Voitures électriques : Far-a-Day relance le concept français de batterie externe

Le concept avait été enterré, mais il n'était pas mort. Far-a-Day relance l'idée de proposer des batteries externes amovibles à brancher aux voitures électriques pour leur permettre de couvrir des distances plus longues. L'entreprise française pense que les planètes sont bien mieux alignées qu'il y a deux ans pour démarrer des opérations à grande échelle.
Far-a-Day s'inscrit en effet dans la continuité de la société EP Tender. Pas étonnant donc de retrouver dans le nouveau carré d'associés initiaux, Jean-Baptiste Segard, ingénieur spécialisé en robotique à l'origine de la technologie EP Tender. Cette fois, il a confié les rênes à Arthur Darde, multi-entrepreneur, et s'est entouré d'un directeur technique et d'une directrice marketing avec respectivement Arnaud Villeneuve et Marie Laloy.
Une centaine de lieux pour couvrir le territoire
Un premier déploiement de stations de recharge va être réalisé. Le long de l'autoroute reliant Paris et Bordeaux, Far-a-Day aménagera des points logistiques où les utilisateurs récupéreront une sorte de remorque qui est en fait une batterie sur roues. "Il suffit de se garer et, deux minutes plus tard, sans avoir à descendre de voiture, le voyageur peut repartir avec un gain d'autonomie. Tout est robotisé ", explique Arthur Darde, le directeur général.
La remorque représente un encombrement de 1,30 mètre de long pour 1,25 m de large et 90 cm de haut. Elle pèse 500 kg, dont 300 kg sont à mettre au crédit de la batterie de 60 KWh. Les premiers tests en conditions réelles réalisés par les ingénieurs ont montré que Far-a-Day accroît de 300 km l'autonomie d'une voiture de ville sur autoroute.
Arthur Darde y voit "un moyen de permettre aux voitures électriques les plus abordables de couvrir de longues distances sans souffrir de leurs caractéristiques", soit "une réconciliation des deux mondes, généralistes et premium". Une vision en laquelle Stellantis a refusé de croire au moment de parier deux millions d'euros en 2023, soit le dernier tiers de la levée de fonds, condamnant EP Tender à liquidation.
En reprenant le travail accompli, il a fallu 4,5 millions d'euros pour créer le corridor Paris-Bordeaux et dégager un budget de communication. Sept millions d'euros supplémentaires suffiront à couvrir 80 % des besoins nationaux avec une trentaine de stations. Un total, enfin, de 23 millions d'euros a été estimé pour ouvrir une centaine de points de stockage et dépasser la barre des 95 % de taux de service sur l'ensemble du territoire français.
Une aubaine pour les concessionnaires automobiles ?
Concrètement, la société française recherchera des emplacements aux abords des nœuds autoroutiers. Il peut s'agir d'aires de stationnement de covoiturage ou de parkings commerciaux. "Nous n'avons besoin que d'une faible empreinte au sol. Sur une place de parking, nous pouvons ranger six remorques", présente Arthur Darde.
Pour recharger les batteries, l'aménagement de la station prévoit une ombrière avec panneaux solaires (30 % des besoins énergétiques), complétée d'un simple branchement au réseau électrique. Celui d'un lampadaire fera l'affaire puisque le système ne requiert pas de très hautes puissances.
Un faible investissement de départ qui ouvre la voie à des collaborations. Arthur Darde fait allusion aux pétroliers qui aimeraient libérer les bornes rapides des voitures à long temps de recharge, dans les stations-service d'autoroute. Les concessionnaires automobiles aussi ont une carte à jouer. Jamais très loin des autoroutes et disposant de foncier, ils correspondent aux partenaires qu'imaginent les cadres de Far-a-Day.
D'autant que la remorque nécessite une intervention sur les voitures pour les conformer. Far-a-Day a développé une boule d'attelage technologique par laquelle passera l'énergie électrique. Un kit comprenant aussi des faisceaux. Ce qui demande des compétences techniques disponibles en concession. Il faudra compter 1 000 euros de facture pour le client final. "Certains distributeurs pourraient même équiper les voitures d'occasion avant la revente pour gagner en attrait", intervient Marie Laloy, qui est passée par Citroën et Aramisauto avant de rejoindre cette aventure industrielle.
Les clés de l'internationalisation
À l'usage, le client aura une application sur son smartphone. Elle lui permettra de réserver une remorque dans une station donnée, moyennant 15 euros environ. La requête pourra être faite plusieurs semaines en avance, laissant d'autant plus de marge de manœuvre à Far-a-Day qui gère la logistique.
Comme un loueur automobile, l'exploitant des remorques gèrera les flux à l'échelle du pays et orchestrera des mouvements saisonniers pour suivre la demande. Arthur Darde pourra faire appel à une autre société de sa connaissance, spécialisée en déplacement de véhicules. Certains le connaissent déjà comme le cofondateur et directeur technique d'Otoqi.
À plus longue échéance se posera forcément la question de l'internationalisation. Il ne s'agit pas d'abandonner les clients à la frontière. Arthur Darde en a conscience et pense que la réglementation évolue favorablement pour Far-a-Day. Il remercie notamment les acteurs du rétrofit électrique qui font tomber des barrières chez les constructeurs. "Nio vient de fermer sa seule station d'échange de batterie aux Pays-Bas. Ce modèle n'est pas viable", pointe le directeur général.
L'entreprise française qui produit ses remorques à Magny-Cours (58) jouera entre dépôt de brevets et standardisation. Ainsi, cela facilitera la diffusion de ce concept remis au goût du jour et des préoccupations des conducteurs de voitures électriques. "Le marché de masse ne sera pas sur le premium, mais sur les généralistes. Il y a donc tout intérêt à déployer une technologie qui fonctionne, destinée aux conducteurs les plus communs", insiste Marie Laloy, à l'heure de préparer la stratégie de recrutement des consommateurs.
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