Euro 7, ces normes qui ne satisfont personne
Le vote a été sans appel le 9 novembre 2023. Les députés européens ont voté le texte décrivant les futures normes Euro 7 d'émissions de polluants à 329 voix pour, 230 contre et 41 abstentions.
Mais contrairement aux idées reçues, le texte adopté ne fait pas la part belle aux constructeurs automobiles et reprend dans la très grande majorité les éléments proposés par la Commission européenne, à savoir une sévérisation des seuils d'émission des oxydes d'azote, des particules, du monoxyde de carbone et de l'ammoniac.
Intégration des particules liées au freinage et aux pneumatiques
Comme prévu également, les particules issues du freinage et des pneumatiques (y compris pour les véhicules électriques, seront bien prises en compte dans ces nouvelles mesures). Le parlement a même choisi d'abaisser le seuil de ces émissions pour le freinage.
La Commission européenne prévoyait dans son texte initial une limite de 7 mg/km jusqu'en 2034, puis 3 mg à partir de 2035. Dans le texte voté ce matin, la limite est prévue à 3 mg dès l'entrée en vigueur du texte pour les véhicules électriques, à hydrogène et hybrides. Pour les moteurs 100 % thermiques, celle-ci est fixée à 7 mg jusqu'en 2030. Après cette date, une nouvelle limite sera définie.
Aucune valeur cependant n'est fournie pour les particules émises par les pneumatiques. Selon un expert du secteur, c'est surtout parce qu'aucune méthodologie n'est actuellement disponible pour ce calcul.
Un texte plus drastique sur les Nox et les particules fines
"Dire aujourd'hui que le texte revient aux limites d'émission en vigueur depuis Euro 6 est une grossière erreur. Car le Parlement européen vient d'adopter en réalité presque toutes les propositions de la Commission européenne", explique ce même expert.
De fait, la limite autorisée pour les émissions de Nox passe de 80 mg à 60 mg/km quelle que soit la motorisation, essence ou diesel. Idem pour les émissions de particules fines. Euro 6 fixe la limite du nombre de particules (au niveau du moteur) émises à 6 x 1011 pour les particules inférieures à 23 nm. Si la limite en nombre ne varie pas effectivement, le texte adopté prendra en compte la taille des particules dès 10 nm, soit un flux supérieur de 30 % par rapport aux normes actuelles.
Léger aménagement sur les conditions de tests
Une petite souplesse a cependant été admise sur les conditions de test par rapport à la proposition de la Commission européenne. Dans une première version, celle-ci avait clairement indiqué que toutes les valeurs obtenues devaient l'être quelles que soient les conditions de test (sur toute, en laboratoire, par toute température et quel que soit le terrain ou la route).
"Dans le texte du parlement, un léger recadrage des conditions étendues a été opéré, notamment au niveau des écarts de températures qui ne vont plus de 0 à -10 degrés et de +35 à +45 degrés mais de 0 à -7 degrés et de +35 à 38 degrés, mais la nuance est infime", nous confirme ce spécialiste.
A lire aussi : L'impossible équation de la norme Euro 7
Par ailleurs, il n'est plus question de repousser la date d'entrée en vigueur des normes qui devront s'appliquer deux ans après la parution des actes secondaires de la Commission européenne pour les nouveaux types de véhicules et trois ans après pour tous les types de véhicules.
"Tout dépendra de la vitesse à laquelle la Commission publie ces textes. Imaginons que ce soit le cas fin 2024. Euro 7 s'appliquera donc dès la fin 2026", poursuit-il. La date de 2030, évoquée un premier temps, ne s'applique en réalité que pour les constructeurs à faible volume.
Euro 7 se jouera au trilogue
Pourtant plus sévères, ces normes font bondir la présidente de la Commission des transports et du tourisme du Parlement européen : "La norme Euro 7 votée aujourd’hui par la Parlement européen est la preuve que l’Europe n’a toujours pas tiré les leçons du Dieselgate. Je refuse de voter pour un tel gâchis, alors que l’on dénombre 300 000 victimes de la pollution de l’air chaque année en Europe. L’Europe tient un double discours, incohérent. D’un côté, elle met en place une directive sur la qualité de l’air mais elle ne se donne pas les outils pour y arriver."
A lire aussi : Normes Euro 7, l'autre sujet européen explosif
Plus timorée, l'association des constructeurs européens (ACEA) affirme cependant que le vote de ce jour montre une approche plus réaliste d'Euro 7.
"Il n'en demeure pas moins qu'Euro 7 représente un investissement important pour les constructeurs automobiles, en plus de leurs énormes efforts de décarbonation", a déclaré Sigrid de Vries, directrice générale de l'ACEA dans un communiqué. "Cela survient également dans un contexte géopolitique et économique extraordinairement difficile, marqué par la flambée des prix de l’énergie, les pénuries de la chaîne d’approvisionnement, les pressions inflationnistes et le ralentissement de la demande des consommateurs. L’Europe a besoin d’un Euro 7 proportionné qui équilibre les préoccupations environnementales et la compétitivité industrielle."
Celle-ci se demande quand même : "Étant donné que les méthodes de test des émissions autres que les gaz d'échappement sont entièrement nouvelles et n'ont pas encore été vérifiées, la faisabilité technique de ces nouveaux objectifs doit être garantie".
Le vote final du texte se jouera dans le cadre du trilogue européen réunissant la Commission européenne, le Conseil de l'Union européenne et le Parlement européen. Une nouvelle bataille en vue puisqu'un front de huit pays intégrant la France s'était opposé à ces normes. La position de la France est attendue.
Sur le même sujet
Laisser un commentaire
Vous devez vous connecter pour publier un commentaire.