Un procès pour corruption contre Carlos Ghosn et Rachida Dati
La ministre de la Culture et l’ancien PDG de Renault-Nissan pourraient se retrouver devant un tribunal. En effet, le Parquet national financier (PNF) a demandé, le 15 novembre 2024, à ce que Rachida Dati et Carlos Ghosn soient jugés pour corruption, trafic d’influence, abus de pouvoir et de confiance.
D’après le PNF, 900 000 euros auraient été versés à Rachida Dati sous forme d’honoraire entre 2010 et 2012 pour un contrat de conseils juridiques au bénéfice de RNBV, la structure chapeautant l'alliance Renault-Nissan. La ministre est soupçonnée d'avoir perçu, "en toute confidentialité, voire en toute opacité", cette somme pour des prestations largement inexistantes, alors qu'elle était avocate et députée européenne de 2009 à 2019. Selon le ministère public, dans ses réquisitions, l’ancienne députée européenne aurait aussi usé de son influence au Parlement européen pour des décisions en faveur de Renault et de son patron.
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Le dossier est ouvert depuis 2019 et la teneur de ce procès revient aux juges d’instruction. Les 134 pages de réquisition ont pu être consultées par l’AFP, Le Monde et Le Parisien. Selon les médias, Jean-François Bohner, procureur de la République, ainsi que deux magistrats financiers saisis ont signé le document.
Pas de preuves tangibles pour Rachida Dati
Dans le document, les trois magistrats soulignent que "les nombreuses investigations" réalisées "n'ont permis d'identifier que très peu de preuves de l'existence et de la réalité des prestations réalisées par Rachida Dati" en termes de conseils juridiques. Et ce, "qu'il s'agisse de preuves matérielles (comptes rendus, mails, notes) ou testimoniales (auditions, attestations)". "Les seuls éléments au soutien d'un travail effectif de Rachida Dati sont essentiellement testimoniaux et émanent de personnes qui, visées par l'information, avaient intérêt à confirmer la réalité du travail réalisé par celle-ci", glisse le PNF dans ses réquisitions.
Pour l'accusation, Rachida Dati exerçait en réalité une activité de lobbying pour le groupe, au prix d'un "contournement" et d'une "violation" du Code électoral, et de "conflits d'intérêts évidents avec son mandat parlementaire" européen. Les magistrats financiers considèrent en effet que l'ex-garde des Sceaux de Nicolas Sarkozy a bien effectué, "en contrepartie des paiements" issus de la convention, des prestations, mais illégales cette fois : elle aurait "conseillé le groupe Renault dans la promotion de ses droits et intérêts auprès du Parlement européen", y aurait "pris des positions favorables" au constructeur et "usé de son influence réelle ou supposée pour mener des actions de lobbying".
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Le PNF souligne l'intérêt pour Carlos Ghosn de recruter "une personnalité politique de premier plan comme l'était Rachida Dati à l'époque des faits", personnalité qui, d'après le ministère public, n'avait "jamais informé le Parlement européen des activités privées lucratives" avec la marque au losange. Finalement, le contrat de conseils juridiques "était l'habillage juridique d'un pacte corruptif patent", tranche le PNF.
Un "réquisitoire infamant" selon Rachida Dati
Rachida Dati a qualifié ce réquisitoire d'"infamant" et de "choquant à plus d'un titre" dans un communiqué paru le vendredi 15 novembre 2024. Elle dénonce notamment une "instrumentalisation de cette affaire par ses opposants politiques". "Ce réquisitoire intervient à contre-courant de tous les éléments que nous avons apportés : témoignages, pièces, documents…" et qui attestent de "l'innocence" de la ministre selon ses avocats, maîtres Olivier Baratelli et Olivier Pardo.
Carlos Ghosn, toujours réfugié au Liban depuis fin 2019, se trouve visé depuis avril 2023 par un mandat d'arrêt international. Ses avocats, Me Jacqueline Laffont-Haïk, Chloé Fonteix, Martin Reynaud et Léon Del Forno, ont indiqué à l'AFP que leur client "conteste la régularité du mandat d'arrêt sur la base de laquelle le parquet sollicite son renvoi, car il constitue en l'état de cette situation un détournement de procédure. Enfin, il rappelle son impossibilité d'avoir accès aux éléments du dossier et de participer à l'instruction, en violation flagrante des droits de la défense", ont-ils ajouté.
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Sans succès, Rachida Dati et Carlos Ghosn ont multiplié les recours pour une reconnaissance de la prescription des faits. Toutefois, le parquet reconnaît le "contentieux abondant" sur le sujet, mais rappelle sa position selon laquelle ces infractions étaient occultes ou dissimulées, ce qui permet de reporter le début du délai de prescription. (Avec AFP)
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