Scala : la passion comme moteur
À la question : "Qu’est‑ce qui vous fait avancer ?", les deux hommes répondent sans se concerter : "La passion !" Et dans un monde qui semble parfois être dirigé par des tableaux Excel ou des graphiques PowerPoint avec des camemberts aux couleurs chatoyantes, cela fait plaisir à entendre.
D’autant plus que dans le contexte actuel subi par la distribution automobile, la réponse n’est pas évidente. Mais chez Franck Stival et Nicolas Montalègre, l’optimisme paraît être une seconde nature.
Surtout, il semble ne jamais les avoir quittés depuis qu’ils sont à la tête du groupe Scala. Une façon de penser et d’agir qui leur avait déjà permis de remporter le titre de Concessionnaire de l’année, lors de l’édition 2010 des Grands Prix de la Distribution Automobile.
Ces deux‑là se connaissent depuis des décennies, depuis 1997, pour être précis. Nicolas Montalègre arrive dans la concession familiale comme stagiaire, un BTS force de vente en poche. Un choix naturel pour ce passionné d’automobile d’aller travailler chez le concessionnaire Volkswagen local. Car Scala est dans l’Ariège une adresse connue. "L’histoire a débuté avec mon père, Timo Stival, lance Franck Stival. Il était immigré italien et a commencé à travailler en vendant des Simca à Foix (09)."
En 1979, Timo Stival se met à son compte et trois ans plus tard, il devient concessionnaire Peugeot‑Talbot dans la petite préfecture au pied des Pyrénées. C’est à cette période que le nom "Scala", acronyme de "société commerciale automobile du lac", fait son apparition. "Mon père adorait jouer avec les mots, glisse Franck Stival. Scala, ce n’est probablement pas très original, mais c’était facile à prononcer et à se souvenir."
Mais bien au‑delà de cette approche empirique de marketing, c’est surtout son action dans le VO qui a fait le succès du groupe et qui continue à le faire. "Nous avons toujours fait de l’occasion, nous avons un ratio d’un pour un", indique Nicolas Montalègre.
Dans le giron de Volkswagen
En 1995, le concessionnaire a l’occasion de se développer, toujours à Foix, avec l’enseigne Volkswagen. "C’est ma sœur Sandra qui travaillait déjà dans l’entreprise qui a pris en charge cette adresse, se rappelle Franck Stival, qui rejoint la société trois ans plus tard et rencontre Nicolas Montalègre, de dix ans son cadet. J’ai commencé chez Ford dans le véhicule utilitaire, un univers qui m’a toujours plus", poursuit‑il.
La veille de notre entretien, il avait d’ailleurs passé une partie de son week‑end à "potasser" la brochure du nouveau Volkswagen Transporter, très heureux d’avoir un nouveau véhicule à vendre.
Les deux hommes ne le savent pas encore, mais la prise du panneau Volkswagen sera le début d’une belle histoire. La concession, qui, en 1998, vendait 220 Volkswagen, 50 Audi et 300 VO, déménage en 2002 à Pamiers (09), la plus grande ville du département.
Un sacré challenge pour cette jeune équipe, mais elle a le soutien d’un certain André Trigano, maire de la commune, passionné de belles automobiles et surtout fondateur du groupe éponyme, leader mondial dans le monde des loisirs. "On a été les premiers à s’installer au nord de Pamiers, sur la route de Toulouse", se rappelle Franck Stival.
Un village automobile
En venant dans cette zone commerciale, le groupe crée sans le savoir un appel d’air pour d’autres concessions qui, au fil des années, s’installent dans ce qui va devenir un village automobile. "Ici, les clients ont à leur disposition 700 à 800 voitures exposées en permanence", relate Nicolas Montalègre.
Les deux années qui suivent seront fortes en changements. Le garage historique Peugeot sera cédé, "à contrecœur", glisse Franck Stival, Nicolas Montalègre intègre le capital de l’entreprise avec une prise de participation de 5 % et le groupe se développe avec d’autres marques.
Skoda, Kia et Chevrolet s’installent ainsi à Pamiers, mais très vite, les deux hommes voient bien que cela ne suffira pas s’ils veulent que le groupe Scala ait un avenir.
Vitesse supérieure
Le développement passera par Perpignan (66). Bien que l’Ariège et les Pyrénées‑Orientales soient limitrophes, le flux économique n’est pas naturel. Mais la concession Volkswagen et Audi est mal en point et le constructeur surveille ces deux hommes qui ont de très bons résultats. "Le rachat aura mis six ans à se conclure", se remémorent‑ils. Là, ils basculent dans un autre univers.
"Le showroom faisait deux fois notre chiffre d’affaires sur un territoire trois fois plus grand que celui de Pamiers", glisse Franck Stival. De quoi donner quelques sueurs froides. "On jouait notre avenir professionnel, se rappellent‑ils. D’autant plus qu’il a fallu repartir d’une feuille blanche et que le personnel était deux fois plus nombreux que celui de nos affaires de Pamiers."
Mais les deux hommes savent faire. Bien faire. En seulement quelques mois, ils transforment cette concession morose en un site performant. "Pour y arriver, nous avons eu le soutien du constructeur, notamment d’Audi", soulignent‑ils.
Ce premier rachat sera le pivot de leur essor. Nicolas Montalègre augmente ses parts dans le capital et les deux hommes se développent. Cela passe notamment par le véhicule d’occasion haut de gamme.
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C’est Nicolas Montalègre qui est à l’origine de cette épopée qui va durer plus d’une dizaine d’années et qui va permettre au groupe Scala de rayonner au niveau national. "On a créé un site Internet en 2000, nous étions les premiers concessionnaires à le faire car nous nous sommes aperçus que cet outil naissant nous permettrait de sortir de nos frontières naturelles", explique Nicolas Montalègre.
Grâce à Internet, le groupe Scala achète à tour de bras des Ferrari, des Porsche et d’autres bolides qu’il fait venir de Monaco ou d’ailleurs et qu’il revend sur tout le territoire. "Nous sommes un groupe qui a la culture du VO, une culture initiée par mon père", rappelle Franck Stival.
Cette activité, que l’on n’appelait probablement pas encore à l’époque "diversification", fonctionne. Même très bien. "Le fait d’avoir le panneau Audi rassurait les clients", poursuivent les deux dirigeants. Elle leur a permis de construire un important réseau, de renforcer leur trésorerie et leur réputation mais elle va s’étioler à la fin de la décennie. "Trop de concurrence et la fiscalité ne s’y prête plus", glisse Nicolas Montalègre.
Néanmoins, des restes de cette activité subsistent encore aujourd’hui ; le groupe a, en effet, été le seul distributeur Audi de France à avoir exposé dans l’une de ses affaires, en l’occurrence à Perpignan, l’ultime ABT XGT, une bête de course homologuée route, produite à seulement 99 exemplaires.
Capital confiance
Toujours au milieu des années 2010, le groupe Scala bénéficie d’un important capital confiance de la part du constructeur allemand, ce qui lui permet de reprendre Volkswagen et Audi à Narbonne (11) en 2018. "Nous venions d’absorber Perpignan, nous avions enfin l’esprit plus tranquille", glisse Franck Stival. Un achat qui en appellera un autre.
En 2021, le groupe familial Dambax, présent à Auch (32), à Tarbes et Lannemezan (65), ainsi qu’à Saint‑Gaudens (31), cède ses affaires à l’Ariégeois. "Entre Tarbes et Perpignan, il y a 400 km", lâchent les deux dirigeants qui passent à une autre dimension.
Il a fallu s’organiser en s’appuyant sur les hommes en place, sachant que, et c’est probablement une particularité dans la distribution automobile, le groupe n’a aucun directeur, "seulement à Narbonne", indique Franck Stival.
"Nous travaillons avec des chefs de service transverses, ce qui nous permet de réduire les coûts de fonctionnement tout en conservant notre ADN d’entreprise familiale et en étant sans cesse sur le terrain", expliquent Franck Stival et Nicolas Montalègre.
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Au début de cette décennie, les deux hommes poursuivent leur croissance externe : Skoda à Perpignan en 2022, puis, dans la même ville, Seat et Cupra l’année suivante et Skoda à Narbonne.
En parallèle, ils se séparent de Kia à Pamiers. "C’était trop difficile et pas du tout rentable de s’occuper d’une marque sur un seul site", glissent‑ils. Paradoxalement, ils ont installé MG à Pamiers cette année. "Depuis 1998, nous avons multiplié notre résultat par 10, notre chiffre d’affaires par 20 et notre effectif par 30", résume Franck Stival. Une très belle progression.
Si les deux hommes ne sont pas fermés à d’autres acquisitions, "mais toujours dans nos marques et sur notre territoire", précisent‑ils, ils poursuivent leur engagement localement. "Nous allons réorganiser les Scala Days, annonce Clément Holonne, en charge du marketing et de la communication au sein du groupe. L’idée est de réunir nos clients autour d’événements forts, comme présenter des véhicules d’exception, ce qui a été par exemple le cas avec l’ABT XGT ou organiser des baptêmes à bord de ce type de véhicules."
Lors d’une dernière édition, cette activité avait permis de récolter quelques milliers d’euros qui avaient été reversés à une association pour la lutte contre la mucoviscidose.
Franck Stival est également très attentif à la partie après‑vente, son autre dada après l’utilitaire. "C’est pour moi une activité passionnante, c’est un mélange parfait entre la technique et le commerce, explique‑t‑il. C’est un métier à la fois structuré et structurant, ce qui me va très bien", lui qui reconnaît que, plus jeune, il ne l’a pas toujours été.
Au vu des résultats de son groupe et sa trajectoire, il semblerait qu’il l’ait trouvée, sa structure. Et ça, avec passion.
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