Normes CAFE : le gouvernement Bayrou demande du répit à la Commission européenne
L'affaire est suffisamment sérieuse pour que trois ministres du gouvernement Bayrou prennent officiellement la plume dans une tribune commune parue chez nos confrères des Échos.
Marc Ferracci, ministre chargé de l'Industrie et de l’Énergie, Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, et Benjamin Haddad, ministre délégué en charge de l'Europe, enjoignent la présidente de la Commission européenne à "prendre ses responsabilités" concernant les normes CO2 que doivent respecter par les constructeurs automobiles. Ils suggèrent de "lisser les objectifs sur plusieurs années" face à la crise qui guette le secteur.
"L'application stricte d'une réglementation dépassée par la conjoncture, qui aboutirait à transférer plusieurs milliards d'euros aux constructeurs chinois qui ont conquis leurs parts de marché par des pratiques commerciales déloyales, ou à Tesla, serait à nos yeux une grave erreur politique", écrivent-ils.
Pénalisés par une faible demande en électrique
Alors que ces normes, plus sévères, sont entrées en vigueur au 1er janvier 2025, les constructeurs européens appellent depuis plus d'un an à leur révision. Ces derniers jugent impossible leur respect, qui doit les obliger à baisser de 15 % les émissions moyennes des voitures neuves vendues sur le marché européen. Le groupe BMW, quant à lui, ne demande aucun aménagement.
Seule la hausse des ventes des véhicules électriques leur permettrait d'atteindre leurs objectifs. Mais en 2024, les modèles 100 % à batterie n'ont représenté que 13,6 % des immatriculations européennes. Alors qu'ils devraient peser entre 22 % à 25 % de toutes les mises à la route cette année.
"Cette faible demande impose une double peine car la réglementation européenne prévoit des amendes si la trajectoire vers 2035 n'est pas respectée. Nos constructeurs sont donc exposés jusqu'à 15 milliards d'euros de pénalités en 2025, alors qu'ils ne sont en rien responsables de la baisse de la demande en véhicules électriques", ajoutent les ministres dans leur lettre ouverte.
Que de mauvaises options
Si la Commission européenne persiste dans sa volonté de maintenir le cap de transformation du marché, ainsi que son rythme, les industriels ne disposent que de "mauvaises options" pour éviter les amendes. Soit constituer des pools de constructeurs, comme l'ont déjà annoncé Stellantis, Ford, Toyota, Mazda, en achetant possiblement des crédits CO2 à Tesla, ou Mercedes avec Volvo et Polestar. Soit réduire les ventes et donc la production de voitures thermiques. Ce qui se traduirait automatiquement par la fermeture d'usines en Europe.
Jean-Philippe Imparato, directeur de Stellantis en Europe, avait évoqué cette option, la qualifiant même de "bombe atomique" sur l'emploi de l'industrie automobile européenne.
"Elle affaiblirait durablement notre capacité à accompagner la transition écologique de notre industrie automobile. Investir massivement dans l'électrique est nécessaire pour atteindre nos engagements climatiques. Pour ce faire, les constructeurs doivent dégager des marges de manœuvre, pas subventionner leurs concurrents", indiquent Marc Ferracci, Agnès Pannier-Runacher et Benjamin Haddad.
Ces derniers rappellent qu'Ursula von der Leyen a placé son second mandat sous le signe de "la politique industrielle avec un Pacte Industrie Propre, qui se veut la suite pragmatique du Green Deal. Elle doit prouver ce pragmatisme en annonçant au lancement du dialogue stratégique sa volonté d'éviter les amendes dues au titre de 2025", selon les trois ministres.
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