Le plan de Valeo pour retrouver la croissance

Dans un contexte morose pour l’automobile, Valeo garde son optimisme. "Nous ne partageons pas le pessimisme ambiant de l’industrie automobile et nous croyons en l'avenir de la voiture même si nous sommes conscients de sa transformation technologique et géographique profonde", précise le directeur général de Valeo, Christophe Perillat. À l’occasion de son Capital Markets Day 2025, l’équipementier français a dévoilé sa trajectoire jusqu’en 2028. D'ici à cette date, le groupe ambitionne d’atteindre un chiffre d’affaires de 22 à 24 milliards d’euros, une marge opérationnelle de 6 à 7 % et un cash flow après frais financiers nets de 500 millions d’euros.
Le plan précédent, Move Up, initié par le groupe en 2022, a dû faire face à un environnement instable, notamment impacté par la montée en puissance des constructeurs et des équipementiers chinois et par un décollage des véhicules électriques plus faible qu’anticipé. "Malgré tous ces vents contraires, nous avons tenu bon. Notre marge n'a cessé d'augmenter, jusqu’à tripler en valeur sur la période 2022-2025. D’autre part, notre free cash flow a doublé sur la période et nous avons été en capacité de prendre plusieurs commandes qui permettent d’ancrer le retour de la croissance dans notre futur plan Elevate 2028", se réjouit Christophe Perillat.
L’importance de la rentabilité
Le groupe affirme qu’avec ce plan Move Up 2025, il a renforcé sa position technologique dans l’électrique, sa présence géographique et sa performance financière. "Le plan Elevate 2028, nous le percevons comme trois moteurs qui s’allument, pas simultanément, mais qui parviendront à renforcer la solidité financière de Valeo", métaphorise le directeur général.
La rentabilité représente le premier moteur du plan Elevate. Le travail sur ce sujet a démarré en 2022. Pour son plan 2028, le groupe s’engage à réaliser une croissance régulière de ses bénéfices. Selon Valeo, la marge brute devrait rester supérieure à 19 % du chiffre d’affaires. Afin d’y parvenir, le groupe mise sur la performance industrielle permise par l’exploitation de l’IA et de la robotique dans les usines.
L’investissement total dans ces technologies devrait atteindre 400 millions d’euros, mais permettre 300 millions d’euros d’économies annualisées à partir de 2026 par rapport à 2023. Le groupe prévoit ainsi une marge opérationnelle entre 4,5 % et 5,5 % en 2025 et vise 6 à 7 % en 2028.
Plus de cash avec moins de Capex
Le deuxième moteur évoqué par Christophe Perillat réside dans le cash flow avant frais financiers. En 2025, Valeo estime qu’il atteindra 700 millions d’euros. "Quand vous regardez l’histoire de Valeo ces 15 dernières années, c’est simple : nous n'avons jamais autant généré de free cash flow par nos opérations. Le plus fort que nous ayons fait, c’était en 2016 avec 661 millions d’euros", s’enthousiasme le dirigeant.
Pour y parvenir, le groupe a changé son business model dans l’objectif de générer davantage de cash. "Ce business model, nous pouvons le résumer ainsi : plus de profit, plus d’Ebitda et moins de Capex", souligne le directeur général. Dans le plan précédent, les Capex industriels se situaient entre 5 et 5,5 %. Désormais, le groupe prévoit un modèle à 4,5-5 %. "Nous serons moins consommateurs de Capex industriels parce que le coût des lignes de production baisse et que nous achetons moins. Nous avons plus de standardisation et de réutilisation", justifie Christophe Périllat.
Moins de R&D au profit de l’IA
Dans une période charnière dans le cadre de la mutation vers l'électrique, Valeo compte stabiliser ses investissements en R&D. En quinze ans, ces coûts n’ont cessé d’augmenter, au point que, sur les dix dernières années, ils ont progressé deux fois plus vite que les ventes. "Il y a eu un pic au premier semestre 2024, mais depuis 2025, il y a un reflux", constate Christophe Périllat. En 2025, la R&D brute sera de 200 millions d’euros et ne devrait pas augmenter d'après lui. "Certains pourraient penser que nous risquons d’être moins innovants. Mais ce n’est pas le cas, puisque nous porterons davantage nos efforts sur l’efficacité de la R&D", assure-t-il.
L’IA joue ici un rôle majeur. En 2025, elle est devenue incontournable. L’équipementier la considère comme un "game changer" et l’applique dans ses usines ainsi que dans la R&D. Le groupe compte quatre partenaires : Google Cloud et Amazon Web Services pour les logiciels ; Dassault Systèmes et Zuken pour le design génératif, qu’il s’agisse de pièces mécaniques ou de cartes électroniques. "L’IA nous permet de continuer à être innovants tout en diminuant la R&D, et cela transforme le modèle de Valeo en générant beaucoup de cash", affirme le patron.
Les yeux rivés vers la Chine pour sa croissance
La croissance est le troisième moteur du plan Elevate 2028. Elle repose essentiellement sur les commandes prises entre 2022 et 2024, qui représentent "plusieurs milliards d’euros". "Ce sont des commandes sur toute une gamme, voire pour tout un constructeur", souligne le directeur général de Valeo. Elles permettent au groupe de projeter un chiffre d’affaires de 22 à 24 milliards d’euros en 2028. L'équipementier souhaite renforcer sa présence sur trois zones géographiques majeures.
La Chine est ainsi devenue incontournable. "C’est la Champions League : c’est là qu’il faut être, là qu’il faut gagner. Si nous ne gagnons pas là-bas, nous n’avons aucune chance de gagner dans le reste du monde", allègue-t-il. L’empire du Milieu représente 15 % du chiffre d’affaires de Valeo mais 30 % du marché mondial. "C’est un territoire d’opportunités considérables pour Valeo". Les expatriés ont d'ailleurs laissé place à des équipes entièrement chinoises pour bénéficier du même socle de compétences que ses concurrents dans le pays. "Nous leur avons donné la R&D, l’habitude de choisir leurs fournisseurs. Nous sommes Chinois en Chine. Nous n’avons aucune raison de ne pas gagner des parts de marché là-bas compte tenu de nos technologies", reste optimiste le dirigeant.
L’Inde et les États-Unis
Ailleurs dans le monde, Valeo place ses billes en Inde qui représente selon lui 6 % du marché mondial et 1 % du chiffre d’affaires de l’équipementier. Le groupe espère tripler son chiffre d’affaires dans le pays. L’entreprise étend ses usines, en particulier pour accélérer l'électrification du pays. D’autre part, le groupe a aussi commencé une activité de sa division Brain dans le pays et implanté un site industriel là-bas. "Ce n’était pas tellement un marché technologique, mais le marché indien le devient de plus en plus", souligne Christophe Perillat. "Nous croyons beaucoup en notre capacité à croître en Inde pour passer d’un peu plus de 200 millions d’euros de chiffre d'affaires là-bas à 700 millions d’euros, ce qui ne sera qu’une étape en 2028" ajoute-t-il.
Enfin, moins compétitive, mais plus stable, l'Amérique continue d'intéresser l’équipementier qui y voit tout de même un marché d’ampleur. "Nous aimons le marché américain et nous y sommes couronnés de succès. C'est l'un des marchés les plus dynamiques et les plus profitables", soutient le dirigeant. En effet, pour la troisième année consécutive, Valeo est nommé fournisseur de l’année de General Motors.
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