Mobilians dénonce le transfert de valeur des distributeurs au profit des constructeurs
Le ton monte et la pression se fait de plus en plus forte entre constructeurs et distributeurs automobiles au sujet du passage au contrat d'agent de certaines marques.
Alors que généralement ces discussions contractuelles se nouent entre constructeurs et groupements de marque, elles se déplacent désormais chez Mobilians dont le métier des concessionnaires reste le plus important au sein de l'organisation patronale.
"Le contrat d'agent légal est un droit des constructeurs. Mais nous rejetons les autres propositions de contrats qui impliquent des ajustements qui déséquilibrent la relation commerciale entre constructeurs et concessionnaires. C'est un sujet sur lequel, les organisations similaires à la nôtre, dans les 27 États membres, sont alignées", indiquait Francis Bartholomé, président national de Mobilians lors d'une conférence avec la presse.
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Ce dernier dénonce également la grande hétérogénéité de contrats proposés alors que la Commission européenne a clairement défini le cadre juridique du contrat d'agent. En ligne de mire, les contrats d'agents non véritables proposés par Volkswagen et les contrats de retailers de Stellantis en cours de négociation.
"Il ne nous semble pas que les discussions contractuelles en cours soient au niveau du dialogue économique qui devrait exister entre partenaires", fait remarquer Xavier Horent, délégué général de Mobilians. "L'enjeu est crucial car nous pouvons dire qu'il y a clairement une tentative de captation de l'ensemble de la valeur de la distribution au profit du donneur d'ordre."
Pour Mobilians, le respect des investisseurs que représente le tissu des concessionnaires n'est pas au rendez-vous. Pour preuve, un récent sondage réalisé le syndicat patronal indique que 60 % des distributeurs déclarent ne pas être informés sur les contrats en cours de discussions (70 % des agents interrogés), tandis que 80 % d'entre eux ne sont pas prêts à les signer (85 % des agents) et que 70 % d'entre eux se disent inquiets de la finalité des négociations en cours.
"Clairement nous avons identifié 5 dangers dans ces nouveaux contrats : la rémunération et la politique commerciale, le transfert et la valorisation du fonds de commerce, l'architecture juridique des contrats, la prise en charge des coûts et le négoce du véhicule d'occasion qui pour l'instant échappait au cadre contractuel", avance Francis Bartholomé.
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Reste que si la problématique est bien identifiée, certains contrats, comme celui de Stellantis, n'ont été que peu diffusés et sous le sceau de la confidentialité. Mobilians demande donc la levée de cette clause de confidentialité qui entrave cette confiance et empêche le syndicat de s'emparer officiellement du sujet.
Risque de désarmement commercial des concessions en France
La transformation de la filière automobile, liée au passage au tout électrique en 2035, est souvent évoquée sous le prisme de l'industrie sans tenir compte de l'impact sur les métiers du commerce et des services.
Pourtant, les dangers du "tapis rouge déployé pour les marques chinoises" et dénoncés par Carlos Tavares, directeur général de Stellantis, ne touchent pas que l'industrie automobile. Le risque de résiliation qui pèse sur les distributeurs automobiles a poussé un grand nombre d'entre eux à accueillir à bras ouverts les possibilités offertes par les constructeurs chinois. C'est notamment le cas de Great Wall Motor, de BYD qui vient de signer avec Cosmobilis, Aiways, ou encore MG Motor.
"Le risque de désarmement commercial encourage l'entrée des marques chinoises qui vont affaiblir les constructeurs européens, en tout cas ceux qui pensent pouvoir se passer d'un réseau physique à terme", met en garde Xavier Horent.
Quand resurgit le statut du distributeur
Si l'entrée dans le contrat d'agent est donc loin d'être réglée, celle de la sortie du statut de distributeur l'est encore moins. Les constructeurs qui se sont engagés dans cette voie, estiment en effet ne pas devoir verser d'indemnités (ou très peu) pour le transfert du fonds de commerce lors du passage de distributeur à agent.
Le bras de fer, qui va s'engager également sur ce sujet, n'est clairement défini dans la législation française même si fiscalement ce transfert de fonds doit être valorisé. En Europe, d'autres pays ont opté pour une législation plus protectrice que celle existante dans le droit français.
l'Italie est le dernier exemple en date, après la Belgique, le Luxembourg et l'Autriche. En septembre 2022, les sénateurs italiens ont adopté un amendement qui régit les relations contractuelles entre constructeurs et distributeurs.
Ce dernier comprend une durée minimale de contrat et surtout l'indemnité à verser aux distributeurs, qui doit être proportionnée à la valeur des investissements réalisés. Ce montant doit être évalué par le tribunal en cas de litige. Une disposition dont ne pourraient même pas bénéficier les distributeurs Stellantis puisque les nouveaux contrats ne laissent la place qu'à un arbitrage d'experts.
Pour éviter ce déséquilibre contractuel, Mobilians va déposer une proposition de loi pour mieux encadrer cette relation. Celle-ci doit préciser que les investissements exigés doivent être raisonnables, que le distributeur garde la liberté de cession en réservant un droit de préférence aux constructeurs. Enfin que des indemnisations soient prévus en cas de cessation du contrat.
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