter un site chez eux !"

 

En revanche, beaucoup de concessionnaires estiment que ces droits de douane vont réduire très fortement les volontés d'expansion des constructeurs chinois. "Surtout celles des nombreuses start-up qui n'auront pas la solidité financière pour exporter leurs véhicules et encore moins les produire en Europe", analyse l'un d'entre eux. Une façon d'épurer le marché. Qu'en sera-t-il pour les XPeng, Nio et autres petits constructeurs qui ont de grandes ambitions en Europe ?

 

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Les Européens aussi concernés

 

Ces droits de douane ne concernent pas que les marques chinoises, mais également les voitures électriques de constructeurs non-chinois produites en Chine. Nous en avons référencé neuf en France : le BMW iX3, le Cupra Tavascan, la Dacia Spring, le Honda eNy1, le Lynk&Co 01, la Mini Cooper, les Smart #1 et #3, la Tesla Model 3 et le Volvo EX30.

 

Pour la Dacia Spring, le réseau est assez résigné. "Depuis la fin du bonus, les ventes n'étaient plus au rendez-vous", indique un concessionnaire. Sur les cinq premiers mois de l'année, elle s'est vendue à 2 888 unités, en baisse de 77,1 %, alors qu'elle était au firmament des voitures électriques en 2023.

 

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Selon nos informations, la nouvelle mouture produite par Dongfeng pourrait être taxée à 28 %, au même niveau que BYD. "Nous sommes juste au-dessus du seuil des 25 % de taxes que le groupe Renault s'était fixé pour que l'opération soit rentable, glisse un autre distributeur bien informé. Les ambitions sur ce modèle de la part de Dacia sont assez mesurées et permettent principalement de « cocher des bâtons » pour répondre aux normes CAFE. De notre côté, en tant que distributeur, nous ne touchons que 5 % de marge sur le véhicule. L'impact sur notre activité et sur notre rentabilité sera donc assez faible."

 

Volvo rapatrie le EX30 en Europe

 

Concernant Volvo, un porte-parole de la marque pour la filiale française reste prudent. Il indique que l'EX30, "pourrait être impacté par la réglementation". Néanmoins, il relativise la situation : "Pour l'instant, nous attendons les conclusions de l'enquête pour savoir dans quelle mesure nous serons touchés. En outre, pour que la réglementation soit appliquée, elle doit être validée par l'ensemble des pays membres, ce qui prendra plusieurs mois, même si elle sera rétroactive. Mais je rappelle que nous avions annoncé dès le lancement du EX30 que sa production sera rapatriée dans notre usine de Gand (Belgique) début 2025, ce qui lui permettra d'échapper à cette taxation."

 

Pour Lynk&Co, détenu par Geely, tout comme Volvo, cette taxe pourrait signer l'arrêt total de la présence de la marque en Europe, déjà mise à mal par son concept de location, qui ne prend pas.

 

Côté Stellantis, qui va distribuer Leapmotor en Europe d'ici la fin de l'année, la réponse est laconique. "En tant qu’entreprise mondiale, Stellantis croit en une concurrence libre et équitable dans un environnement commercial mondial et ne soutient pas les mesures qui contribuent à la fragmentation mondiale", indique le constructeur. Il rappelle qu'il a fondé une coentreprise avec son partenaire chinois et qu'il détient 51 %  "des droits de fabrication de Leapmotor en dehors de la Chine" et qu'il "pourrait bénéficier de la présence diversifiée de Stellantis en Europe".

 

Concrètement, Stellantis pourrait assembler des modèles Leapmotor en Europe, dans l'usine polonaise de Fiat, à Tychy. L'information n'a pas été confirmée par le constructeur, mais il s'agirait de la citadine T03 en utilisant la méthode dite SKD, autrement dit, ce serait de l'assemblage de voitures en kit produites en Chine.

 

Des exportations chinoises exponentielles

 

Pour rappel, entre 2014 et fin 2022, le gouvernement chinois dit avoir dépensé plus de 200 milliards de yuans (25,5 milliards d'euros) en subventions et déductions fiscales liées à l'achat d'un véhicule électrique, ce qui a permis de doper les fabricants chinois face à leurs concurrents américains, qui ont moins bénéficié d'aides. Ils ont aussi profité d'une demande nationale en hausse : 69 % des véhicules électriques vendus dans le monde en décembre l'étaient en Chine, selon la société de recherche Rystad Energy.

 

Les exportations ont également bondi. Selon le centre de réflexion américain The Atlantic Council, les ventes mondiales de véhicules électriques chinois ont grimpé de 70 % en 2023, à 31,6 milliards d'euros et près de 40 % de ces exportations sont allées vers l'Union européenne, devenue première acheteuse de ces véhicules chinois.

 

Cette hausse des exportations a permis aux groupes chinois de grignoter des parts de marché en Europe, passant de moins de 2 % des voitures électriques fin 2021 à près de 8 % fin 2023, selon l'institut Jato, spécialisé dans l'automobile. Les importations européennes de véhicules électriques chinois ont bondi de 57 000 unités en 2020 à 437 000 en 2023, selon l'institut américain Peterson d'économie internationale.

 

(Avec Robin Schmidt et Jean-Baptiste Kapela)

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