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Constructeurs

À Genève, un salon de l’automobile minimaliste, symptôme du marasme ambiant

Publié le 23 février 2024

Par Nabil Bourassi
4 min de lecture
Il y aura très peu de constructeurs pour le retour du salon de Genève, du 26 février au 3 mars 2024, que tous croyaient enterré depuis le Covid. En plus d'un rebond des ventes qui se fait attendre en Europe, des échéances réglementaires toujours plus contraignantes, la filière s'inquiète pour son avenir à l'heure de l'intelligence artificielle.
salon de Genève
Renault et Dacia seront les seuls gros constructeurs automobiles français présents au salon de Genève. ©Geneva international motor show

Retour difficile pour le salon de l’automobile de Genève. Ce rendez-vous, jadis réputé incontournable, n’est plus que l’ombre de lui-même.

 

On ne compte plus les absents, mais plutôt les présents. Ainsi, Renault et Dacia seront les seuls gros constructeurs automobiles qui tiendront salon. Ils lèveront le voile sur la nouvelle R5, tandis que Dacia montrera son nouveau Duster et sa Spring restylée. Ils seront accompagnés par des challengers non moins intéressants que sont les chinois BYD et MG, et l’américain Lucid.

 

La société organisatrice déjà fragile n’avait pas survécu à la crise du coronavirus. Et son rachat par le Qatar (qui souhaitait importer le concept) a fait long feu. Mais cette désaffection traduit surtout le malaise du secteur automobile qui doit affronter des vents contraires et dispose d’assez peu de leviers d’optimisme, du moins sur le marché européen. 

 

Pas de retour en arrière

 

Il est d’ores et déjà acquis que celui-ci ne retrouvera jamais son niveau d’avant-crise. Les prévisions pour 2024 font état d’un fort ralentissement. D’après l’ACEA, la croissance des ventes en volume devrait passer de 12,5 % à 2,5 % cette année. L’association table sur 10,4 millions de voitures, soit 20 % de moins que son niveau d’avant-crise. 

 

Les équipementiers automobiles ont fini par prendre acte de cet état de fait et ont annoncé des réajustements d’effectifs pour juguler des surcapacités coûteuses.

 

Forvia a annoncé 10 000 suppressions de postes. ZF anticipe 12 000 emplois en moins, tandis que Continental va licencier plus de 7 000 salariés. Quant à Bosch, il se séparera de 2 700 personnes. Plastic Omnium a déjà baissé ses effectifs de 5 % en Europe et a fermé deux usines.

 

A lire aussi : Les équipementiers automobiles européens ont fortement décroché

 

Les constructeurs automobiles, qui s’étaient désolidarisés des équipementiers face à l’agenda réglementaire de la transition énergétique, sont rattrapés par la réalité puisque un à un, les gouvernements retirent leurs aides à l’achat de voiture électrique. Une claque qui a déjà provoqué un effondrement des ventes de véhicules électriques en Allemagne (-58 % en décembre 2023). 

 

L'étau réglementaire se resserre

 

Pour les constructeurs, l’étau se resserre alors que les échéances réglementaires vont survenir à grande vitesse : les normes CAFE en 2025 dont le seuil passe de 95 grammes de CO2 par kilomètre à 81, puis 50 grammes en 2030, la nouvelle norme Euro 7 attendue en 2027 et qui va considérablement surenchérir le coût d’un moteur thermique, avant la fin des ventes de cette motorisation en 2035.

 

À cela, il faut ajouter la guerre des prix enclenchée par Tesla, et amplifiée par les marques chinoises qui affichent des prix jusqu’à 25 % moins cher. Et la très forte hausse des taux d’intérêt ne facilitera pas les ventes de voitures suréquipées.

 

Les constructeurs automobiles réalisent qu’ils ont investi des fortunes dans une gamme extrêmement dépendante des politiques de subventions publiques, et susceptible de sauter du jour au lendemain. 

 

Une situation financière saine...

 

Carlos Tavares lui-même a demandé le renouvellement de l’opération du leasing social en France qui a rencontré un succès fulgurant avec près de 50 000 ventes. Les constructeurs automobiles européens affichent pourtant des résultats solides.

 

Stellantis maintient un très haut niveau de rentabilité à presque 13 % de marge opérationnelle, Renault gagne 2,4 points sur sa marge. Les trésoreries sont remplies de cash, et les groupes se désendettent. 

 

...mais de sérieux doutes sur l'avenir

 

La conjoncture ne suffit pas à expliquer le profond trouble qui agite les industriels. À long terme, ils s’interrogent sur leur capacité à maintenir leur position sur la chaîne de valeur, alors que les profits de demain seront moins sur la vente de voitures que sur leurs contenus.

 

Ils investissent pourtant d’importantes sommes d’argent dans le software qui pourrait représenter jusqu’à 60 % de la valeur d’une automobile en 2030 d’après le cabinet PwC.

 

Mais alors que les marchés ont les yeux rivés sur les progrès de l’intelligence artificielle, l’industrie automobile semble encore à des années-lumière de maîtriser cette technologie.

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