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Leasing social : une promesse intenable à 100 euros par mois ?

Publié le 14 septembre 2023

Par Catherine Leroy
6 min de lecture
Le gouvernement n'a toujours pas défini les contours précis du dispositif du leasing social, promis par Emmanuel Macron. Pour les loueurs et les sociétés de financement qui seront les piliers de cette offre, le compte n'y est toujours pas. Le plafond des 100 euros par mois semble inatteignable et beaucoup d'interrogations restent sans réponse.
Leasing social
Comment l'État va-t-il soutenir les loueurs et les sociétés de financement pour qu'ils puissent rendre la mobilité électrique accessible aux foyers les plus modestes ? ©Blue planet studio pour adobe.stock

Le leasing social ? Ce sont les constructeurs qui en parlent le mieux. Dernière communication sur le sujet, celle de MG Motor qui décide de jouer les prolongations avec son offre à partir de 99 euros par mois avec un apport ramené à 0 euro grâce au bonus écologique et à la prime à la conversion, sur la MG 4 et 5. La marque poursuit sa promotion lancée en juin 2023 jusqu'à la fin de l'année. Il est vrai que le succès est au rendez-vous puisque près de 600 Français en ont bénéficié pendant les deux mois d'été.

 

De quoi sans doute agacer le gouvernement qui de son côté n'a toujours pas finalisé son offre. Cette promesse de campagne d'Emmanuel Macron, lancée avec enthousiasme au printemps 2022, en réalité patauge toujours, dix-huit mois plus tard. Le gouvernement, qui souhaite atteindre 100 000 dossiers en année pleine pour un budget de 50 millions, se heurte aux réalités du marché.

 

A lire aussi : Les propositions de T&E pour tenir la promesse du leasing social

 

"Beaucoup d'interrogations subsistent", explique un professionnel "et pour l'instant, aucune autre réunion n'a été fixée avec la direction générale de l'énergie et du Climat avec laquelle nous sommes en discussion." Pourtant, les contours de cette offre de financement auraient déjà dû être rendus publics, tout comme les voitures éligibles.

 

Un chiffrage plus qu'incertain

 

Selon les derniers échanges avec les professionnels, l'aide gouvernementale ne sera accordée qu'aux personnes physiques dont le revenu fiscal de référence est inférieur ou égal à 14 089 euros. Une limite qui leur permet déjà de bénéficier du bonus le plus élevé de 7 000 euros pour l'achat d'un véhicule électrique. Selon Les Echos, ce bonus dédié aux ménages les plus modestes pourrait être revalorisé à hauteur de 8 000 euros. Il faut attendre la présentation du projet de loi de finances 2024, vers la fin du mois de septembre, pour connaître le détail des bonus automobiles, nouvelle version.

 

De la même manière, le gouvernement doit également préciser le tarif maximal de la voiture à l'achat et donc la liste des modèles éligibles. Si l'on considère la limite de 25 000 euros, seules la Renault Twingo électrique dont la fin de la production est programmée au premier semestre 2024 et sans doute la future Citroën ë-C3, qui arrivera sur le marché au même moment, pourront en bénéficier. Et encore ! Tout dépendra du tarif qui sera négocié avec les constructeurs. Exit la Dacia Spring assemblée en Chine, exclue du futur bonus automobile basé sur un score environnemental et dans un premier temps, la R5 électrique ne sera commercialisée qu'à l'automne 2024. La liste des modèles semble pour le moins maigre !

 

"L'ambition sur la tarification pour adhérer au dispositif du leasing social est importante. Les loueurs devront proposer au moins un modèle avec le couple habituel de la durée et du kilométrage pour un montant de loyer de 100 euros par mois maximum. C'est le fondement de base. Mais aujourd'hui nous n’avons pas la capacité de le faire car nous n'avons ni la liste des véhicules éligibles, ni les prix d’achat", fait remarquer Sarah Roussel, directrice générale d'Arval en France.

 

"On nous demande de chiffrer des financements avec des voitures dont on ne connaît même pas les prix au catalogue" déplore ce professionnel qui craint d'ailleurs que les constructeurs ne favorisent leurs captives de financement au détriment de la concurrence. "L’État devrait négocier ces prix avec les constructeurs mais visiblement le gouvernement ne semble pas vouloir le faire. Or, comme il s'agit d'un dispositif sponsorisé par le gouvernement, il faut une équité de traitement."

 

En parallèle, l’État va proposer une garantie des loyers impayés. Mais pour ce représentant d'une société de financement, là encore, le compte n'y est pas : "Nous n'avons aucune réponse sur la manière dont va fonctionner cette garantie."

 

L'État doit remettre au pot

 

De plus, même en considérant ce plafond de prix de 25 000 euros, atteindre cette mensualité semble hors de portée. L’État devrait être obligé de remettre au pot, notamment pour prendre en charge le premier loyer, toujours plus élevé. Certains évoquent une aide supplémentaire de 7 000 euros qui serait directement versée aux loueurs ou aux sociétés de financement.

 

"En considérant, le bonus maximal et la prime à la conversion, le reste à financer avec un véhicule de 25 000 euros reste quand même de 13 000 euros. Comment un ménage modeste peut-il financer cette somme ? Loueurs comme financeurs, nous ne parvenons pas à ce montant mensuel", déplore ce professionnel.

 

Dans un premier temps, seuls les loueurs longue durée étaient considérés comme interlocuteurs du gouvernement pour ce leasing social. Mais dans une dernière version de la charte de conventionnement entre l’État et les loueurs, la LOA est à nouveau intégrée au dispositif. Une nuance qui remet les sociétés de financement dans le jeu.

 

 

Et l'entretien et la borne ?

 

Autre difficulté qui vient s'ajouter à ce dossier plus que complexe : le loyer de 100 euros doit également inclure l'assurance emprunteur. Reste cependant d'autres frais, qui vont faire grimper l'addition pour les particuliers. L'entretien peut vite représenter un surcoût de 10 à 15 euros par mois. De même, pour garantir le paiement des frais de restitution à la fin du contrat, la mensualité sera augmentée de 15 euros par mois pour constituer un fonds pour une remise en état éventuelle du véhicule.

 

De plus, le leasing social ne considère que les véhicules électriques qui nécessitent l'installation de bornes de recharge. Un nouvel ajout à la facture ! Une borne classique, de 7,4 kW, coûte entre 750 et 1 500 euros et son installation nécessite un autre chèque qui peut varier entre 600 et 900 euros. Le leasing social à 100 euros va donc très rapidement revenir à au moins 150 euros par mois.

 

Enfin, que se passera-t-il à l'issue du contrat ? Les clients devront rendre obligatoirement la voiture dans le cas d'une LLD et poursuivre le financement s'ils peuvent lever l'option d'achat dans le cas d'une LOA.

 

"Tout est possible bien sûr et cela fait partie de notre ADN de concevoir des offres accessibles à tous nos clients", avance Sarah Roussel. "Mais dans le cas du leasing social, c'est juste une question de niveau de l’aide que l’État pourra apporter. Il faut un dispositif équilibré pour l'ensemble des opérateurs. Évidemment, il n'est pas question de faire des profits sur le leasing social mais nous ne pouvons pas non plus faire des offres à pertes. Or comment rendre ce dispositif opérationnel alors que les prix des véhicules électriques ont flambé et que les taux d'intérêt ont fortement augmenté depuis la promesse faite du Leasing social à 100 euros par mois ?"

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