Les constructeurs se lancent dans le véhicule de loisirs
Le salon du véhicule de loisirs a fermé ses portes il y a un mois. Si les organisateurs communiquent seulement sur le nombre de visiteurs, à savoir 94 000 (+4,5 %) et non pas sur les volumes de vente, de l’aveu des observateurs, l’événement a été un bon cru.
"Le salon représente en moyenne 10 % des ventes annuelles de véhicules de loisirs", présente Pierre Rousseau, président d’UNI VDL, organisateur du salon de Villepinte (93) et président du constructeur Rapido. "Cela reste une moyenne, glisse un fin connaisseur du marché. Pour certaines marques, cela passe même à 30 %."
En France, lors de la dernière saison, qui dans le monde du véhicule de loisirs se déroule du mois de septembre à celui d’août de l’année suivante, il s’est vendu au total 23 969 VDL neufs (‑4,3 %) et 68 283 d’occasion (‑0,6 %). "Ces légères baisses sont dues à des problèmes de disponibilité, explique Pierre Rousseau. D’une manière générale, le marché est aujourd’hui porté par les vans et les fourgons aménagés. Ils représentent 60 % et les vans couvrent à eux seuls environ 40 %." De son côté, le camping‑car traditionnel, à carrosserie profilée ou à capucine, ainsi que les intégraux affichent 40 % de pénétration.
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Citroën à son tour
C’est pourquoi les constructeurs s’intéressent de plus en plus aux vans. Le dernier en date est Citroën. La marque aux chevrons a présenté, au salon de Villepinte (93), le concept car Type Holidays qui repose sur la base d’un Spacetourer.
Cet hommage au fameux Type H d’après‑guerre, surnommé le Tube, se démarque de la concurrence avec cette carrosserie originale conçue par le carrossier italien Caselani. Disponible dès janvier 2024, Citroën compte en vendre 2 200 par an à partir de 2025, principalement en Allemagne et en France, ces deux pays représentant 75 % du marché.
Bien entendu, Citroën n’a pas été le premier à se lancer dans le véhicule de loisirs. On pense tout naturellement à Volkswagen qui reste aujourd’hui, avec le California, le leader incontesté de ce segment qui s’approche des 1 900 immatriculations, soit à lui seul près de 10 % de part de marché du van. Très loin derrière, se trouve le Mercedes Marco Polo qui joue des coudes avec le Ford Nugget. "En 2021, nous avons connu une excellente première année avec plus de 860 commandes", précise d’ailleurs Ford.
Malheureusement, l’année 2022 a été beaucoup plus compliquée car le constructeur n’a vendu que 330 Nugget. "Il a été victime des difficultés d’approvisionnement, justifie le constructeur. Le marché étant très saisonnier, il convient de pouvoir proposer un stock prêt à partir au printemps. L’absence de stock pénalise toute l’année commerciale." Enfin, avant‑dernier entrant, Renault qui a lancé, lors de l’édition 2021 du salon de Düsseldorf, la grand‑messe du véhicule de loisirs, le SpaceNomad sur la base du Trafic.
Une consommation post-Covid
Plusieurs raisons expliquent cet engouement des constructeurs. "Après le Covid, les gens ont été à la recherche de liberté", indique Pierre Rousseau. D’autant plus qu’une très habile et à‑propos campagne de communication a frappé les esprits. "Cela nous a permis de toucher de nouveaux clients qui n’avaient jamais eu l’idée de voyager en camping‑car", poursuit‑il.
Néanmoins, malgré le succès incontesté de ce mode de vacances, certains observent un très léger essoufflement. "L’engouement pour le van a à peine cinq ans, tempère Pierre Rousseau. Il faudra attendre la rotation des premiers clients pour voir si c’est une tendance pérenne."
Une belle marge
Reste que pour les concessionnaires qui se sont lancés sur ce marché, les résultats sont très prometteurs. À une seule condition. "Celle d’avoir une équipe compétente en place, qui croit au produit, indique Philippe Dugardin, président du groupe éponyme situé à Lille (59), qui figure parmi les meilleurs distributeurs du Ford Nugget en France. Nous en avons commercialisé une soixantaine et nous aurions pu en vendre beaucoup plus, si nous avions eu les produits disponibles."
Pour arriver à un tel résultat, le distributeur a confié la commercialisation à l’un de ses collaborateurs qui lui‑même pratique ce loisir. "C’est une condition sine qua non pour que l’activité fonctionne, précise Philippe Dugardin. Ce type de véhicules ne se vend pas comme une voiture classique. Il correspond à des usages bien particuliers."
C’est également un vecteur de marge très important. "Nous sommes sur des rentabilités par véhicule dignes de marques haut de gamme ; on flirte avec les 10 000 euros", lâche sous couvert d’anonymat un autre distributeur.
C’est donc une belle activité mais il y a un revers à la médaille à ne pas négliger pour éviter de mécontenter les clients. "Le SAV est, en effet, plus délicat, tempère ce même distributeur. Si nous savons intervenir sans problème sur la partie porteur du véhicule, c’est un peu plus compliqué sur la partie aménagement car nous n’avons pas forcément les compétences en interne." Les problèmes rencontrés par les concessionnaires sont généralement électriques ou électroniques dans la partie vie à bord. "Dans ce cas, nous sommes en relation avec l’aménageur pour réaliser la réparation", poursuit‑il.
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Ce sont sur la connaissance du produit et l’après‑vente que les concessionnaires de véhicules de loisirs mettent en avant leurs compétences et leur différence, voyant d’un mauvais œil cette nouvelle concurrence. Une concurrence d’ailleurs qui n’est pas unique.
Face à l’engouement pour les vans, une multitude d’acteurs aménageurs distribuent eux‑mêmes leurs produits. C’est par exemple le cas de Cédric Mudler, concessionnaire Citroën et Fiat à Thionville (57). Il commercialise, en effet, sa propre marque de vans, appelée Move In Van, des produits aménagés par un prestataire. "Nous prenons un Jumpy d’occasion et nous le transformons en VDL avec un couchage et une kitchenette", nous expliquait‑il lorsque nous l’avions rencontré au printemps dernier.
Les constructeurs de véhicules de loisirs ne sont pas non plus très heureux de cette concurrence, même s’ils ont un double discours, étant eux‑mêmes prestataires pour les constructeurs.
C’est, par exemple, le cas de Westfalia, société détenue par le français Rapido qui a aménagé des Volkswagen California, les Mercedes‑Benz Marco Polo et les Ford Nugget, tandis que Pilote, un autre acteur français, habille le Renault SpaceNomad.
Quant au Citroën Holidays, le constructeur s’est tourné vers le slovène Bravia Mobil. Mais si le marché continue sa progression, étant passé en 2013‑2014 de 16 222 véhicules à 23 696 en 2022‑2023 avec un pic en 2020‑2021 à 30 049, il semble qu’il y ait de la place pour tout le monde.
Le marché du véhicule de loisirs en quelques chiffres
Ventes de véhicules de loisirs (saison 2022‑2023 en France)*
- Camping‑cars neufs : 23 696 nités (‑ 4,3 %)
- Camping‑cars d’occasion : 68 283 unités (‑ 0,6 %) Part de marché des vans et fourgons aménagés : 58 % (13 816 unités ; ‑ 1,8 %)
* Dans le milieu du camping‑car, les volumes sont comptés par saison qui court de septembre à août de l’année suivante.
Année 2023 (janvier–août 2023)
- Camping‑cars neufs : 17 597 unités (‑ 4,9 %)
- Camping‑cars d’occasion : 46 756 unités (+ 4,3 %)
Part de marché des vans et fourgons aménagés : 58 % (10 225 unités ; ‑ 2,3 %)
Parc de camping‑cars en France : 600 000 unités
(source : UNI VDL)
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