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Distribution

Stellantis : les réseaux sonnent l'alerte !

Publié le 30 juin 2023

Par Catherine Leroy
6 min de lecture
La lassitude des réseaux de distribution du groupe Stellantis laisse la place désormais à la colère. Ces derniers, regroupés en association, en France, se fendent d'un courrier qui montre leur niveau d'exaspération. Quelques jours après celui des concessionnaires allemands.... La tension monte !
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Entre le retard de paiement des primes, le manque d'effectif, les dysfonctionnements liés à la logistique et au pricing, les réseaux de distribution du groupe Stellantis, regroupés en association, expriment leur mécontentement dans un courrier envoyé à Christophe Musy, Carlos Tavares (photo) et Uwe Hochgeschurtz.

À couteaux tirés : les relations entre Stellantis et ses réseaux de distribution atteignent un réel niveau d'exaspération. Au point que les groupements de concessionnaires des marques du groupe Stellantis (Peugeot, Citroën, Opel, Fiat) se sont fendus d'un courrier d'alerte formelle sur les dysfonctionnements.

 

Contactée par Le Journal de l'Automobile, l'association des groupements de concessionnaires n'a pas voulu commenté cette information sur un domaine qui relève de la relation commerciale entre les réseaux et le constructeur. Celle-ci déplore que ce courrier soit paru dans la presse.

 

Si Christophe Musy, le nouveau directeur France de Stellantis est le destinataire principal, le courrier est également envoyé à Carlos Tavares, patron du groupe et Uwe Hochgeschurtz, directeur de Stellantis Europe.

 

Quelques jours plutôt, le 26 juin dernier, c'était le tour des concessionnaires allemands de s'adresser au constructeur dans une lettre pour dénoncer le "chaos" qui règne en interne.

 

"Ça craque de partout, nous résume ce professionnel. Et ce n'est même pas lié aux contrats d'agence. C'est purement opérationnel. En fait, il n'y a plus assez de personnel en interne chez le constructeur. Nous subissons les problèmes d'effectifs qui entraînent un véritable chaos par ricochet dans les réseaux."

 

De fait, plusieurs dysfonctionnements majeurs sont relatés dans ce courrier envoyé ce 30 juin 2023.

 

Retard dans le paiement des primes

 

Les professionnels attendent depuis parfois plus de 10 mois le paiement de primes. "Sur ce point, nous considérons que Stellantis a des pratiques contraires à la législation française", indique le courrier. "Nous vous réitérons nos demandes très simples : payer les arriérés, rendre le process robuste, payer les indemnités légales sur les paiements en retard. "

 

Dysfonctionnements dans la logistique

 

Depuis l'été 2022, Stellantis a modifié le système informatique lié à la logistique et la livraison des véhicules neufs et d'occasion, en pleine crise de la logistique en France. Une double peine que le constructeur n'a toujours pas réglée. Même si Peugeot assure que toutes les voitures "perdues" sont désormais retrouvées, les réseaux ne sont visiblement pas du même avis.

 

Un problème d'autant plus crucial que le portage de ces véhicules perd sa période de gratuité dès que ces derniers sont sur le parc de stockage... du constructeur. Mais depuis quelques semaines, les concessionnaires voient arriver un flux de voitures qui ne devraient être livrées qu'au second semestre 2023, alors que des clients attendent leur voiture depuis le début de l'année.

 

"Il est inconcevable qu’une entreprise de la taille et de la qualité de Stellantis ne sache plus ordonnancer les véhicules pour qu’ils soient produits et arrivent dans nos points de vente dans l’ordre des dates de livraisons convenues avec les clients, perde des véhicules pendant des mois et déclenche des transferts non autorisés depuis des parcs de stockage concessionnaires vers des concessions sans l’accord du concessionnaire concerné", indiquent les quatre présidents des groupements dans leur lettre.

 

A lire aussi : Peugeot condamné à une forte amende en Autriche ?

 

La livraison des pièces de rechange n'est pas mieux lotie : "Le taux de service APV/PR de Vesoul (70) reste très en deçà du nominal depuis des mois et concernant les PR pour les réseaux FCA, les flux logistiques fonctionnent depuis 2 ans en mode dégradé avec un taux de service extrêmement bas, de nombreux colis manquants ou perdus, occasionnant des pertes de production, une forte insatisfaction clients et donc une dégradation des NPS et du chiffre d’affaires."

 

Une situation similaire en Allemagne et qui pénalise essentiellement les distributeurs ex-FCA, comme l'expliquent nos confrères d'Autohaus.de. Ces derniers ne sont actuellement pas approvisionnés en pièces de rechange sous prétexte que leur ligne de crédit est épuisée, bien qu'il n'y ait pas de problèmes de crédit.

 

Cela est dû au fait que les anciens partenaires de FCA seront également connectés au système Distrigo des autres marques de Stellantis à partir de juillet 2023.

 

Des dysfonctionnements liés aux différents systèmes informatiques lancés par le constructeur depuis maintenant trois ans. "Depuis trois ans, il n’y a pas un lancement de nouveau système ou de nouvel outil qui se soit passé correctement (Customer First, Thor, Focus, Snapon, serveurs de téléchargement des soft pour les véhicules sous campagne de rappel, démarrage Leasys, accostage PCDO aux outils ex-FCA et inversement). Cette situation est totalement en contradiction avec les ambitions affichées de Stellantis de devenir une "tech company".

 

Dysfonctionnements liés au pricing

 

La baisse, voire la suppression des remises commerciales, notamment sur la clientèle du BtoB a largement impacté les carnets de commandes à professionnel. Ce que dénoncent également les réseaux. Un client loueur ou grands comptes ne revient pas chez Stellantis même si ce dernier a été obligé d'assouplir sa position.

 

Il n'y a plus assez de personnes. Tout le monde part. On touche le fond

 

"Les décisions relatives au pricing des produits Stellantis nous ont fait perdre énormément de clients, notamment en B2B, et nous mettrons collectivement des mois voire des années à remonter la pente. Nos concurrents sont à l’affût et prennent des parts de marché tous les jours. Comment dans ces conditions atteindre 45 % de part de marché en France pour Stellantis ?"

 

Ventes fictives et anticipées ?

 

"Les objectifs fixés sont devenus complètement virtuels. Nous ne pilotons plus une performance opérationnelle mais le verdissement de KPI’s internes du constructeur. Entre la définition des objectifs, la faiblesse des marges restantes et la structuration des politiques commerciales, vous obligez les réseaux tous les mois à déclarer fictivement des ventes qui n’en sont pas. Cela provoque une chaîne de conséquences (problème de comptabilité, problème de désorganisation de nos process, problème avec des clients qui reçoivent leur carte grise 3 mois avant leur véhicule, problème de règlement de la TVA, problème de sincérité de nos bilans etc). Nous estimons selon les marques de 3 à 7 semaines d’anticipations", pointent les groupements.

 

A lire aussi : Peugeot et Citroën, des immatriculations sur le dos du réseau ?

 

Des conséquences financières lourdes pour les réseaux

 

Résultats de ces crises successives : des trésoreries sous tension des stocks facturés par anticipation et donc une flambée des agios alors que les taux d'intérêt continuent de grimper et une rentabilité VN "injustement amputée".

 

Les groupements réclament ainsi l'arrêt de la pénalisation des réseaux pour des dysfonctionnements internes au constructeur. Sont notamment en jeux :

- la mise en place du mécanisme de compensation des frais de portage en cas de retard de transport

- le calcul des objectifs sur la réalité des véhicules livrés

- la mesure de l'ancienneté du stock à partir de sa date d'arrivée en concession

- adaptation des objectifs qualité et neutralisation des problèmes amont (clés non livrées...) sur les primes qualité

- mise en œuvre de réels moyens commerciaux, notamment sur la clientèle professionnelle

 

Les conséquences d'un manque d'effectif en interne

 

Pour les réseaux, en dehors des problèmes liés aux changements de systèmes informatiques internes, les sources majeures de ces problèmes viennent également d'un manque criant dans les effectifs du constructeur. "Il n'y a plus assez de personnes. Tout le monde part. On touche le fond", déplore ce professionnel.

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