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Industrie

Objectifs CO2, électrification, hydrogène : les véhicules utilitaires dans l'impasse

Publié le 16 juillet 2025

Par Catherine Leroy
4 min de lecture
Finalement, c’est le segment des véhicules utilitaires qui risque de mettre en péril les constructeurs automobiles. Entre des résultats décevants pour l’électrification et un abandon de l’hydrogène, Renault et Stellantis se retrouvent face à des défis majeurs, avec des pénalités à la clé et des incertitudes qui pèsent sur leurs usines et leurs filiales.
L'usine Stellantis d'Hordain dans le Nord.
Le segment des véhicules utilitaires risque de mettre en péril les constructeurs automobiles. L'usine Stellantis d'Hordain dans le Nord est notamment menacée. ©Stellantis

Pendant que les yeux étaient braqués sur les objectifs d’émissions de CO2 des voitures particulières, ce sont les véhicules utilitaires qui devraient plomber les constructeurs automobiles présents sur ce segment de marché.

 

Le profit warning lancé le 15 juillet 2025 par le directeur financier du groupe Renault, Duncan Minto, nommé directeur général par intérim du constructeur, en dit long sur le danger qui émerge. Certes, Renault avance une pression commerciale accrue et la baisse du marché des véhicules particuliers. Mais le constructeur met également en avant "la sous-performance des véhicules utilitaires dans un marché en forte récession".

 

 

Quelques jours plus tôt, c’était Jean-Philippe Imparato, directeur général de Stellantis, qui donnait l’alerte. En visite dans l’usine d'Hordain, dans le Nord, ce dernier n’hésitait pas à parler d’un drame à venir d’ici quelques mois, voire d’une menace de mort.

 

 

Et pour cause, le compte n’y est pas. Au bilan du premier semestre 2025, en France, seuls 8,3 % des utilitaires immatriculés étaient 100 % électriques. Sur le marché européen, le bilan n’est guère meilleur avec 8,7 % de modèles BEV, en comprenant les véhicules particuliers à TVA récupérables. Or, pour atteindre les objectifs d'émissions de CO2 fixés par la Commission européenne, le marché devrait être environ à 17 %.

 

Stellantis affiche 9 % de part de marché sur cette motorisation dans les ventes VU totales, ce qui place le constructeur sous la menace d’une pénalité de 2,629 milliards d’euros. Renault, de son côté, enregistre 8,8 % d'immatriculations d’électriques dans ses ventes totales de VU. Pas de quoi se réjouir non plus.

 

Plus d’espoir du côté de l’hydrogène

 

Le zéro émission dans l’utilitaire ne passera pas non plus par la voie de l’hydrogène. Stellantis vient d’anéantir tous les espoirs avec l’annonce, ce 16 juillet 2025, de l’abandon de son programme de développement de la technologie de la pile à combustible à hydrogène. Proposés à des tarifs prohibitifs (plus de 110 000 euros HT pour un E-Expert hydrogène), les modèles n’ont jamais trouvé leur clientèle, malgré l’intérêt environnemental.

 

 

"Le marché de l’hydrogène demeure un segment de niche, sans perspectives de rentabilité économique à moyen terme, justifie Jean-Philippe Imparato, directeur pour l’Europe élargie. Nous devons faire des choix clairs et responsables pour garantir notre compétitivité et répondre aux attentes de nos clients grâce à notre offre électrique et hybride tant pour les véhicules particuliers que pour les utilitaires légers."

 

Au début de cette année, Renault avait tapé sur le premier clou du cercueil de l’hydrogène à la française. Hyvia, sa filiale dédiée aux véhicules à hydrogène, était placée en liquidation en février 2025. Après 120 millions d’euros investis dans cette filiale détenue par le constructeur et le fabricant de piles à combustible Plug depuis 2021, neuf véhicules ont été commercialisés.

 

Un risque majeur pour les usines

 

L’aventure Hyvia laisse sur le carreau 120 salariés. Qu’en sera-t-il pour Symbio, la coentreprise entre Michelin et Stellantis ? C’est une autre affaire. L’entité dont les actionnaires sont Forvia, Michelin et Stellantis, à parts égales, emploie 650 salariés. Mais 80 % du volume d’affaires de Symbio étaient portés par Stellantis. Un coup dur pour Symbio, qui en décembre 2023, inaugurait en grande pompe sa gigafactory de piles à combustible.

 

L'entité avait bénéficié d'un investissement d'un milliard d'euros sur cinq ans, dont 600 millions de financements publics, français et européens.

 

Du côté de Stellantis, la pilule est amère. Surtout pour l'usine d'Hordain dans le Nord, qui accueille depuis début 2024 la production du trio Peugeot e-Expert Hydrogen, Citroën ë-Jumpy Hydrogen et Opel Vivaro-e Hydrogen. Le site devait commencer la production cet été de la seconde génération de ces modèles.

 

L'Europe prête à assouplir les règles sur les véhicules utilitaires

 

L'urgence est donc là pour les constructeurs automobiles. La direction générale pour l'action pour le climat (DG Clima) de la Commission européenne a lancé, le 8 juillet 2025, un appel à contributions dans le cadre de la révision du règlement établissant les normes d'émissions de CO2 pour les voitures et les véhicules utilitaires neufs.

 

Mais sans modifier l'objectif de réduire à zéro les émissions de CO2 pour 2035, l'assouplissement des normes ne sera sans doute pas suffisant.

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