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Constructeurs

Le futur de la voiture est tout électrique, mais à quel prix ?

Publié le 2 décembre 2019

Par Christophe Jaussaud
5 min de lecture
Si la part des véhicules électriques doit atteindre 25 % du marché en Europe en 2030, la grande question est de savoir comment passer ce cap de la transition énergétique pour les industriels. La journée de la filière automobile a tenté de répondre à cette question.
La journée de la filière automobile, le 2 décembre 2019, organisée par la PFA dans les locaux du ministère de l'Economie à Bercy.

 

Le constat, présenté ce lundi 2 décembre 2019 dans le cadre de la journée de la filière automobile organisée par la Plateforme automobile, est sans appel. Pour Xavier Mosquet, associé du BCG Consulting group, les prévisions de marché sont inquiétantes après une forte période de croissance ces dix dernières années et plus généralement depuis 30 ans en Europe et 70 ans aux Etats-Unis. « Nous avons fait le plein de croissance naturelle dans ces deux régions et nous nous attendons à un ralentissement des marchés, à la fois à cause de facteurs macro-économiques mais aussi lié à l’évolution classique du cycle économique du marché auto », analyse Xavier Mosquet.

 

Le directeur associé du BCG anticipe une baisse comprise entre 9 et 15 % aux Etats-Unis et entre 5 et 9 % en Europe. Une prévision de marché, que Jean-Dominique Sénard, président de Renault, estime cohérente alors que Jacques Aschenbroich, le président de Valeo, la trouve surestimée. Ce dernier pense d’ailleurs que l’alerte et les difficultés sont plutôt à attendre en 2021. « Le chiffre d’affaires de l’année prochaine est fait, 80 % sont atteints sur 2021 et 40 % en 2022, mais l’on ne sait pas dire la taille du marché, qui ne peut plus s’envisager que d’un point de vue européen, a minima », estime le président de Valeo.

 

Le prix des batteries en baisse

 

Si des divergences existent sur les dates de retournement du marché, les industriels automobiles s’accordent cependant sur sa transformation et son avenir qui passe par l’électrification sous toutes ces formes. Il y a dix ans, lors de la crise de 2009, les entreprises qui ont réussi leur transformation ont continué à rechercher une zone de croissance qui existe toujours en Chine ou en Inde. Elles ont continué à travailler la rotation du capital et améliorer leur marge. En ce sens, « la baisse du prix des batteries des véhicules électriques constitue la bonne nouvelle de cette analyse du marché », poursuit Xavier Mosquet. Alors que le BCG anticipait, en 2017, un prix de batteries de 126 dollars par kWh, celui-ci devrait être proche de 95 dollars, « ce qui veut dire que le point d’équilibre entre l’achat d’un véhicule électrique et un véhicule thermique se situe aux alentours de 2022-2023 selon le prix de l’électricité à cette période ». En 2030, le directeur associé du cabinet estime que la part des véhicules électrifiés dans le monde atteindra 51 % (y compris l’hybridation légère) dont 18 % de véhicules électriques et 6 % d’hybrides rechargeables. A cette date également, la part des véhicules 100 % électriques devrait atteindre 25 % en Europe. 

 

A quand le décollage ?

 

Mais que faire entre 2020, où une baisse du marché est envisagée (entre 5 et 10 % de baisse dans les deux années à venir), et 2022 où le véhicule électrique devrait véritablement tirer l’industrie ? Et surtout, intervient Félicie Burelle, directrice générale déléguée de Plastic Omnium, « même si nous nous inscrivons en faveur de la transition énergétique, qui va acheter ces voitures ? ». Selon Xavier Mosquet, nous sommes proche du moment où le consommateur va s'emparer de ce marché électrique mais, si l’on veut atteindre cette croissance, l’industrie a besoin de deux à trois ans de visibilité. D’autant que 300 milliards de dollars ont été investis dans le véhicule électrique. « Nous parlons effectivement d’investissements massifs dans les technologies. Mais nous ne parlons pas assez des investissements massifs en formation qu’il va falloir mettre en œuvre pour réussir cette transition », précise Jean-Dominique Sénard, très applaudi lors de ses prises de parole.

 

Tirer les leçons du diesel

 

« Sur le fond, je crois qu’il faut se préparer à ces évolutions, à une nuance près. Nous avons fait disparaître le diesel de l’esprit des gens. Mais cette baisse sera-t-elle aussi forte ? Je ne suis pas certain. Je ne vois pas un effondrement immédiat : le diesel reste un favori des consommateurs et les progrès dans ce domaine son tels que, peut-être, nous assisterons à une évolution plus lente. Nous avons des leçons à tirer de cette évolution du Diesel où nous avons manqué de raison politique. Nous aurions pu sérieusement travailler sur l’analyse d’impacts des mesures prises il y a quelques temps. La transformation à marche forcée a un côté sympathique mais nous n’avons pas pensé à l’impact social. Nous allons devoir nous y pencher », poursuit le président de Renault. En cause, les estimations de perte d’emplois dans le secteur qui, selon de nombreuses sources, peuvent allez jusqu’à 35 000 postes. A ce titre, la mission confiée à Hervé Guyot, pour définir les conditions d’une relocalisation des usines, pourrait aller dans ce sens à condition que la fiscalité des entreprises soit retravaillée. Selon Jean-Dominique Sénard, la problématique du coût de l’emploi reste majeure. Ainsi, le président de Renault annonce un coût de production inférieur de 40 % en Espagne par rapport à la France !

 

Catherine Leroy

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