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Distribution

Claude Willaert, Wondergroup : "Vendre 16 000 voitures d'occasion à particulier dans 5 ans"

Publié le 26 janvier 2022

Par Gredy Raffin
10 min de lecture
Avec Wondergroup, le groupe D'Ieteren joue la carte du multimarquisme. Cela vaut pour les services après-vente, mais surtout pour le commerce de véhicules d'occasion. Claude Willaert, directeur général, présente la stratégie de ce potentiel poids lourd européen.
Claude Willaert, directeur général de Wondergroup, la filiale de D'Ieteren.

Journal de l'Automobile. Vous avez levé le voile sur une nouvelle organisation baptisée Wondergroup. Quelle est la genèse de ce projet ?

Claude Willaert. Le groupe D'Ieteren a une empreinte forte dans le paysage belge. Pour estimer simplement son influence rappelons que nous affichons une pénétration de 23 % sur le marché du véhicule neuf avec les marques du groupe Volkswagen. Une part de marché qui a gagné un point depuis le début de la crise. De fait, nous souhaitions nous développer sur d'autres activités comme le véhicule d'occasion, la mécanique et la carrosserie. Wondergroup est une entité de mobilité multimarque qui concentre ces ambitions. D'Ieteren peut continuer de développer l'univers Volkswagen et Wondergroup ouvre l'entreprise sur toutes les autres gammes.

 

JA : Dans quel contexte, prenez-vous cette initiative ?

C.W. : Le marché connaît une baisse significative des ventes de véhicules neufs. Le marché belge est passé d'environ 550 000 immatriculations en 2020 environ à 380 000 en 2021. La conjugaison de la crise des semi-conducteurs et de la baisse de la demande des particuliers constitue évidemment la première cause de ce déclin. Nous estimons que le marché VN remontera à 460 000 unités en 2022, mais que les niveaux record ne seront plus jamais atteints. Dans le même temps, le marché du véhicule d'occasion est passé de 660 000 à 709 000 entre 2020 et 2021. Wondergroup n'est autre que notre réponse à cette tendance haussière. En plus, il faut admettre que le marché de l'occasion est bien plus stable et bien plus résiliant en période de crise, ce qui va dans le bon sens pour la pérennité de l'entreprise dans son ensemble.

 

JA : Il y a aussi le duo d'activités mécanique et carrosserie…

C.W. : En effet, il s'agit de Wonderservice pour la mécanique et Wondercar pour la carrosserie. Nous pourrions évoquer également Lab Box, notre département consacré aux nouvelles mobilités. Nous souhaitons déployer le plus vaste réseau de carrosseries multimarques du pays. En termes de contexte, là aussi nous constatons dans nos projections que le marché de la carrosserie va diminuer de 2 à 2,5 % par an durant la prochaine décennie. En cause, il y a la baisse de 7 % des déplacements et le renforcement du bagage technologique qui préserve des collisions. Cette baisse de volume sera en revanche partiellement compensée par l'augmentation du coût des réparations, même si Wondercar entend faire la part belle au smart repair, c'est-à dire que 30 % des interventions doivent s'en remettre à de la réparation et non du remplacement.

 

JA : Verra-t-on un réseau Wondercar se déployer en France ?

C.W. : Notre ambition est pour le moment nationale, mais rien n'est exclu. Essayons d'abord d'atteindre 30 % de pénétration en Belgique.

 

"Nous sommes en train de finaliser la conception d'un site internet permettant à chacun de venir nous vendre un véhicule"

 

JA : Venons-en au VO. D'où partez-vous avec Wonderauto ?

C.W. : Cette dénomination se cachera derrière My Way, le label VO que nous avons créé il y a 20 ans dans les points de vente Volkswagen et qui équivaut à DasWeltAuto en France. Ce label s'ouvre maintenant à d'autres marques. Nous avons également My Way Pro pour le commerce de véhicules en BtoB, ainsi que My Way Buy, un canal de rachat à particulier et à entreprise afin d'alimenter nos parcs.

 

JA : Où vous sourcez-vous ?

C.W. : En premier lieu, auprès des concessions du groupe D'Ieteren qui effectuent des reprises sans pouvoir les recommercialiser sur place. Nous nous adressons par ailleurs aux constructeurs, aux loueurs courte durée, aux grandes flottes de leasing et captives et aux particuliers avec My Way Buy. À ce titre, nous sommes en train de finaliser la conception d'un site internet permettant à chacun de venir nous vendre un véhicule. Cette interface sert à donner une première estimation, puis chacun sera invité à passer en point de vente pour une contre-expertise de valorisation. Le paiement sera effectué dans les 3 jours qui suivent.

 

JA : Comment fonctionne My Way Pro ?

C.W. : My Way Pro repose sur quatre piliers. Il y a d'abord des outils d'intelligence artificielle qui nous permettent de suivre l'activité européenne et d'aider nos collaborateurs à prendre les bonnes décisions dans leurs actes de transaction. Nous nous appuyons ensuite sur une solution d'e-commerce. Il y a deux mois, nous avons donc racheté Autralis, une société de services informatiques automobiles dédiés au suivi des flux de véhicules et aux transactions, pour nous faire gagner du temps dans la conception d'une plateforme. Le troisième pilier soutient la logistique, du rachat à la prise de photos en passant par le reconditionnement. Toute notre façon de travailler est industrialisée pour réaliser des économies d'échelle. Le quatrième a trait aux ressources humaines. Nous avons déployé un réseau de professionnel à travers plusieurs pays pour être au plus proche des véhicules d'occasion à acheter. Nous avons des personnes en France, au Portugal et en Italie par exemple. Nous souhaitons recruter un acheteur pour les pays nordiques. Nous rachetons tout ce qui se vend en Belgique sans nous spécialiser dans une marque, nous recherchons simplement des prix qui conviennent à notre marché national.

 

"Nous souhaitons aussi diversifier notre offre en allant vers des produits qui ont 3 à 5 ans voire plus"

 

JA. : Le "bon prix" devient une notion floue. Quelle est votre analyse de l'évolution de la situation ?

C.W. : Il est clair que les augmentations de prix que nous observons depuis quelques mois sont réelles. La pénurie de véhicules neufs amène les clients à se tourner vers le véhicule d'occasion et donc à augmenter la demande. En plus, l'inflation générale impacte le pouvoir d'achat et change donc les règles de consommation. Les Belges révisent leurs prétentions à la baisse sur le VN ou orientent leur budget pour acheter un véhicule d'occasion. À ceci s'ajoute un facteur réglementaire puisque depuis le 1er janvier 2022, les véhicules répondant à la norme Euro 4 n'ont plus accès au cœur de Bruxelles. Le parc est donc forcé de se renouveler et cela augmente d'autant plus la pression sur les stocks et les attentes de production. Enfin, nos études nous laissent penser que 56 % des déplacements auront toujours lieu en voiture en 2030. La consommation ne redescendra pas de sitôt, mais je pense le marché va se stabiliser fin 2022 avec le retour des véhicules neufs.

 

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JA : Quelle est la meilleure approche à avoir pour vous dans cette situation ?

C.W. : Il faut bien suivre les flux de voitures d'occasion à l'échelle européenne. L'intelligence artificielle va clairement nous y aider. Nous pourrons anticiper les grands volumes comme les fins de contrat de leasing ou les retraits de véhicules des parcs de location courte durée. Nous souhaitons aussi diversifier notre offre en allant vers des produits qui ont 3 à 5 ans voire plus. Enfin, nous voulons miser davantage sur les modèles locatifs au prix le plus économique possible. Aux États-Unis, le marché a connu une inflation de 41 % et la location a été la réponse la plus appropriée. Il faut considérer cette évolution. Pour le moment, 4 véhicules sur 10 sont financés en Belgique et la location ne dépasse pas 10 %.

 

JA : Wondergroup est un écosystème. Comment le client va-t-il en profiter ?

C.W. : Nous ne souhaitons pas concurrencer la maison mère mais intervenir en parallèle. Les clients des véhicules neufs font entretenir leur voiture dans le réseau pendant les premières années, mais ensuite, en raison de la baisse de la valeur de leur bien, ils se tournent vers d'autres solutions pour des raisons de rapport qualité-prix. Wonderservice répond à ce besoin en étant 20 à 25 % moins cher. Il est donc légitime de proposer cette offre tout à fait avantageuse aux clients VO de My Way. Ils n'achètent donc pas simplement un véhicule, mais aussi un package pour les accompagner tout au long de leur cycle de détention.

 

JA : Votre écosystème ouvre-t-il la porte à des indépendants en recherche de structures ?

C.W. : Ce n'est pas exclu. Pour le moment, il s'agit de proposer le contrats Wonderservice à des affaires de notre groupe. En cas de refus d'adhésion, nous pourrions nous tourner vers des indépendants locaux pour couvrir un territoire jugé pertinent. La priorité ira aux garages les plus appréciés des clients et les plus sérieux.

 

"My Way Pro nous permettra d'écouler des surplus d'exemplaires pour ne pas saturer le marché"

 

JA : Le marché de l'occasion attire de grands groupes en Belgique à l'instar d'Aramis Group qui a repris Cardoen. Qu'en est-il d'une ouverture de My Way à des revendeurs de VO indépendants ?

C.W. : La réponse est identique. Il est important pour nous de conjuguer l'expérience en ligne avec un réseau physique. Aramis, comme Cazoo d'ailleurs, sont des acteurs digitaux à l'empreinte minimale. Il nous appartient donc de capitaliser sur notre couverture territoriale pour faire la différence. Les points de vente D'Ieteren auront toujours la priorité et le cas échéant, nous nous tournerons vers un partenaire tiers.

 

JA : Combien de points de vente My Way avez-vous en Belgique ?

C.W. : My Way possède 145 points de vente actuellement en Belgique répartis sur 23 plaques distinctes. Ceux-ci peuvent être totalement autonomes vis-à-vis des concessions locales.

 

JA : Pouvez-vous nous partager quelques chiffres sur My Way Pro ?

C.W. : L'activité a débuté en 2020. Nous souhaitions prouver aux investisseurs que le commerce à professionnel peut être profitable. My Way Pro a vendu 8 000 voitures en 2021 en Belgique et à des des sociétés de négoce européennes. L'activité à particulier va débuter dans quelques semaines. Elle prendra l'ascendant sur My May Pro dans une volonté d'accroître notre part de marché en Belgique et pour alimenter les ateliers Wonderservice et Wondercar afin de générer des revenus. L'ambition sera de réaliser annuellement 16 000 ventes de VO à particulier dans 5 ans pour 14 000 VO à professionnel.

 

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JA : Qu'allez-vous garder pour les professionnels ?

C.W. : Il y aura de tout, y compris des véhicules d'occasion récents. My Way Pro nous permettra d'écouler des surplus d'exemplaires afin de ne pas saturer le marché avec une offre pléthorique du même modèle. Nous revendrons aussi des véhicules de plus de 150 000 km ou 8 ans qui ne nous intéressent pas du fait du risque qu'ils représentent en garantie ou de leur incompatibilité avec les nouvelles règles de circulation, comme l'interdiction des modèles Euro 4 dans la capitale. Nous savons que la moindre modification dans la fiscalité d'un pays engendrera des possibilités d'exportation.

 

JA : L'essor du véhicule électrique aboutira-t-il à la création de My Way Electric ?

C.W. : Cela peut présenter un intérêt. Toujours est-il que nous n'avons pas encore assez de volumes pour différencier l'offre par rapport aux autres véhicules d'occasion. Il faudra donc un peu de temps. Toutefois, il faut savoir qu'à partir du 1er janvier 2026, toutes les voitures de société vendues en Belgique seront obligatoirement électriques. Nous nous attendons, par conséquent, à la création d'un nouveau flux plus important.

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