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Industrie

L’Europe craint que le Royaume-Uni serve de porte d’entrée aux véhicules chinois

Publié le 6 mars 2024

Par Catherine Leroy
3 min de lecture
Le Royaume-Uni sera-t-il le maillon faible dans l'enquête de Bruxelles sur les subventions accordées par le gouvernement chinois à ses constructeurs nationaux ? La crainte de ce détournement des routes de l'importation augmente… aussi vite que la Commission européenne cherche à appliquer une hausse des droits de douanes.
Importation de véhicules chinois par la Grande-Bretagne
Puisque les frontières du marché européen sont plus surveillées, une route dérivée pourrait bien être empruntée par le Royaume-Uni. ©adobe-stock.com-Petert2

Le 13 septembre 2023, la Commission européenne lançait une vaste enquête pour démontrer l’existence de subventions du gouvernement chinois pour favoriser l’exportation de ses véhicules électriques sur le sol européen.

 

Quelques jours plus tard, le 4 octobre 2023, Ursula Van der Leyen, présidente de la Commission, déclarait avoir réussi à réunir suffisamment de preuves de subventions pour poursuivre son enquête dans la finalité d’une hausse des droits de douane entre la Chine et l’Union européenne.

 

Les résultats définitifs de cette enquête ne devraient être publiés que cet automne, vraisemblablement, au moment du Mondial de l’automobile qui se déroulera à Paris du 14 au 20 octobre 2024. Mais des conclusions à mi-parcours devraient être rendues publiques dès ce printemps, avec la possibilité d’appliquer des mesures dites provisoires de droits de douane supplémentaires, pendant la poursuite de l’enquête.

 

"Ce serait assez inédit, mais dès cet été, les droits de douane appliqués aux véhicules importés de Chine pourraient être relevés. En réalité, le contexte international est très instable et le secteur automobile est sensible à ces sujets de par son degré de mondialisation très élevé ", nous explique ce professionnel proche du dossier.

 

Mais en attendant cette décision et les mesures de représailles du gouvernement chinois qui ne tarderont pas à venir, y compris sur d’autres secteurs comme par exemple l’importation du cognac français en Chine, d’autres craintes font jour.

 

Le Royaume-Uni devient un peu le maillon faible du protectionnisme à l’européenne. Puisque les frontières du marché européen sont plus surveillées, une route dérivée pourrait bien être empruntée par le Royaume-Uni.

 

Le Brexit déroule le tapis rouge aux constructeurs chinois

 

Pour rappel, lors de sa sortie de l’Union européenne, la Grande-Bretagne avait conclu un accord commercial qui supprimait les droits de douane entre les pays des deux côtés de la Manche. Mais cet accord, qui devait prendre fin le 1er janvier 2024, avec comme conséquence l’application de 10 % de droits de douane dans les échanges, a été prolongé in extremis jusqu’au 1er janvier 2027.

 

Pendant encore près de trois ans, les échanges sont donc libres de taxes. "Les règles transitoires, très souples, ont donc été prolongées de trois ans. Normalement au 1er janvier 2024, des droits de douanes de 10 % devaient s’appliquer à moins que 45 % de la valeur des pièces des véhicules soient issus de l’Union européenne ou du Royaume-Uni. C’est une règle écrite sur la base d’un pari sur le rythme d’industrialisation des batteries. Comme les véhicules actuellement ont énormément de contenus en provenance de Chine, l’exemption des droits de douane n’aurait jamais pu être réalisée. Mais le problème n’est que reporté", ajoute cet expert.

 

D’autant qu’au 1er janvier 2027, cette règle des 45 % sera plus sévère. Il faudra alors que la CAM (élément essentiel de la cathode de la batterie) soit produite localement, en Grande-Bretagne ou sur le sol européen. Un espoir qui commence même à être douché car les projections de production de la CAM européenne ne devraient pas permettre de suivre cet objectif. Le risque de taxe de 10 % resurgit donc avant même l’échéance de 2027.

 

Mais en attendant, les constructeurs chinois pourraient très bien passer par le filtre du Royaume-Uni pour atteindre l’Union européenne et éviter ainsi les droits de douane relevés que veut appliquer Bruxelles. C'est la crainte des professionnels qui envisagent déjà les mesures de rétorsion appliquées par la Chine, comme un accès plus difficile aux batteries ou même au marché chinois. De quoi donner de nouvelles sueurs froides à l'Allemagne et son industrie automobile.

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