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Industrie

Compétence et attractivité, enjeux de la filière automobile

Publié le 25 octobre 2023

Par Jean-Baptiste Kapela
6 min de lecture
Lors de la Journée de la filière automobile organisée par la PFA, le sujet de l'électrification était sur toutes les lèvres. En plein contexte de mutation, l’industrie automobile doit accélérer sur la formation et se rendre suffisamment attractive pour attirer de nouveaux talents, notamment chez les jeunes.
Renault
Les entreprises créent des formations en internes.©Renault

Dans un contexte dans lequel la voiture est "diabolisée" pour son empreinte carbone, l’automobile attire de moins en moins. En parallèle, le secteur n’a jamais eu autant besoin de recruter, en pleine période de réindustrialisation et de mutation vers l’électrique.

 

"Je pense que la filière est alignée vers la stratégie d’un arrêt des ventes de véhicules thermique d’ici à 2035. Cet objectif est indispensable, y compris pour l'acceptabilité sociale de l’industrie. Je passe mon temps à dire que l’industrie est désirable. Nous avons besoin d’expliquer aux jeunes candidats, ingénieurs ou encore techniciens, ce que nous allons faire pour la planète, pour attirer des clients, des salariés ou pour attirer des investisseurs, s’est exprimé Roland Lescure, ministre délégué à l’Industrie, durant la Journée de la filière automobile, le 24 octobre 2023.  Nous devons embrasser cette transition, et il faut aller le plus vite possible, sans laisser un certain nombre de personnes au bord du chemin, et nous allons les accompagner" a-t-il ajouté.

 

L’enjeu de la formation

 

Au cours de l'événement organisé par la PFA, le sujet du recrutement a été plusieurs fois abordé, reflet d’une inquiétude grandissante parmi les acteurs de la filière. La thématique a d’ailleurs fait l’objet d’une table ronde réunissant Claude Cham, président de la Fiev, Alain Roumilhac, président de Manpower France et Sud Europe, et Luciano Biondo, directeur de Renault ElectriCity. Le monde de l’automobile est entré dans l'ère de l'électrification et appelle de nouvelles compétences. Pour cela, la formation s'avère l'une des clés de la réussite de cette transition.

 

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"Nous entrons dans un monde dans lequel la prévision à très long terme devient difficile et où il nous faut être le plus réactif possible. Pour nous, équipementiers, il faut que nous ayons un maximum de visibilité, souligne Claude Cham. Je suis un fervent défenseur de la compétitivité de notre pays. Je pense que la valeur d’un État, c’est sa formation. Nous avons bien un système de formation général, mais elle ne couvre pas tout. Il y a une réforme de l’apprentissage qui est en cours et je regrette que le sujet n'ait pas été choisi plus tôt. Il faut revoir notre système de formation, qu’elle soit plus fluide pour s’adapter aux changements à venir." Le président de la Fiev estime que la transition vers l’électrique impacte entre 30 000 et 40 000 personnes. Selon lui, ce travail de formation doit commencer dès l'école primaire et pour cela, il espère que l'Éducation nationale se saisisse du sujet.

 

Former les compétences en interne

 

Face à un tel constat, les entreprises s'organisent, elles-mêmes, pour trouver les compétences. Ainsi, Manpower France détache chaque jour 25 000 pour travailler dans l’industrie automobile. L’entreprise collabore avec des constructeurs comme Ferrari ou encore Skoda. "Aujourd’hui, nous devons premièrement recruter des compétences qui n'existent pas. Pour cela, il faut former. Pour notre part, nous formons 4 000 personnes par an, via des organismes de formation partenaire", présente Alain Roumilhac. Il faut que tous les acteurs travaillent ensemble pour anticiper l'avenir, car nous avons toujours agi au dernier moment alors que le sujet aurait pu être traité plus tôt."

 

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Cette stratégie d’internalisation et de mutualisation de la formation est adopté par Renault. Le groupe s’est donné l’objectif d’atteindre la production de 400 000 voitures en 2025 et de 600 000 véhicules en 2026. Pour cela, son site du Nord de la France, ElecriCity, cherche à recruter près de 700 personnes en CDI. "En comptant la centaine de partenaires dans un rayon de 300 km, que ce soit Renault, les usines de batterie et nos fournisseurs... ce n’est pas 700 personnes que nous recrutons, mais 3 000 pour atteindre ce projet", pose Luciano Biondo. Un consortium de constructeurs, de gigafactory, a ainsi été créé dans les Hauts-de-France pour former les futurs salariés des différents partenaires.

 

Attirer au-delà de la formation

 

"Nous avons créé un master de l'électromobilité pour former nos futurs cadres. Le projet d'attractivité se fait à toutes les étapes. Sur la formation du management, mais aussi sur les "à-côté". Certains jeunes n'ont pas leur permis de voiture, de logement, et dans ce cas, nous devons les accompagner", pointe Luciano Biondo. Autant de leviers que le consortium souhaite activer, pour aller chercher leurs nouveaux salariés entre 2024 et 2026.

 

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Ce qu’est capable de faire une grande entreprise n’est pas forcément à la portée des petites structures. La Fiev compte parmi ses adhérents, de petites entreprises qui n’ont pas forcément les capacités de former à de nouvelles compétences en interne. "C’est aux syndicats d’accompagner les PME. Dans la métallurgie, nous avons la chance d’avoir un organisme qui fonctionne fort bien, qui s’appelle IUIMM avec lequel nous collaborons étroitement, et puis au sein de la PFA, nous avons une coopération qui nous permet de monter des formations pour ces sociétés” assure Claude Cham.

 

L’automobile ne fait plus rêver ?

 

L'enjeu de la décarbonation est capital pour l’image de l’automobile. La filière a beau compter parmi les secteurs qui font le plus d’effort sur le sujet, convaincre la jeunesse de s’embarquer dans l’aventure demande des efforts. "Quand je vais voir des entreprises issues du monde de l’automobile, elles me disent que c’est compliqué d'être attractif à cause des enjeux environnementaux. Mais je fais le même constat pour les entreprises dans l’aéronautique ou dans le pharmaceutique. En réalité, le problème d’attractivité n’est pas l’apanage de l’automobile. Il faut comprendre les attentes des nouvelles générations car elles ont changé sur de nombreux sujets", soulève Alain Mourilhac.

 

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Des attentes qui vont au-delà des motivations purement écologiques, mais qui a trait aussi à l’équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Selon le président de Manpower France, 40 % des personnes place comme critère numéro un la superposition entre vie professionnelle et personnelle. "Il faut faire de la sensibilisation dans les écoles pour attirer les jeunes, en leur expliquant que l’automobile est amenée à changer en faveur de l’environnement", assure Luciano Biondo.

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