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Constructeurs

Fiat et GM : Je t’aime. Moi non plus

Publié le 11 février 2005

Par Christophe Jaussaud
5 min de lecture
Fiat et GM ne sont pas parvenus, pour l'heure, à s'entendre sur l'option de vente. Toutefois, les négociations peuvent reprendre. Si tel n'était pas le cas, l'espoir d'un divorce à l'amiable s'évanouirait devant un tribunal new-yorkais. Fiat va-t-il vendre sa branche auto à GM? L'option...

...de vente est-elle encore valable ? Voilà en substance le point de désaccord entre les deux constructeurs. Fiat affirme qu'il peut l'exercer alors que GM prétend le contraire. Rappel de faits. En mars 2000, les deux entreprises avaient signé un accord avec une participation croisée et donnant naissance à deux joint-ventures. Les entreprises communes sont toujours une réalité mais les participations ont depuis évolué. Le contrat prévoyait également une option de vente que la société turinoise pouvait exercer à partir du 2 février 2005, et ce jusqu'au 24 juillet 2010. A l'approche de cette échéance, les partenaires ont donc débuté un round de négociation, d'ailleurs prévu dans l'accord initial. Et cette option de vente, qui représente un actif important pour le groupe italien, est au centre des débats. "Nous sommes absolument convaincus de la validité de l'option de vente et de nos droits. Je suis serein", a affirmé Luca Cordero di Montezemolo, président de Fiat, jeudi, au lendemain de l'échec des négociations. Un bon droit que GM conteste. Pour le géant américain, la recapitalisation de Fiat Auto en 2003 et la vente de Fidis, la filiale crédit automobile de Fiat, auraient "modifié substantiellement" les conditions du partenariat et rendraient caduque l'option de vente. De ce constat découlent trois scénarios pour la suite.

"Un contentieux judiciaire serait un désastre"

Première possibilité : les négociations reprennent pour aboutir à un accord, à un divorce à l'amiable. C'était d'ailleurs la solution qu'attendaient les observateurs au terme de ces négociations. Certains estimaient d'ailleurs qu'une indemnité de 1,5 à 2 milliards d'euros versée à Fiat mettrait fin à la discorde et ferait disparaître cette option de vente. Pour l'instant à l'arrêt, de nouvelles négociations font toutefois l'unanimité dans l'Italie politique. "J'espère qu'il y a encore de la marge pour de nouvelles négociations et que l'on n'aboutira pas à un conflit judiciaire", a confié le maire de Turin, Sergio Chiamparino. Pour Dominico Siniscalco, le ministre de l'Economie,l'optimisme est de mise: "Il faut laisser les deux parties négocier, ce sont des négociations complexes." Et même le ministre des Affaires sociales, Roberto Maroni, y va de son petit couplet: "Je continue de parier sur un accord, un contentieux judiciaire serait un désastre." Quant à Silvio Berlusconi, le chef du gouvernement italien, il suit l'affaire tout en indiquant "que pour l'heure le gouvernement reste en retrait". Les deuxième et troisième possibilités ont en commun un volet judiciaire. En effet, si les négociations ne reprennent pas, l'un ou l'autre des constructeurs, voire même les deux, peut saisir un tribunal du District de New York, la juridiction compétente désignée conjointement. Le groupe turinois viendra y chercher la confirmation de la validité de son option de vente de Fiat Auto à GM alors que le groupe américain plaidera pour l'annulation. D'ailleurs pour certains analystes, GM aurait de fortes chances de l'emporter et il serait même dans son intérêt d'aller devant la justice. Mais, quoi qu'il arrive, cette solution ferait sûrement plus de mal que de bien. D'autant que les deux constructeurs n'affichent franchement pas une santé éclatante. Fiat Auto a déjà perdu 700 millions d'euros sur les neufs premiers mois de l'année 2004 et GM doit financer son vaste plan de restructuration en Europe. Il faut également rappeler que si l'Américain devait prendre le contrôle de l'Italien, il ajouterait 8 milliards d'euros de dettes aux siennes.

Qu'adviendra-t-il des coopérations techniques fructueuses?

Même s'il est difficile de croire que le groupe transalpin se sépare totalement de sa branche automobile, c'est juridiquement possible. Mais si Fiat exerce son option de vente, il y a fort à parier que GM aille la contester devant la justice new-yorkaise. Aucune hypothèse ne peut être écartée actuellement, mais il serait franchement souhaitable que les deux partenaires s'entendent et regardent déjà le chemin parcouru. Fiat-GM Powertrain, le joint-venture fabricant des mécaniques notamment, est une réussite. Opel a ainsi pu bénéficier de la technologie Diesel de Fiat. Dans l'autre sens, la politique de plates-formes va commencer à porter ses fruits pour Fiat avec la nouvelle Croma qui repose sur la plate-forme de l'Opel Signum, et la future Alfa 157 inaugurera une base que l'on retrouvera prochainement chez Saab. Mais est-ce que tout cela vaut une indemnité de 1 à 2 milliards d'euros? GM ne roule pas sur l'or et préférerait investir une telle somme dans son plan produit. Qu'adviendra-t-il des coopérations techniques fructueuses ? Dans le cas d'un règlement à l'amiable, il ne devrait pas y avoir de gros bouleversements, mais dans le cas contraire… Pourquoi ne pas décider le gel du recours en justice et reprendre les négociations en 2006? Une date où la sérénité serait peut-être de mise avec le retour attendu à l'équilibre de Fiat Auto et où le plan de restructuration européen serait en grande partie digéré par GM. Autant de questions auxquelles Sergio Marchionne, administrateur délégué de Fiat et président de Fiat Auto, et Rick Wagoner, président de GM, devront répondre dans les semaines à venir.

Christophe Jaussaud

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