Règlement GSR II : le prix de la sécurité
GSR II. Voilà un acronyme qui fait parler de lui ces dernières semaines. Le règlement de sécurité générale II n’est pourtant pas nouveau, mais son application quasi complète va créer quelques remous dans les catalogues des constructeurs.
En effet, ce texte européen a été publié en 2019 pour une application le 7 juillet 2022 pour les nouvelles homologations de véhicules et le 7 juillet 2024 pour tous les véhicules en vente dans l’Union. Un nouveau cadre, négocié dès 2015 avec des études préliminaires, qui a pour but de rendre les véhicules toujours plus sûrs, afin de réduire encore la mortalité, en incorporant plus d’éléments de sécurité active et passive.
Ainsi, le régulateur de vitesse intelligent, l’avertisseur de somnolence ou encore le maintien dans la voie deviennent obligatoires. Le texte prend aussi en compte la protection des autres usagers de la route et, en particulier, des piétons dont l’élargissement de la zone de choc sera la règle pour tous les véhicules d’ici juillet 2026. Ce qui entraînera sans doute une nouvelle salve de disparitions.
Impact sur des modèles en fin de vie
L’impact de ce texte est réel, mais il doit aussi être relativisé, notamment sur la partie Adas (systèmes avancés d’aide à la conduite). En effet, pour Sébastien Amichi, associé du cabinet Kearney et expert automobile, "beaucoup des nouveaux éléments de sécurité active et des contraintes du GSR II ont été anticipés. De nombreux Adas devenus obligatoires sont déjà présents sur une quantité de modèles."
Pour l’expert, le GSR II est le reflet réglementaire de ce qui est déjà pris en compte par les tests Euro NCAP notamment. Mais ce serait incomplet de résumer le GSR II aux Adas, car le texte européen va plus loin avec la somnolence au volant et le choc piéton, mais aussi sur les crash‑tests, puisque le frontal doit maintenant se faire sur toute la largeur du véhicule et le règlement intègre aussi un crash‑test arrière et un latéral contre un poteau.
Ces derniers éléments sont d’ailleurs ceux qui expliquent en grande partie la disparition de certains modèles que les constructeurs n’ont pas voulu mettre à jour. Majoritairement des modèles en fin de vie et bien souvent bâtis sur une plateforme ne pouvant recevoir les technologies obligatoires et dont les modifications structurelles coûteraient trop cher. Ainsi, les Renault Twingo et Zoe vivent leurs dernières heures, tout comme la Suzuki Ignis, la Toyota GR86 ou encore le Porsche Macan thermique, qui va toutefois poursuivre sa carrière hors d’Europe durant un temps.
D’autres constructeurs ont aussi revu leur calendrier de lancements pour que la nouvelle génération d’un modèle arrive un peu plus tôt pour éviter de rendre compatible l’ancien aux nouvelles règles pour un ou deux ans de commercialisation. C’est, par exemple, le cas du Dacia Duster 3 qui a été légèrement avancé car le Duster 2 avec son architecture ne pouvait répondre aux nouvelles demandes et contraintes. D’autres ont toutefois décidé d’offrir une profonde évolution à un modèle et ainsi de prolonger son existence comme l’a fait Fiat avec sa Panda qui est maintenant annoncée au catalogue jusqu’en 2027.
Certains modèles vont toutefois réussir à passer entre les mailles du filet mais avec de grosses restrictions. Ainsi, l’Alpine A110 va poursuivre sa carrière sans répondre au nouveau règlement, mais les ventes ne pourront dépasser 1 500 unités en Europe.
Des tarifs en hausse
Mais toute nouvelle évolution ou ajout technologique a un coût pour le constructeur et naturellement pour le client final. "Tous les modèles ne sont pas impactés de la même manière, souligne Sébastien Amichi, mais on peut estimer que le GSR II augmentera, en moyenne, d’environ 2 500 euros le prix de vente. Cela peut même grimper à 4 000 euros pour certains modèles."
L’expert prend ici en compte l’ensemble des impacts car si les nouveaux Adas ont un coût relativement faible proportionnellement, les modifications nécessaires pour les nouveaux crash‑tests (frontal, arrière et latéral) sont beaucoup plus coûteuses et demandent de plus gros développements et investissements.
Mais ce dernier cas de figure n’arrive pas souvent, car les plateformes actuelles ont assez largement anticipé les choses. Le coût est donc important mais "finalement semblable à celui du passage d’une génération à l’autre", indique Sébastien Amichi.
Interrogé sur l’augmentation des prix liée au GSR II, Luca de Meo, directeur général de Renault, avait avancé une somme voisine de 400 euros par véhicule, considérant seulement le périmètre Adas.
La sécurité est donc au centre du GSR II, mais il montre aussi combien il est difficile de concilier tous les objectifs fixés. En effet, on peut y voir un paradoxe avec la volonté de réduction des émissions de CO2 car les nouvelles règles de sécurité alourdissent sensiblement les véhicules. Ce qui n’est pas bon pour l’efficience du modèle et plus largement pour son bilan environnemental.
Des vérifications dans la durée
Le GSR II aura donc un coût, mais d’autres normes vont encore renchérir les automobiles dans les années à venir. Il y aura bientôt Euro 7 dont la facture pour le client final fait encore débat.
Plus largement, au‑delà des nouvelles normes, l’Europe va aussi s’attacher à contrôler le respect de celles déjà en place. "Une surveillance du marché, pointe Sébastien Amichi, consistant à vérifier que l’homologation accordée est respectée dans le temps."
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Les contrôles des émissions et des distances de freinage en sont des exemples. "Il pourrait s’agir par exemple de vérifier l’adhérence sur sol sec et mouillé d’un pneu usé, alors que l’homologation a été faite avec des neufs", explique l’expert qui y voit aussi une barrière à l’entrée de certains acteurs, car dans certains cas, des pneumatiques, essentiellement asiatiques, seraient recalés. Certains perdant 50 % de leur efficacité après 20 % d’usure.
Dans l’automobile comme ailleurs, si un cadre légal est nécessaire, la multiplication des normes, parfois contradictoires, complique sérieusement les choses. Luca de Meo, avec sa casquette de président de l’ACEA, qui demande l’arrêt de l’empilement des normes, a indiqué que huit à dix textes vont encore arriver d’ici 2030, alors que l’industrie automobile européenne vit un basculement historique vers l’électrique.
Le temps est peut‑être venu de mener une révolution après l’autre. Car, au final, la sécurité recherchée, comme la nécessaire décarbonation de l’automobile, restera une chimère si les automobilistes ne peuvent pas suivre.
Les technologies obligatoires avec le GSR II
À partir du 7 juillet 2024, les véhicules devront intégrer de nouveaux systèmes avancés d’aide à la conduite (Adas) pour pouvoir être vendus en Europe. Il y a notamment le freinage d’urgence détectant les piétons et les cyclistes, l’allumage automatique des feux de détresse, la détection d’obstacles à l’arrière, l’aide au maintien dans la voie, le régulateur de vitesse intelligent avec alerte de survitesse, l’enregistreur de données, l’avertisseur de perte d’attention et de somnolence du conducteur ou encore rendre plus simple l’installation d’un éthylomètre antidémarrage. Le texte prend aussi en compte la protection contre les cyberattaques et établit de nouvelles règles pour le choc piéton, qui ne seront applicables sur tous les véhicules qu’en juillet 2026. Mais il comporte également un volet qui touche aux crash‑tests et qui implique donc des changements plus structurels. Maintenant, le crash‑test frontal doit être réalisé sur toute la largeur du véhicule et la norme intègre un crash‑test arrière et un latéral contre un poteau.
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