Benjamin Reillat, InterVO : "Les constructeurs font attention aux volumes de zéro kilomètre"
Le Journal de l'Automobile : En tant que groupe aux multiples activités dans le commerce de voitures d'occasion, quel bilan tirez-vous de l'année 2023 ?
Benjamin Reillat : Elle a été coupée en deux avec toujours l'approvisionnement comme sujet principal. Pour faire simple, nous sommes passés d'une situation où nous recevions des offres de voitures d'occasion, mais à des prix totalement décalés. Si nous avons une marge de manœuvre sur le marché du BtoC, nous sommes plus limités en BtoB. C'est toute la problématique. Nous ne pouvions donc pas accepter cette hausse des prix.
J.A. : Et ensuite, que s'est-il passé ?
B.R. : Durant la seconde moitié de 2023, il a fallu se montrer en capacité de saisir les opportunités. Nous avons pu signer de belles affaires, notamment auprès des constructeurs qui avaient des volumes bien plus abondants. Alors, autant le premier semestre a été compliqué, autant le second a été exceptionnel. Le groupe a pratiquement réalisé ses chiffres de 2019.
Quand une entreprise doit déstocker pour assainir son parc, elle use de tous les moyens
J.A. : Justement, quelle perception avez-vous de la situation des constructeurs ?
B.R. : Les volumes sont repartis à la hausse et il y a un retour à la normale chez Stellantis, Renault ou encore Nissan. Fort heureusement, nous avions procédé à un déstockage avant l'été et nous avons pu répondre présent quand les offres ont commencé à fleurir chez chacun. J'observe que les constructeurs ont le même enjeu que nous, celui de devoir afficher une rotation rapide en raison des problématiques de portage de stock. Actuellement, les frais financiers mensuels pour un véhicule s'élèvent en moyenne à près de 150 euros.
J.A. : Ce retour à la normale s'applique-t-il aussi à la politique tarifaire ?
B.R. : De mon point de vue, les constructeurs font attention aux volumes de 0 km. Les tarifs de départ sont globalement 25 % en-dessous des prix du neuf. Mais le jeu des enchères sur les plateformes gomme un peu cette différence. En ce qui concerne les voitures d'occasion récentes, les tarifs se situent environ 35 % en-dessous de ceux du catalogue.
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J.A. : Il se dit que des flux de voitures importées perturbent le marché. Qu'en-est-il ?
B.R. : Quand une entreprise doit déstocker pour assainir son parc, elle use de tous les moyens. Cela reste le jeu traditionnel du secteur. Les constructeurs ne sont pas à incriminer. Nous aussi, chez InterVO, nous avons profité de listes diffusées depuis l'étranger.
J.A. : L'horizon semble se dégager, mais dans la tempête, il y a eu de la casse chez les professionnels de la vente de voitures d'occasion…
B.R. : C'est vrai. Nous le déplorons. Nous-mêmes avons été en quelque sorte sauvés par les résultats du second semestre. Mais, malheureusement, d'autres ont nettement réduit la voilure, voire ont cessé leur activité. Il fallait de la trésorerie, de l'expérience et des relations étroites avec les banquiers pour gagner du temps. L'un de nos confrères a vu ses accès à son constructeur de référence se refermer et, aujourd'hui, il est en crise. Les plateformes de remarketing ont également rencontré des difficultés à ma connaissance, en 2023. À l'inverse, tout porte à croire que les enchéristes continuent de tirer leur épingle du jeu.
J.A. : Autre sujet clé, celui de la transition énergétique. 2023 a-t-elle été l'année de l'électrification ?
B.R. : Nous ne ressentons pas encore de bascule. Les gros rouleurs cherchent encore des voitures d'occasion diesel. Toutefois, je peux dire que les prix ont été plus acceptables récemment sur les voitures électriques.
J.A. : Quelle est votre stratégie ?
B.R. : Nous avons cherché des sources d'approvisionnement, évidemment. Cela a conduit le groupe à nouer des liens avec Link&co. Nous revendons leurs voitures d'occasion récentes et avons de bons scores auprès des clients particuliers. Nous avons alors étudié d'autres marques pour avoir un schéma similaire. La gestion du service après-vente demeurant un problème, notamment pour les pièces ou la disponibilité à l'atelier, nous préférons temporiser.
J.A. : Quelles sont vos projections pour 2024 ?
B.R. : Ce sera l'année du rebond. MG Motor, BYD, Link&Co et les autres vont dynamiser le marché, aussi bien en neuf qu'en occasion. Et il y a un autre enjeu dont on parle peu. Entre la tenue de l'Euro de football en Allemagne et des Jeux Olympiques en France, il va y avoir une forte production de voitures de location courte durée. Les plateformes de remarketing doivent se préparer à écouler tous ces stocks après les événements. Ce qui va amplifier le phénomène de rajeunissement de l'âge des VO revendus à client final, selon moi.
La location automobile va constituer un axe prioritaire pour nous en 2024
J.A. : Lors de votre dernière prise de parole dans nos colonnes, vous annonciez la création d'un label AutoMalin à déployer chez des revendeurs tiers. Où en êtes-vous ?
B.R. : Nous avons rencontré des partenaires potentiels. Nous nous attendons à signer des accords de déploiement après avoir mené des tests concluants pour ce système de dépôt-vente de voitures d'occasion. Toujours est-il que nous accuserons du retard, car beaucoup d'agents de marque veulent patienter. AutoMalin doit être une solution quand leurs contrats les liant aux constructeurs seront dénoncés. Or, la date d'adoption des nouvelles dispositions ne cesse d'être repoussée.
J.A. : Qu'ont montré les premiers tests ?
B.R. : Le système de dépôt-vente chez nos partenaires affiche une meilleure rotation que dans nos propres boutiques AutoMalin. Elle est de 20 à 25 jours en moyenne dans les garages affiliés, contre 30 à 45 jours dans notre réseau. Nous avons aussi éprouvé le système de commissionnement qui semble les satisfaire. Ces tests ont, par ailleurs, permis d'éprouver Reprise Malin et sa rémunération forfaitaire. Tout nous pousse à mettre le label AutoMalin en avant en 2024.
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J.A. : Pousser AutoMalin, cela veut dire que vous mettez LocaMalin au ralenti ?
B.R. : Non, bien au contraire. Nous avons multiplié les ouvertures en 2023, dont récemment à la gare de Bordeaux-Saint-Jean (33), à l'aéroport de Beauvais (60), à Anglet ou bientôt à l'aéroport de Biarritz (64). La location automobile va constituer un axe prioritaire pour nous en 2024 avec la courte, la moyenne et la longue durée. Pour preuve, nous menons des tractations avec de gros acteurs pour donner une dimension nationale et internationale à LocaMalin.
J.A. : Des projets bien ambitieux, comment gérez-vous cette montée en charge dans le groupe ?
B.R. : C'est l'une des autres grandes annonces de ce début d'année. L'entreprise vient tout juste de mettre en place une nouvelle organisation et structurera les équipes en 2024. Nous voulons conforter les grands partenaires dans leur choix de nous faire confiance et créer au passage une marque employeur.
J.A. : Concrètement, comment cela s'organise ?
B.R. : En tant que président-directeur général, je suis désormais épaulé par quatre directeurs. Vincent Martel prend la direction des opérations, en plus de la gestion de l'agence de Bordeaux. Vincent Kondratiuk est devenu directeur du développement d'AutoMalin, en plus de gérer l'agence de Beauvais. Wilfried Druet prend les manettes de la filiale LocaMalin, tandis que Matthieu Serreau dirigera la cellule des achats du groupe, tout en gardant la responsabilité de l'agence de Mantes-la-Jolie (78). À noter enfin que Romain Cernik a été nommé responsable marketing et communication digitale.
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Bonjour
Je suis abonné et je ne peux pas lire l’article sur Inter VO, on me demande mes codes que je rentre et ca ne fonctionne pas, merci de me contacter.
cordialement
Benjamin Roland
TPN