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Constructeurs

Dossier IA – Le design en ébullition

Publié le 20 décembre 2024

Par La Rédaction
4 min de lecture
Le monde des designers connaît une mutation. Il ne s'agit pas d’un changement de paradigme lié à la voiture 100 % électrique, mais à l’essence même de leur métier : la création. L’intelligence artificielle peut-elle les remplacer ?
Design IA
En 2023, Renault s’est amusé à demander à l’IA de repenser la Twingo dans l’univers des SUV. ©SIA

Elle fascine ou fait craindre le pire. L’intelligence artifi­cielle a également débarqué dans l’univers du design. Chez un grand constructeur français, son arrivée est déjà effective. "On met tout en œuvre avec l’IA. Notre pre­mier objectif est d’aller encore plus vite dans le développement d’un pro­jet. On l’utilise avec un atout maître : on lui transmet les gènes d’une pre­mière esquisse ou numérisation et on lui demande dans un premier temps de générer plus rapidement différentes variantes ou silhouettes sur le thème choisi. En moins de 2 min, nous pouvons ainsi présenter toute une gamme potentielle et tous ses dérivés en termes de silhouettes et les disposer sur le mur d’images physique ou numérique pour une présentation à la direction", nous explique un designer qui préfère garder l’anonymat.

 

Si cet espace de création assis­tée semble restreint, il a au moins l’avantage de reposer sur une mé­moire récente, transmise à l’IA. Mais la plus grande interrogation vient de la construction de sa mé­moire, celle que l’humain lui a transmise en amont. Aujourd’hui, le seul rôle avéré de l’IA est de créer en un temps court une réponse composée d’un amalgame de tout ce qu’elle est allée chercher dans ses serveurs, correspondant à un thème demandé.

 

Mais l’intelligence artificielle est‑elle capable de créativité ? Ou est‑elle utilisée pour stimuler celle des designers ? Vaste débat. Tous les constructeurs ont actionné ce levier de création avec une part d’inconnu.

 

Jean‑Pierre Ploué, pa­tron du design de Stellantis Europe, mise également beaucoup sur l’ap­port de l’IA. Mais visiblement dans une discrétion absolue. Pourquoi tant de secrets autour de l’arrivée de l’IA dans les bureaux de design ? Sans doute parce que les avancées s’effectuent à pas de géant et que jour après jour, le design tente de maîtriser la bête.

 

Chaque progrès doit rester confidentiel. D’autant que l’impact est fort en termes de ressources humaines : chez Re­nault, par exemple, les différents bureaux de design sur la planète rassemblent environ 500 per­sonnes. Imaginez que l’IA puisse en remplacer "un certain nombre" ?

 

 

L’univers des graphistes semble déjà impacté… Stéphane Janin, entre autres ex‑responsable des concept cars Renault et actuellement direc­teur du studio de design avancé du constructeur chinois GAC, studio implanté à Milan, ne s’estime pas en mesure aujourd’hui de prédire si l’intelligence artificielle pourra un jour remplacer les designers. "En revanche, je peux vous confir­mer qu’en Chine, ils investissent beaucoup. L’IA est d’abord un outil d’amélioration de la productivité. Et si on n’évoque pas encore la création, c’est un peu pour se rassurer."

 

Car les progrès sont exponen­tiels. Jusqu’à créer de l’inquiétude dans les bureaux de design où l’on imagine aisément que les effec­tifs puissent être réduits. Même si, pour l’instant, les équipes se rassurent en estimant que l’esprit créatif répond aussi à un instinct : celui de sentir l’air du temps.

 

Le directeur d’Apple, Tim Cook, voit quant à lui les choses d’une ma­nière pragmatique : l’IA permettra aux créatifs de se concentrer sur leurs véritables missions. Dans la majorité des centres de design, on ne croit pas (encore ?) que dans un futur prévisible la performance in­tellectuelle et créative puisse être fournie par des machines.

 

Au design BMW, on expliquait au début des années 2020 que peu à peu, l’IA prenait en charge les tâches de routine quotidiennes. Mais dans dix ans au plus tard, ce sera la norme.

 

 

Quand on demande au designer français Benoît Jacob, numéro deux du design monde du constructeur chinois GAC – et auteur du dessin de la Logan de 2004 et des BMW i3 et i8 – ce qu’il pense de l’arrivée de l’IA dans les studios de design, il répond simplement "qu’elle agrège des données et le terme de «données» renvoie au passé, pas au futur."

 

Pour l’instant, l’usage de l’IA dans le design se concrétise par des itérations de créations connues. Est‑ce possible d’aller au‑delà ? Pour les grands designers, difficile pour l’instant d’aller chercher une réelle créativité, une façon de dis­tordre la réalité pour créer un de­sign complètement nouveau.

 

Par Christophe Bonnaud

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