Groupe Trujas : un distributeur toujours en action
"Ah, vous appréciez les belles voitures ?", comme le laisse deviner le DS 3 WRC miniature posé sur son bureau… Mais Xavier Trujas, 51 ans, nous surprend : "Non, pas vraiment, je suis parfaitement indifférent aux automobiles."
"Alors, vous êtes un fan de sport ?", question sans risque au vu de la photo de l’équipe de handball de Créteil trônant juste à sa droite. "Non plus, ce n’est pas tellement mon truc."
Deux fois à côté de la plaque, il y a mieux pour commencer un entretien avec le patron du groupe Trujas, dans la plus grande de ses concessions à Créteil (94)… Xavier Trujas est en réalité un homme de défis animé par l’aventure entrepreneuriale. "Le métier d’entrepreneur me correspond, c’est mon caractère, ma passion. J’ai envie d’être acteur de mes choix et de mon destin, prendre des décisions, bonnes ou mauvaises", explique‑t‑il non sans fierté. Au moins, c’est clair.
Et si Xavier Trujas se permet cette posture, c’est qu’il est aujourd’hui à la tête d’une entreprise familiale couronnée de succès, installée dans le sud et l’ouest de la région parisienne, condensée autour des marques Stellantis, ainsi que Suzuki qui fait office d’intrus depuis 2019.
Le groupe Trujas est né des mains du père et du grand‑père de Xavier Trujas, Jean‑Paul et Paul, agents Renault dans le département de l’Oise (60) qui rêvaient de devenir concessionnaires à la fin des années 1960. Ils prospectent alors le sud de la France, mais finissent par atterrir… en Île‑de‑France.
Leur concession Peugeot ouvre à Trappes (78) en 1970 avec une activité classique de vente de véhicules neufs, d’occasion et de réparation. "Après cela, c’est le calme plat pendant 28 ans, raconte Xavier Trujas, jusqu’en 1998 où mon père ouvre un second site Peugeot à Coignières", toujours dans les Yvelines et à proximité immédiate de la première concession à Trappes.
Retrouver des performances
C’est l’année suivante que Xavier intègre à 25 ans l’entreprise après trois ans passés chez Fiat au développement du réseau. "J’ai pris la décision de quitter Fiat (qui déménageait pourtant son siège à quelques mètres de sa concession Peugeot à Trappes, NDLR) pour m’engager dans une démarche d’entrepreneur qui me correspondait davantage et ainsi gérer des effectifs et un groupe."
Les débuts de Xavier Trujas dans l’entreprise familiale surviennent donc lors de la période dorée de Peugeot dont les succès des 406 (1995) et 206 (1998) donnent un souffle nouveau à la marque au lion. Cependant les relations entre le constructeur et Jean‑Paul Trujas ne sont, quant à elles, pas au beau fixe.
En cause, les mauvaises performances commerciales et financières des deux places Trujas, ce qui ne facilite pas la tâche du nouveau venu. "Il était plutôt dans l’optique du constructeur, même si nous ne l’avons jamais su officiellement, que nous cédions cette affaire. Partant de ce constat, je me suis dit que l’objectif était de redresser l’entreprise et d’améliorer les performances commerciales. En fin de compte, un environnement tout à fait propice à développer mon esprit entrepreneurial soit pour céder dans les meilleures conditions, soit pour s’inscrire dans la durée", atteste‑t‑il.
Cela a fonctionné puisqu’en 2001, Xavier Trujas est nommé distributeur par Peugeot en lieu et place de son père qui lui laisse les rênes de l’entreprise, "tout à coup, nous nous inscrivions dans l’optique de rester dans la marque Peugeot et dans le développement", raconte le principal intéressé.
Voler de ses propres ailes
Ce développement ne tarde pas. En 2005, la première opération de croissance externe se produit. Le groupe s’empare de l’affaire Peugeot de Rambouillet dans les Yvelines. "Une concession qui manquait de stabilité car elle était déjà passée entre les mains de trois propriétaires différents au cours des quatre précédentes années. Depuis, elle n’a plus bougé, elle fait encore aujourd’hui partie du giron du groupe Trujas", ne manque pas de rappeler le président.
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Cette opération, il ne la réalise pas tout seul, "à l’époque, ce challenge était de taille pour le groupe, je décide donc de m’associer avec un autre distributeur Peugeot de la région, William Monin, pour réaliser ce premier achat", témoigne le chef d’entreprise, âgé de 31 ans à cette époque.
Les associés poursuivent pendant plusieurs années le développement du groupe en reprenant de petites concessions Ford, Kia et d’autres dont Fiat, l’ancienne maison de Xavier Trujas, qu’ils revendront par la suite ou garderont. Xavier Trujas prend ensuite en 2013 une décision qui lancera le groupe sur la dynamique qu’il a encore de nos jours. "J’avais des associés minoritaires, familiaux notamment, ainsi que d’autres (dont William Monin), dont j’ai racheté les parts pour voler de mes propres ailes et ne pas rendre compte de mes choix, je voulais avoir 100 % des décisions qui m’appartiennent, avoir les manettes pour lancer un nouveau cycle dans l’entreprise."
Après quelque temps d’adaptation, le groupe poursuit son expansion en 2018. "Je me suis redéveloppé avec Peugeot en reprenant les sites Stellantis & You de Créteil et Montgeron (91). C’était pour moi un nouveau pas, je sortais de ma zone de confort qui était les affaires familiales dans les Yvelines pour une autre culture d’entreprise, celle des filiales Stellantis", assure Xavier Trujas.
Pas de quoi effrayer le dirigeant désormais expérimenté, "la distribution automobile est un secteur de consolidation perpétuelle, nous ne pouvons pas nous permettre de stagner et j’ai depuis toujours ce besoin de mener des projets, c’est cela qui m’intéresse" et heureusement puisque cette opération permet à cette époque au groupe d’avoir une croissance de son chiffre d’affaires de l’ordre de 50 %. Ces gains lui ont permis de vivre une grosse période de développement puisque ce dernier a repris et créé (pour Opel) 18 concessions au total entre 2018 et 2023.
Parmi les plus marquantes, il faut citer la reprise de Citroën à Créteil et Champigny‑sur‑Marne (94) en 2018, deux sites qui faisaient partie de la plaque Citroën du groupe Gueudet. Cela a permis au groupe Carwest (devenu groupe Trujas en 2022) de renforcer ses positions dans le Val‑de‑Marne et d’initier son projet de faire de Créteil un showroom trimarque.
Projet qu’il achèvera deux ans plus tard lorsque Citroën et DS Automobiles font leur arrivée à Créteil après les travaux du site qui n’avait pas été mis aux normes depuis plusieurs décennies. Point de vente qui a d’ailleurs été construit en 1970 à l’image de l’ancien siège PSA, avenue de la Grande Armée à Paris.
Également à noter la sortie du portefeuille du groupe de la marque Alfa Romeo en 2018 car "les volumes sur Rambouillet ne justifiaient pas un contrat de concession, nous avions un contrat avec Fiat pour douze voitures". Pour remplacer ce trou, le groupe aux 480 collaborateurs entre dans le réseau Suzuki avec sa concession de Rambouillet qui a immédiatement mieux marché grâce à une gamme plus large. "Nous vendons très facilement les voitures de la marque japonaise mais nous avons du mal à avoir les véhicules. Nous espérons retrouver des niveaux de stock chez Suzuki qui nous permettent de vendre plus."
La marque coréenne Kia a également disparu du périmètre du groupe aux 280 millions d’euros de chiffre d’affaires, "pour des problématiques d’équilibre économique, car la structure qui accueillait Kia était trop isolée et cela devenait trop compliqué en termes d’exploitation avec les loyers de la région parisienne", relate Xavier Trujas.
Une JV avec Stellantis
Le groupe de distribution a monté, en 2021 à Plaisir (78), un site dédié au label de certification de véhicules d’occasion, Spoticar, venu remplacer les labels existants des marques Peugeot, Citroën, Opel, etc. dans un but d’uniformisation. "Aujourd’hui, il n’y a pas à ma connaissance de volonté du constructeur de développer des centres dédiés à Spoticar. Nous avons fait cela à Plaisir à l’intérieur du site où nous exploitons la marque Peugeot dans la même ville où nous avons ajouté la marque Opel, il fallait donc libérer de l’espace et le showroom manquait de toute manière de surface pour exposer les véhicules d’occasion, voilà pourquoi nous avons fait cet investissement." Le site en question accueille à l’heure actuelle 80 voitures.
Une autre spécificité du groupe Trujas est de s’être associé au constructeur Stellantis par joint‑venture sur la partie pièces de rechange. "Après les deux rachats des filiales du constructeur Stellantis à Créteil et Montgeron, nous avons décidé de nous associer en décembre 2023 pour la distribution de pièces de rechange. Nous avons créé une société commune, une joint‑venture qui s’appelle Paris‑Sud PR qui possède la plateforme basée à Morangis (91) qui existe depuis 2005." Stellantis étant le fournisseur de pièces du groupe depuis de nombreuses années, les deux entités ont trouvé un intérêt commun à former cette association.
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Faire briller les véhicules de la police
Le groupe Trujas travaille depuis 2018 avec la police nationale pour la mécanique et la carrosserie sur son site de Créteil (94) et dans les Yvelines. Le groupe a pour cela remporté un appel d’offres émis par la maréchaussée qui a lieu tous les trois ans pour entretenir la mécanique et la carrosserie des véhicules particuliers et des fourgons de la police nationale.
En permanence à Créteil, ce sont environ 30 à 40 véhicules bardés de sirènes et d’autocollants bleu blanc rouge qui sont présents sur les ponts élévateurs et en zone de stockage. Ce contrat "juteux" pourrait bien grossir cet été selon le président du groupe, Xavier Trujas, "il devrait y avoir un surcroît d’activité pendant les Jeux Olympiques car des véhicules de brigades de province seront amenés à Paris et passeront logiquement dans nos garages".
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