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Industrie

Relancer l’Europe des batteries : mission (presque) impossible pour Lyten ?

Publié le 25 août 2025

Par Christophe Jaussaud
4 min de lecture
Avec la reprise de Northvolt, Lyten a l'ambition de relancer la fabrication de batteries en Europe. La start-up américaine souhaite également introduire sa chimie lithium-soufre. Un pari encore loin d'être gagné. Il va notamment falloir retrouver la confiance des constructeurs.
Lyten Northvolt batteries Europe
L'américain Lyten a repris les activités de Northvolt en Europe et souhaite relancer la production de batteries. ©Lyten

L'Europe des batteries pourrait-elle renaître sous pavillon américain ? C'est en tout cas la volonté de Lyten qui a racheté le suédois Northvolt au début du mois d'août 2025, avec notamment le soutien de Stellantis (qui détient moins de 2 % du capital) et FedEx.

 

L'américain souhaite redémarrer les usines de batteries lithium-ion de Northvolt mais aussi y introduire rapidement sa technologie lithium-soufre. Mais dans tous les cas, nouvelle chimie ou pas, il faudra retrouver la confiance des constructeurs européens.

 

"Le groupe BMW reste désireux de voir un fabricant très performant de batteries en boucle circulaire et durable s'implanter en Europe", a déclaré un porte-parole du constructeur allemand, tout en prévenant qu'un successeur à Northvolt ne pourrait être envisagé que pour un projet de batteries futur, et non dans l'immédiat.

 

Selon un scientifique spécialisé dans les batteries et travaillant pour un autre constructeur automobile européen, souhaitant rester anonyme, il faudra attendre la présentation de prototypes avant de pouvoir "engager une conversation sérieuse".

 

 

Scania, ancien soutien de Northvolt, a déclaré qu'il était trop tôt pour discuter de commandes de cellules de batteries auprès de Lyten, tandis que Volvo Cars a refusé de faire un commentaire.

 

Plusieurs experts en batteries interrogés par Reuters, dont James Frith de la firme de capital-risque Volta Energy Technologies, ont mis en avant la nécessité pour la start-up américaine d'embaucher d'anciens employés de Northvolt, sans se départir d'un certain scepticisme.

 

"Lyten n'est pas un nom que l'on aurait associé à la fabrication de batteries lithium-ion il y a encore 24 heures", a déclaré James Frith peu après l'annonce de l'accord.

 

Une source proche du concurrent ACC, autre prétendant à la position de champion européen des batteries et dont Stellantis est également actionnaire, a indiqué que la société était en discussion avec trois anciens clients fermes ou potentiels de Northvolt, mais qu'en cas de signature d'un contrat, celle-ci n'interviendrait pas avant la mi-2026.

Des batteries lithium-soufre en 2028 ?

 

Pour le patron de Lyten, l'acquisition de Northvolt doit permettre d'accélérer le calendrier de production des batteries lithium-soufre pour véhicules électriques, avec 2028 pour objectif.

 

Les experts avertissent toutefois que le lithium-soufre, s'il permet de réduire la dépendance vis-à-vis des matières premières dominées par la Chine telles que le nickel, le cobalt et le graphite, n'en est encore qu'à ses débuts et ne sera probablement pas adapté aux voitures avant 2030.

 

Les concurrents chinois notamment, tels que le leader sur le marché mondial des batteries CATL, s'intéressent davantage aux batteries semi-solides ou solides, qui se trouvent à un stade plus avancé.

 

Keith Norman, directeur du développement durable et du marketing chez Lyten, a assuré que la société travaillait depuis déjà deux ans avec des équipementiers automobiles sur des essais et des validations du lithium-soufre.

 

"Nous pensons que le marché continuera d'être surpris par la vitesse à laquelle nous introduisons le lithium-soufre dans un large éventail de marchés", affirme-t-il.

 

Pas de raccourci possible

 

Lyten ne dispose cependant pas du carnet de commandes de 50 milliards de dollars de Northvolt ni de son capital de plus de dix milliards de dollars. Avant l'accord, son financement s'élevait à un peu plus de 600 millions de dollars. La start-up n'a pas divulgué les détails de ses plans de financement ni l'identité de ses principaux investisseurs.

 

Pour Emma Nehrenheim, ancienne cadre de Northvolt récemment nommée à la tête de l'European Battery Alliance, il faudrait plus de cinq ans et des subventions gouvernementales pour que les fabricants européens de batteries parviennent à sortir de la "vallée de la mort", la période actuelle de montée en puissance de la production sans être encore rentable, et deviennent compétitifs par rapport à leurs concurrents asiatiques.

 

"Les gouvernements et les investisseurs doivent comprendre que la Chine a mis 15 à 20 ans et dépensé plus de 150 milliards de dollars pour en arriver là où elle en est aujourd'hui, et si vous pensez pouvoir prendre un raccourci, c'est que vous ne comprenez rien aux batteries" observe Rob Anstey, directeur général de la société GDI, spécialisée dans les anodes au silicium pour batteries.

 

La sortie de la "vallée de la mort" ne semble donc pas pour tout de suite… (avec Reuters)

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