L'Occident automobile va se faire détrôner d'ici 2040
Face au développement de l'industrie automobile chinoise, tout ne semble pas perdu. C'est du moins les conclusions de la nouvelle édition du rapport Automotive Outlook édité par le cabinet Roland Berger. Mais cela demandera d'importants investissements étrangers.
L'étude souligne un facteur clé, à savoir le déplacement régional des marchés : le déplacement du volume de ventes d'automobiles dans le monde. Les ventes augmenteront considérablement hors de l'Europe, de l'Amérique du Nord, du Japon et de la Corée du Sud et en Chine pour représenter environ 60 % du marché mondial en 2040. En parallèle, les marchés occidentaux ont déjà atteint leur "pic automobile" en termes de ventes de véhicules neufs.
Cependant, en dehors de la Chine, les marchés occidentaux restent un pilier crucial pour l'industrie. Les ventes mondiales de véhicules neufs devraient croître d'environ 1,1 % par an d'ici à 2040.
Pic automobile à l'ouest
Dans le détail, la polarisation des marchés est particulièrement évidente dans les ventes de véhicules neufs. Les marchés occidentaux d’Europe, des États-Unis et du Canada ont atteint, et dans certains cas dépassé, leur "pic automobile" en termes de ventes de véhicules neufs.
Par conséquent, ces marchés devraient stagner ou légèrement décliner. Toutefois, en raison de leur taille, ils continuent d'offrir un potentiel de croissance significatif, estimé par les experts de Roland Berger à environ 520 milliards d'euros d'ici 2040.
Il n'y a pas que la Chine en progression
À l’inverse, la Chine (+1,2 % par an), l’Inde (+4,2 % par an), l’Amérique latine (+2,4 % par an) et d’autres pays émergents enregistreront une forte augmentation des nouvelles immatriculations. En chiffres absolus, la croissance des revenus sera la plus importante en Chine, atteignant environ 590 milliards d’euros.
Les marchés hors Europe, Amérique du Nord, Japon et Corée du Sud devraient croître de près de 480 milliards d’euros. Pourtant, leur part de marché totale ne passerait que de 14 % à 20 % en 2040. Globalement, entre 2025 et 2040, les volumes de ventes mondiales augmenteront en moyenne de 1,1 % par an (contre 2,4 % par an entre 2010 et 2019).
La montée irréversible des véhicules électriques
À l’inverse, la tendance vers les véhicules électriques est irréversible, malgré une certaine réticence des consommateurs dans certains marchés. Le nombre de véhicules électriques à batterie (BEV) augmente rapidement dans le monde et Roland Berger prévoit qu'ils représenteront entre 64 % et 71 % des ventes de véhicules neufs en 2040, selon les scénarios envisagés. Environ 20 % supplémentaires seront des hybrides, tandis que l’hydrogène et les carburants de synthèse joueront un rôle mineur en raison de leur faible efficacité et de leur coût élevé.
L’électrification progresse à des rythmes différents selon les régions. En Europe, on prévoit une électrification complète dans une dizaine d’années, si l’Union européenne maintient sa réglementation actuelle. Les BEV représenteront alors 99 % des nouvelles immatriculations. En Chine, où les BEV ont dépassé la barre des 50 % en juillet 2024, leur part atteindra entre 70 % et 85 % d’ici 2040. Aux États-Unis, la fourchette sera de 42 % à 60 %, et dans le reste du monde, environ 50 %.
"L’électrification bouleverse les équilibres de l’industrie, et pas seulement parce que tout le monde devient plus dépendant de la Chine pour les matières premières", explique Jan-Philipp Hasenberg, associé chez Roland Berger.
Des changements radicaux
Concernant la montée en puissance de la Chine, le rapport Automotive Outlook 2040 décrit des changements tectoniques dans l'industrie automobile, marqués par une montée en puissance des acteurs chinois. Ces bouleversements mettent les entreprises établies, notamment en Occident, sous pression. Toutefois, deux scénarios pour 2040 sont envisagés dans l'étude :
Le premier, pessimiste pour l'Occident, envisage une croissance rapide des constructeurs chinois sur tous les marchés mondiaux, représentant plus de la moitié de la croissance prévue d'ici 2040. Ils atteindraient une part de marché de 70 à 75 % en Chine, 15 à 20 % en Europe et 5 à 10 % en Amérique du Nord. En parallèle, les constructeurs occidentaux subiraient des stagnations ou des baisses des volumes de ventes, des pressions croissantes sur les coûts et un besoin urgent de restructuration.
"Dans ce scénario pessimiste, l'industrie pourrait atteindre un point de basculement d'ici 2040, date à laquelle les constructeurs chinois auraient remporté la course", explique Jan-Philipp Hasenberg.
L'Europe n'est pas perdue
Le second, plus optimiste, suppose que les constructeurs occidentaux captureraient 36 % des opportunités de croissance d'ici 2040, tandis que les constructeurs chinois conserveraient 65 % de leur marché domestique, mais ne représenteraient que 5 à 10 % du marché européen et moins de 5 % du marché nord-américain. Ce scénario repose sur la capacité des acteurs occidentaux à investir massivement dans la technologie, à tirer parti de leur image de marque et de leurs solides réseaux de production et de distribution.
"Les constructeurs occidentaux peuvent encore redevenir compétitifs s’ils adoptent des changements radicaux, notamment en standardisant davantage leurs matériels et plateformes logicielles grâce à des tiers", précise Jan-Philipp Hasenberg. Cela créerait un nouvel équilibre des forces à l’échelle mondiale d’ici 2040, offrant à tous les acteurs des opportunités de croissance.
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