Le plan d’industrialisation des batteries en Europe est en marche
L’usine d’Automotive CellS company (ACC), co-entreprise entre Stellantis, TotalEnergies et Mercedes, a ouvert ses portes, le mardi 30 mai 2023. Il s'agit de la première usine de production de batteries sur le sol français. Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, a d’ailleurs fait le déplacement à Billy-Berclau (62) aux côtés d'Agnès Pannier-Runacher, la ministre de la Transition énergétique, de Roland Lescure, ministre de l'Industrie, ainsi que de responsables italiens et allemands.
"C'est la première fois depuis des décennies qu'on recrée en France une filière industrielle à partir de presque rien", souligne Bercy. Précisons que les PDG de Stellantis, TotalEnergies et Mercedes sont eux aussi sur place.
Située près de Lens et jouxtant le site historique de PSA à Douvrin, l’usine ACC est la première d’une série de trois autres complexes, qui verront le jour sur le sol européen. En effet, en 2025, une gigafactory sera construite en Allemagne, suivie, un an plus tard, d'une implantation sur le sol italien. "Pour la première fois depuis Airbus, la France et l'Europe créent une nouvelle filière industrielle", s'enthousiasme le ministre de l'Économie, Bruno Lemaire.
L’usine ACC prévoit d’employer 2 000 personnes et produira à terme 40 GW de batteries par an, ce qui correspond à la production annuelle de 500 000 véhicules électriques. La production doit démarrer à l'été et la commercialisation à la fin de l'année 2023. À noter que l’usine fonctionnera à une capacité maximale de 13 GW et 600 emplois en 2024. ACC devrait faire évoluer sa technologie des batteries à lithium-ion vers des batteries solides.
Un écosystème européen de la batterie
La gigafactory est le fruit d’un travail de cinq ans, initié par les gouvernements français, allemand, italien, mais aussi des groupes privés, par l’intermédiaire de Stellantis, TotalEnergie et Mercedes. Le groupe ACC, qui se voit comme un "Airbus de la batterie", sera l'un des premiers à produire sur le Vieux continent.
Les enjeux son multiples. L’objectif étant de réindustrialiser l’Europe et éviter toute dépendance économique vis-à-vis de la Chine. Il est aussi question d’anticiper l'arrêt des ventes de véhicules thermiques, programmé en 2035.
Le projet ACC fait donc partie d’une stratégie européenne avec la volonté d’implanter les grands sites d’assemblage des batteries dans l’Hexagone. Après celle de Billy-Berclau, quatre autres projets lui se concrétiser, dont la gigafactory de Verkor, la start-up française, ou encore celle du groupe sino-japonais AESC-Envision, toutes les deux basées elles aussi dans les Hauts-de-France.
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C'est d'ailleurs dans cette région qu'émerge un écosystème qu’élus et industriels ont baptisé "Vallée de la batterie". Cette dernière devrait attirer les fournisseurs de matériaux et composants de batteries, ainsi que des sites de recyclage.
Le 12 mai 2023, Emmanuel Macron a ainsi annoncé l'implantation à Dunkerque (59) d'un site de production de cathodes (une des deux électrodes composant une batterie), financée par le chinois XTC et le français Orano.
Notons que le groupe sino-japonais AESC-Envision, qui a acquis un terrain près de Douai (59), compte fournir Renault Electricity à partir de début 2025, la start-up grenobloise Verkor, soutenue par Renault, Schneider Electric et Arkema, quant à elle, produira à partir de mi-2025 à Dunkerque. Pour finir, le groupe taïwanais ProLogium, spécialisé dans la batterie dite "solide", vise une entrée en production fin 2026 pour sa première usine à l'étranger. Au total, une cinquantaine de projets de ce type ont été annoncés à l'échelle européenne ces dernières années.
L’enjeu de l’emploi
La transition vers l'électrique représente un défi social d'ampleur, avec la disparition annoncée de dizaines de milliers d'emplois, selon syndicats et organisations patronales, tandis que la Vallée de la batterie doit recruter et former plus de 20 000 personnes en quelques années, selon la PFA. La CGT du site Stellantis de Douvrin, voisin d'ACC et voué à la fermeture, a d'ailleurs prévu de manifester en marge de la visite des membres du gouvernement contre la "casse sociale" liée à l'électrification.
Attirer, former et recruter sont devenus les maîtres mots pour produire en Europe des batteries de voitures électriques. L'un des défis des futures usines qui s'implantent en France consiste à recruter rapidement des milliers de salariés. "Avoir les usines, c'est bien. Avoir le personnel, c'est mieux", a lancé récemment Xavier Bertrand, président de la région Hauts-de-France. Des réunions d'information, séances de jobs dating et formations sur site ont déjà été entamées.
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Un plateau technique mobile a été installé début mai 2023 à l'usine Stellantis de Douvrin (Pas-de-Calais) pour initier les salariés au travail en salle blanche et faciliter leur transfert vers les constructeurs de batteries d'ici la fermeture prochaine du site automobile, qui produit des moteurs thermiques. Le défi du recrutement semble être de taille. Mais en visite à Dunkerque (62) mi-mai, Emmanuel Macron a tenu à rassurer : "On va mettre le paquet sur les compétences et la formation, c'est la mère des batailles".
Pour accélérer le rythme, les constructeurs concurrents se sont alliés au sein d'un programme de formation appelé Electromob. Ce dernier a le soutien de fonds publics et se dotte de 25 millions d'euros. Malgré les annonces et les initiatives, les créations d'emplois risquent de ne pas compenser les dizaines de milliers de postes perdus en France lors du passage accéléré au tout-électrique, assurent les syndicats et dirigeants.
Rassembler la chaîne de valeur de la batterie sur l’Hexagone
La technologie lithium-ion utilisée sur la première ligne d'ACC reste gourmande en métaux stratégiques dont la chaîne d'approvisionnement se trouve largement dominée par la Chine. Ainsi, le gouvernement a pour ambition de rassembler toute la chaîne de valeur de la batterie d’un véhicule électrique sur le territoire. À l’instar de la production et du raffinage des métaux critiques, avec la création en France de plusieurs bassins miniers. "Cette stratégie permet à l'industrie française de rattraper son retard technologique et d'être à la pointe de la technologie en matière de batterie", a souligné Bercy.
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ACC a été créé en août 2020 et depuis lors, tous les services de l’Etat et des collectivités locales se mobilisent autour de ce projet. Notamment sur l’aspect réglementaire et administratif. "L’autorisation d’exploiter le site a été obtenue en près de six mois, ce qui est un record. Actuellement, dans des projets industriels plus classiques, il faut attendre en moyenne 17 mois. Cette exception doit dorénavant devenir la nouvelle norme. Il s’agit là de l’objectif du projet de loi Industrie verte, qui sera examiné par le parlement prochainement", explique Bercy.
Des subventions pour la batterie
La France a apporté 845 millions d’euros de soutien public dans trois d'activités distinctes. La R&D sur des batteries plus innovantes ; la création d’une ligne pilote ouverte en 2021 à proximité de Bordeaux ; et une participation à la création de l’usine de Billy-Berclau. Au total, le montant des fonds publics engagés par la France et l’Allemagne s’élève à 1,2 milliard d’euros, sur un investissement total de sept milliards d’euros pour les différents sites de ACC.
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Rappelons que le gouvernement français s’est fixé l’objectif de produire sur le territoire deux millions de VE par an d'ici à 2030. La production de la gigafactory ACC devrait permettre d’équiper 60 % des véhicules électriques produits sur le territoire national. A terme, il s'agira de couvrir le besoin domestique et d'exporter le surplus.
Néanmoins, la France reste handicapée par le prix de son énergie, comparée à la Chine ou aux États-Unis qui subventionnent massivement cette industrie grâce à l'Inflation Reduction Act (IRA). (Avec AFP)
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