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Constructeurs

Normes CAFE, marché en berne, surcapacités... Le Mondial de l'Auto ouvre ses portes dans la fébrilité

Publié le 14 octobre 2024

Par Nabil Bourassi
5 min de lecture
Le Mondial de Paris doit célébrer le retour de la grande fête de l'automobile. Mais le marché fait grise mine et les constructeurs s'inquiètent face au risque d'une profonde crise de la filière. Les analystes estiment que les fermetures d'usines sont inévitables. La question du maintien tel quel des normes CAFE est plus que jamais posée.
Le Mondial de l'automobile de Paris suscite des inquiétudes sur l'état du marché européen. ©Mondial de l'Auto

Ce devait être le salon du renouveau de la grande fête de l’automobile… Le Mondial de l’Automobile de Paris risque de tourner à la soupe à la grimace. Rarement, l’industrie automobile européenne n’avait été soumise à autant de vents contraires.

 

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Un tiers du marché en moins

 

Le premier d’entre eux est de taille. Les constructeurs automobiles ont acquis la conviction que le marché européen ne reviendra jamais à son niveau d’avant-Covid, soit entre 20 et 30 % de ventes en moins. Pour les constructeurs, cela pose la question des surcapacités. Un sujet extrêmement douloureux comme l’illustrent les réactions très vives des salariés de Volkswagen lorsque celui-ci a évoqué un projet de fermeture de deux usines en Allemagne (en plus de celle de Bruxelles).

 

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Il faut dire que cette question sera d’autant plus urgente outre-Rhin puisqu’une grande partie des capacités de production automobiles était destinée à l’export, notamment en Chine. Sauf que ce marché est également en baisse. De plus, les Chinois s’orientent de plus en plus vers les marques locales, y compris premium. 

 

Les analystes sont formels, les constructeurs devront réduire leur capacité s’ils veulent restaurer leurs marges. Les équipementiers ont déjà commencé à réduire leurs effectifs. 

 

Pas de croissance à moyen terme

 

Car le marché ne donne aucun signe de rebond à moyen ou long terme. Chez AlixPartners, on estime que la croissance moyenne d’ici 2030 sera de 1 % par an. Avec un taux d’utilisation des capacités de production en dessous de 65 %, les usines coûtent trop cher. Et cela pèse sur les prix. Outre la concurrence des marques chinoises qui massacrent les prix, les constructeurs commencent à réduire leur tarif pour faire tourner leurs usines. Sauf qu’ils sont pris en étau avec l’inflation.

 

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Pas étonnant que les constructeurs aient successivement publié des profit warning cet été : BMW, Mercedes, Volkswagen, Stellantis. Ce dernier est le plus mal placé avec des anticipations catastrophiques (cash flow négatif entre 5 et 10 milliards d’euros). Carlos Tavares, qui a acté son départ à la retraite en janvier 2026, se sait sur un siège éjectable si la situation de Stellantis continuait à se dégrader.

 

Le seul groupe à ne pas avoir publié, pour le moment, de profit warning, c’est Renault. Une victoire pour Luca de Meo qui sait que son groupe est l’objet de toutes les railleries et spéculations sur sa pérennité. 

 

Les gouvernements serrent la vis

 

Enfin, dernier clou dans le cercueil de l’automobile européenne : la France vient de nouveau de serrer la vis sur les aides à l’achat et les niches fiscales pour les flottes de société. Cette annonce survient quasiment un an après la fin brutale des aides à l’achat aux voitures électriques en Allemagne qui a provoqué une chute de ce marché (-16 % sur les huit premiers mois de l’année).

 

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Seule lueur dans ce décor cauchemardesque, le gouvernement français a néanmoins annoncé le retour du leasing social en 2025. Mais dans un contexte de coupes budgétaires drastiques, il faudra attendre de connaître les modalités d’octroi de ce dispositif. De même, Berlin est revenu sur sa position en lançant un plan pour soutenir les ventes de voitures électriques.

 

Les marques chinoises toujours très offensives

 

Si les constructeurs européens ne cachent plus leurs inquiétudes, les constructeurs chinois, eux, seront de plus en plus visibles dans les travées du parc des expositions de la porte de Versailles. BYD, GAC, Hongqi, Seres, Skyworth, XPeng, Maxus… Étonnamment, le mieux placé d’entre eux ne sera pas présent, seul sur un stand : MG. Il partagera néanmoins la vedette avec les autres partenaires du Crédit Agricole Consumer Finance.

 

Les marques chinoises ne semblent pas inquiètes des effets des droits de douanes imposés par l’Union européenne et qui peuvent se monter à 46,3 % pour certaines d’entre elles, y compris les 10 % habituels. "L’écart entre leurs prix de vente en Chine et en Europe est de 60 %, il y a donc de la marge avant d’entamer leur compétitivité prix", explique un analyste. "Ils feront du CKD en Europe", ironise un cadre d’un grand constructeur européen. 

 

Alors, les Européens vont faire ce qu’ils savent faire de mieux : présenter des nouveaux modèles. Ils ont commencé à baisser leurs prix, réduire certains coûts ou en cessant la course aux équipements. Mais il existe de nombreux coûts incompressibles.

Les normes CAFE dans le viseur

 

Mais, le véritable sujet qui va monopoliser toutes les conversations restera les normes CAFE. Celles-ci doivent franchir un nouveau palier en 2025 et chaque constructeur devra encore baisser ses émissions de 15 %. D’après Luca de Meo, président de l’ACEA, les amendes pourraient s’élever à 15 milliards d’euros.

 

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Selon une étude d’AlixPartners, la facture pourrait être plus élevée : 51 milliards entre 2025 et 2029. Et selon les analystes du cabinet, même Stellantis, qui n’appelle pas à l’assouplissement des objectifs CAFE, n’échappera pas aux amendes. Pour l’heure, la Commission européenne n’a envoyé aucun signal dans ce sens. 

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