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Constructeurs

Règlement GSR II : le prix de la sécurité

Publié le 25 avril 2024

Par Christophe Jaussaud
7 min de lecture
À partir du 7 juillet 2024, avec l’application du règlement GSR II pour tous les véhicules, leur sécurité va être renforcée. Le nombre d’Adas obligatoires sera revu à la hausse. Certains modèles en fin de vie disparaîtront alors des catalogues, tandis que le prix de ceux qui y restent augmentera.
GSR II Adas
Beaucoup des Adas rendus obligatoires dans le GSR II sont d’ores et déjà disponibles sur de nombreux modèles. ©Volkswagen

GSR II. Voilà un acro­nyme qui fait parler de lui ces dernières se­maines. Le règlement de sécurité générale II n’est pourtant pas nouveau, mais son application quasi complète va créer quelques remous dans les catalogues des constructeurs.

 

En effet, ce texte européen a été publié en 2019 pour une application le 7 juillet 2022 pour les nouvelles homologations de véhi­cules et le 7 juillet 2024 pour tous les véhicules en vente dans l’Union. Un nouveau cadre, négocié dès 2015 avec des études préliminaires, qui a pour but de rendre les véhicules toujours plus sûrs, afin de réduire encore la mortalité, en incorporant plus d’élé­ments de sécurité active et passive.

 

Ainsi, le régulateur de vitesse intel­ligent, l’avertisseur de somnolence ou encore le maintien dans la voie deviennent obligatoires. Le texte prend aussi en compte la protection des autres usagers de la route et, en particulier, des piétons dont l’élargissement de la zone de choc sera la règle pour tous les véhicules d’ici juillet 2026. Ce qui en­traînera sans doute une nouvelle salve de disparitions.

 

Impact sur des modèles en fin de vie

 

L’impact de ce texte est réel, mais il doit aussi être relativisé, notamment sur la partie Adas (systèmes avancés d’aide à la conduite). En effet, pour Sébastien Amichi, associé du cabinet Kearney et expert automobile, "beaucoup des nouveaux éléments de sécurité active et des contraintes du GSR II ont été anticipés. De nombreux Adas devenus obligatoires sont déjà présents sur une quantité de modèles."

 

Pour l’expert, le GSR II est le reflet réglementaire de ce qui est déjà pris en compte par les tests Euro NCAP notamment. Mais ce se­rait incomplet de résumer le GSR II aux Adas, car le texte européen va plus loin avec la somnolence au volant et le choc piéton, mais aussi sur les crash‑tests, puisque le frontal doit maintenant se faire sur toute la largeur du véhicule et le règlement intègre aussi un crash‑test arrière et un latéral contre un poteau.

 

La Renault Zoe fait partie des modèles qui vont disparaître du catalogue. Mais son âge est plus en cause que le GSR II. ©Renault

 

Ces derniers éléments sont d’ailleurs ceux qui expliquent en grande partie la disparition de certains modèles que les constructeurs n’ont pas voulu mettre à jour. Majoritairement des modèles en fin de vie et bien souvent bâtis sur une plateforme ne pouvant recevoir les technologies obligatoires et dont les modifications structurelles coû­teraient trop cher. Ainsi, les Renault Twingo et Zoe vivent leurs dernières heures, tout comme la Suzuki Ignis, la Toyota GR86 ou encore le Porsche Macan thermique, qui va toutefois poursuivre sa carrière hors d’Europe durant un temps.

 

D’autres construc­teurs ont aussi revu leur calendrier de lancements pour que la nouvelle géné­ration d’un modèle arrive un peu plus tôt pour éviter de rendre compatible l’ancien aux nouvelles règles pour un ou deux ans de commercialisation. C’est, par exemple, le cas du Dacia Duster 3 qui a été légèrement avancé car le Dus­ter 2 avec son architecture ne pouvait répondre aux nouvelles demandes et contraintes. D’autres ont toutefois dé­cidé d’offrir une profonde évolution à un modèle et ainsi de prolonger son existence comme l’a fait Fiat avec sa Panda qui est maintenant annoncée au catalogue jusqu’en 2027.

 

Certains modèles vont toutefois réussir à pas­ser entre les mailles du filet mais avec de grosses restrictions. Ainsi, l’Alpine A110 va poursuivre sa carrière sans ré­pondre au nouveau règlement, mais les ventes ne pourront dépasser 1 500 uni­tés en Europe.

 

Des tarifs en hausse

 

Mais toute nouvelle évolution ou ajout technologique a un coût pour le constructeur et naturellement pour le client final. "Tous les modèles ne sont pas impactés de la même ma­nière, souligne Sébastien Amichi, mais on peut estimer que le GSR II augmentera, en moyenne, d’environ 2 500 euros le prix de vente. Cela peut même grimper à 4 000 euros pour cer­tains modèles."

 

L’expert prend ici en compte l’ensemble des impacts car si les nouveaux Adas ont un coût rela­tivement faible proportionnellement, les modifications nécessaires pour les nouveaux crash‑tests (frontal, ar­rière et latéral) sont beaucoup plus coûteuses et demandent de plus gros développements et investissements.

 

Sébastien Amichi, associé du cabinet Kearney et expert automobile.

Mais ce dernier cas de figure n’arrive pas souvent, car les plateformes ac­tuelles ont assez largement anticipé les choses. Le coût est donc impor­tant mais "finalement semblable à celui du passage d’une génération à l’autre", indique Sébastien Amichi.

 

Interrogé sur l’augmentation des prix liée au GSR II, Luca de Meo, direc­teur général de Renault, avait avancé une somme voisine de 400 euros par véhicule, considérant seulement le périmètre Adas.

 

La sécurité est donc au centre du GSR II, mais il montre aussi combien il est difficile de conci­lier tous les objectifs fixés. En effet, on peut y voir un paradoxe avec la volon­té de réduction des émissions de CO2 car les nouvelles règles de sécurité alourdissent sensiblement les véhi­cules. Ce qui n’est pas bon pour l’ef­ficience du modèle et plus largement pour son bilan environnemental.

 

Des vérifications dans la durée

 

Le GSR II aura donc un coût, mais d’autres normes vont encore renché­rir les automobiles dans les années à venir. Il y aura bientôt Euro 7 dont la facture pour le client final fait encore débat.

 

Plus largement, au‑delà des nouvelles normes, l’Europe va aus­si s’attacher à contrôler le respect de celles déjà en place. "Une surveillance du marché, pointe Sébastien Amichi, consistant à vérifier que l’homolo­gation accordée est respectée dans le temps."

 

A lire aussi : Même édulcorée, Euro 7 risque de renchérir le coût de l'automobile

 

Les contrôles des émissions et des distances de freinage en sont des exemples. "Il pourrait s’agir par exemple de vérifier l’adhérence sur sol sec et mouillé d’un pneu usé, alors que l’homologation a été faite avec des neufs", explique l’expert qui y voit aussi une barrière à l’entrée de certains acteurs, car dans certains cas, des pneumatiques, essentiellement asiatiques, seraient recalés. Certains perdant 50 % de leur efficacité après 20 % d’usure.

 

Dans l’automobile comme ailleurs, si un cadre légal est nécessaire, la mul­tiplication des normes, parfois contradictoires, complique sérieusement les choses. Luca de Meo, avec sa casquette de président de l’ACEA, qui demande l’arrêt de l’empilement des normes, a indiqué que huit à dix textes vont encore arriver d’ici 2030, alors que l’industrie automobile européenne vit un bascu­lement historique vers l’électrique.

 

Le temps est peut‑être venu de mener une révolution après l’autre. Car, au final, la sécurité recherchée, comme la néces­saire décarbonation de l’automobile, restera une chimère si les automobi­listes ne peuvent pas suivre.

 

 


 

Les technologies obligatoires avec le GSR II

 

À partir du 7 juillet 2024, les véhicules devront intégrer de nouveaux systèmes avancés d’aide à la conduite (Adas) pour pouvoir être vendus en Europe. Il y a notamment le freinage d’urgence détectant les piétons et les cyclistes, l’allumage automatique des feux de détresse, la détection d’obstacles à l’arrière, l’aide au maintien dans la voie, le régulateur de vitesse intelligent avec alerte de survitesse, l’enregistreur de données, l’avertisseur de perte d’attention et de somno­lence du conducteur ou encore rendre plus simple l’installation d’un éthylomètre antidémarrage. Le texte prend aussi en compte la protection contre les cyberattaques et établit de nouvelles règles pour le choc piéton, qui ne seront applicables sur tous les véhicules qu’en juillet 2026. Mais il comporte également un volet qui touche aux crash‑tests et qui implique donc des chan­gements plus structurels. Maintenant, le crash‑test frontal doit être réalisé sur toute la largeur du véhicule et la norme intègre un crash‑test arrière et un latéral contre un poteau.

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