Le groupe Geely part à la conquête de la France

La croissance du groupe Geely est spectaculaire. Au premier trimestre 2024, le constructeur est, en effet, devenu le premier chinois à figurer dans le top 10 des ventes automobiles mondiales. Un an plus tôt, le groupe se plaçait alors à la 12e position.
Mais en France, Geely en est encore à ses prémices. Loin des lancements tonitruants de certains autres constructeurs, les débuts du groupe dans l’Hexagone se sont faits de manière progressive.
L’entreprise chinoise n’a pas commencé par y vendre ses propres voitures, mais a d’abord pénétré le marché français à travers des acquisitions stratégiques à l’international, avec en premier lieu le rachat de Volvo Cars en 2010.
La marque suédoise étant déjà bien implantée en France via son réseau de concessionnaires, cette acquisition a donc permis au groupe Geely de ne pas partir d’une feuille blanche. Un procédé que le constructeur chinois a répliqué avec Lotus en 2017, certes pour des volumes nettement moindres.
En 2019, vient ensuite la création d’une coentreprise avec Mercedes‑Benz pour relancer la marque Smart avec des modèles 100 % électriques. Un partenariat qui met également fin à la production des voitures Smart à Hambach en Moselle (57) et ce, au profit de la Chine.
Mais le groupe chinois est aussi réputé pour sa prise de participations au sein de Mercedes‑Benz et d’Aston Martin ou encore de Horse, l’entité dédiée aux moteurs thermiques créée par Renault en juillet 2023, dont Geely est actionnaire.
Ce n’est donc qu’en 2022 que le groupe Geely lance officiellement une nouvelle marque sur le marché français, avec l’arrivée de Lynk & Co. En 2025, ce sera au tour de Polestar, avant que Zeekr ne vienne clôturer cette série.
Avec Volvo, Lynk & Co ou encore Polestar, le groupe Geely s’appuie donc sur trois marques premium aux positionnements parfois très proches, au point que leurs différences ne sautent pas toujours aux yeux. Pourtant, chacune semble avoir ciblé sa clientèle et elles parviennent à se croiser sans pour autant se cannibaliser.
Volvo : l’histoire et la sécurité
Avec six véhicules entièrement électriques déjà commercialisés en Europe (EX30, EX40, EC40, EM90, EX90 et ES90) et quatre autres modèles en cours de développement, le 100 % électrique reste un pilier majeur de la stratégie produits de Volvo.
Cependant, en raison de l’évolution des conditions du marché et des demandes des clients, la marque sino‑suédoise a réajusté l’an dernier ses objectifs pour 2030 qui sont désormais moins ambitieux.
Face à une montée en puissance pas aussi forte qu’attendu et pointant également du doigt le manque de bornes de recharge, Volvo a en effet décidé de renoncer au 100 % électrique en 2030.
Un véritable retournement de situation pour le constructeur du groupe Geely qui était non seulement l’un des leaders en termes de transition vers l’électrique, mais également le premier à viser des ventes 100 % électriques avant la fin de la décennie.
Son positionnement reste néanmoins identique. "Volvo se veut être une marque davantage orientée vers le premium historique avec une image plus familiale, souligne Yves Pasquier‑Desvignes, président de Volvo Cars France. La stratégie du groupe Geely est de dire qu’il y a de la place pour toutes les marques. Lynk & Co est une marque considérée par le groupe comme étant premium accessible. Et on peut définir Polestar comme une marque premium plus sportive. En revanche, ce qui fait la force de Volvo est son histoire. La marque a plus de 100 ans d’existence avec des valeurs qui lui ont permis de construire une vraie relation de confiance avec ses clients. Nos valeurs résiduelles sont également connues et maîtrisables. Une Volvo a un prix aujourd’hui et aura aussi un prix demain, que l’on connaît par la valeur de la marque, celle des investissements, mais aussi par le gage de qualité et de sécurité de nos modèles."
Volvo reste donc la marque la plus installée du groupe, avec un capital confiance très fort auprès de sa clientèle.
Le Lynk & Co 08 annonce une autonomie électrique de 200 km, un record pour une hybride rechargeable. ©Lynk & Co
Lynk & Co : l’accessibilité
De son côté, Lynk & Co se veut être une marque premium mais avec des prix tout de même plus accessibles. Si elle voulait d’abord casser les codes, la marque chinoise a finalement décidé de renoncer, faute de volumes suffisants, à vendre ses voitures exclusivement en ligne ou avec une formule d’abonnement.
Un virage stratégique qui passe aujourd’hui par le développement d’un réseau de distribution traditionnel. La marque dirigée par Nicolas Lopez Appelgren se tourne logiquement, dans cette démarche, vers un autre membre de la famille Geely : Volvo.
Seuls les distributeurs de la marque suédoise sont sollicités pour accrocher le nouveau panneau. Le 24 mars 2025, une vingtaine d’investisseurs Volvo potentiels ont, par ailleurs, été réunis à Paris en présence du directeur général de Lynk & Co.
Le but était de leur présenter la nouvelle stratégie de la marque, mais aussi d’aborder les aspects contractuels et financiers. "En 2025, notre objectif est d’avoir entre 20 et 25 sites physiques en France, dont une dizaine ouvriront avant l’été, assure Michael Meyer, responsable du développement réseau de Lynk & Co France. Nous visons les 40 points de vente en 2026."
L’objectif premier est de couvrir les principales métropoles du pays. Lynk & Co n’entend pas braquer les investisseurs avec des exigences démesurées et des investissements excessifs. Néanmoins, il leur est demandé de créer un espace de vente spécifique à la marque, avec son propre univers, et de mettre à disposition du personnel dédié, notamment des vendeurs.
Un minimum de 150 m2 d’exposition est réclamé, une taille raisonnable qui ne nécessitera pas la construction de sites, seulement des aménagements. "Il ne s’agit pas de simples corners, nous avons d’ailleurs des projets qui portent sur 400 m2", tient néanmoins à préciser Michael Meyer.
Le but n’est pas de voir trop petit. Lynk & Co entend accueillir ses futurs clients dans des espaces conviviaux et qui seront en mesure de présenter toute la gamme. Celle‑ci comptera trois modèles à partir de l’été, dont le SUV 08 hybride rechargeable avec une autonomie de 200 km.
De plus, Lynk & Co propose des contrats de distribution classiques. Il n’est pas question de contrats d’agent. La vente en ligne, qui reste possible, ne devrait pas être un sujet de crispation avec le réseau puisqu’il sera rémunéré systématiquement, même si le client ne se rend pas en concession.
Enfin, concernant l’après‑vente, il se fera dans les ateliers Volvo, comme c’est d’ailleurs le cas pour certains depuis 2021. "Nos véhicules peuvent d’ores et déjà être entretenus dans 35 ateliers Volvo et nous serons à 45 d’ici la fin de l’année", précise Michael Meyer.
Les modèles Lynk & Co partagent d’ailleurs de nombreux éléments techniques et mécaniques avec ceux de Volvo. Forte de ces développements, la marque chinoise vise les 3 000 ventes en France en 2025.
Le temps presse, puisque le compteur n’est qu’à 238 unités à fin mai. En 2024, 519 exemplaires du SUV 01 avaient été écoulés. Ce dernier a depuis été restylé et a récemment reçu le renfort du SUV 100 % électrique 02.
Véhicule le plus rapide de la gamme, le Polestar 4 se distingue par l’absence de lunette arrière. ©Polestar
Polestar : la carte de la sportivité
Si Polestar était déjà présente sur d’autres marchés européens depuis quelques années, la marque fera officiellement ses débuts en France en 2025. Argument de taille et qui lui permettra sans doute de gagner rapidement des parts de marché, Polestar ne partira pas d’une feuille blanche.
Pour son arrivée dans l’Hexagone, le constructeur 100 % électrique pourra, en effet, à l’instar de Lynk & Co, s’appuyer sur le réseau Volvo, bien que la marque sera, quant à elle, distribuée sous contrat d’agent.
À cela, s’ajoute également une gamme de trois véhicules, qui comprend pour l’heure les Polestar 2, 3 et 4. "Nos trois véhicules sont reconnus pour être typés très sportifs, à la fois en termes de design, mais aussi au niveau du réglage du châssis ou encore des performances. D’abord, le Polestar 2 est un fastback, mi‑berline mi‑SUV, de 476 ch avec une autonomie de 659 km en cycle WLTP. De son côté, le Polestar 3 est un grand SUV sportif de 517 ch qui offre une endurance allant jusqu’à 706 km. Enfin, le Polestar 4 est un SUV coupé innovant, qui se distingue par l’absence de lunette arrière et qui est capable de réaliser 620 km entre deux recharges. C’est le véhicule le plus rapide de la gamme, en mesure de passer de 0 à 100 km/h en à peine 3,8 s", présente Stéphane Le Guével, directeur général de Polestar France.
Mais cette recherche de sportivité chez Polestar ne sort pas de nulle part. Avant d’être un constructeur de véhicules de série, Polestar était une marque de préparation de véhicules de compétition.
Après son rachat par Volvo en 2015, Polestar s’occupera également de la ligne performance de la marque historique suédoise. "Nous souhaitons avant tout nous différencier des autres grâce à notre ADN de sportivité. Cela peut paraître anecdotique mais les modèles de la gamme Polestar ne sont pas bridés électroniquement, tandis qu’une Volvo ne pourra pas dépasser les 180 km/h", glisse Stéphane Le Guével.
Cette gamme de véhicules sportifs sera par ailleurs prochainement renforcée par trois lancements avec les Polestar 5, un modèle GT à faible volume de plus de 900 ch, Polestar 6, un coupé cabriolet, et surtout Polestar 7. Ce dernier sera un SUV compact dont le principal intérêt pour la clientèle européenne est qu’il sera produit sur le Vieux Continent. Une première pour la marque.
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