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Distribution

Marketplaces VO : la course au leadership

Publié le 22 novembre 2023

Par Gredy Raffin
7 min de lecture
En une poignée d’années, le nombre de places de marché consacrées aux transactions VO entre professionnels a explosé. Dans ce contexte devenu hautement concurrentiel, le volume ne fait peut-être plus tout. Le catalogue de services et le modèle économique vont aussi prendre de l’importance.
Marketplaces VO
147 189, c'est le nombre de transactions VO entre professionnels à fin septembre 2023 (+ 2,6 %). ©AdobeStock

Quand au début des an­nées 2010, Jean‑Roch Piat parlait de place de marché, il interpellait le public des premières éditions des États‑Majors du VO. Dans la salle, les yeux se plissaient. On tentait d’imaginer un monde où les voitures se troqueraient contre des deniers sur des plateformes aux allures de site d’Ama­zon. Celui qui quelque temps plus tard allait prendre la direction de BCAuto Europe avait une vision claire de l’évolu­tion du secteur.

 

Dans le sillage du géant du remarketing, d’autres projets ont fleuri. Une décennie plus tard, le paysage n’est plus le même. Les places de marché sont en passe de devenir pour les reven­deurs des lieux incontournables pour se fournir en véhicules d’occasion.

 

Les pure‑players ne sont plus les seuls à proposer le service. Des centrales d’achat ont enrichi leur environnement d’une place de marché. Le dernier exemple en date est à trouver du côté de Lyon (69). De Saint‑Fons plus préci­sément, le fief du groupe Starterre qui a lancé, au début du mois d’octobre 2023, la plateforme Caméléon. "Certains acteurs font très bien le travail en se contentant de gérer des flux de don­nées. Nous avons investi plus lourdement pour nous impliquer dans le recondition­nement et assurer un niveau de qualité. Nous y ajoutons aussi notre expérience du métier", pose Christian Fernandez, directeur général du groupe.

 

Un phénomène de mode ?

 

Un propos qui résume à merveille le contexte. Les places de marché se font maintenant directement concurrence. Il appartient à chacun des entrepre­neurs aux manettes de trouver un moyen de se démarquer. Souvent, ils mettent en avant le portfolio de ser­vices à disposition des acheteurs.

 

Chez Eveho, qui a lancé une plateforme en septembre 2023, l’argumentaire repose sur l’interconnexion avec tous les outils DMS majeurs du marché. Un moyen pour les fournisseurs d’exposer sans ef­fort sur la place virtuelle bordelaise.

 

Les transactions VO entre professionnels en France de janvier à septembre 2023.

 

Arrivé dans la partie au prin­temps 2022 avec la société Entre Mar­chands Auto (EMA), le provençal Tristan Rubis juge que les contraintes administratives constituent la princi­pale problématique des marchands. Il souhaite donc suivre cette voie pour encourager les professionnels à se connecter sur son site. "Le modèle de la marketplace attire depuis quatre ans dans tous les secteurs d’activité confon­dus, relève Tristan Rubis. Il y a claire­ment un phénomène de mode. Mais à terme, nous devons avoir conscience qu’il sera impossible de compter plu­sieurs acteurs dans l’automobile d’occa­sion." Il ne manque pas de rappeler que des projets ont déjà rejoint le cime­tière des bonnes idées. "Y aura‑t‑il des rapprochements stratégiques, des ra­chats par des investisseurs ou des dispa­ritions naturelles ?", s’interroge‑t‑il.

 

Le choix du modèle d'affaires

 

Les places de marché ne sont fina­lement qu’un moyen de concentrer des centrales d’achat sur une interface familière et agrémentée de services faci­litant la logistique. Alors, comment cap­ter des utilisateurs ?

 

La question que se pose quotidiennement Antoine Paul, le fondateur d’Autolity, doit obséder tous les nouveaux venus. La plateforme d’origine stéphanoise opère historique­ment auprès de professionnels dotés de véhicules haut de gamme. "Je pense que nous sommes tous techniquement au point maintenant. Le volume et la qualité des annonces sont les principaux sujets", partage‑t‑il. La prochaine étape du développement d’Autolity consiste­ra, à l’instar d’Eveho, à ouvrir les accès aux DMS. Il faudra attendre 2024 pour Cardiff et Planet VO².

 

Les transactions VO entre professionnels en France de janvier à septembre 2023.

 

Le modèle économique a aussi son importance. Dans le métier, les têtes pensantes des places de marché ont opté pour l’abonnement. Elles sont re­venues sur leur décision. Désormais, le modèle de la rémunération à la perfor­mance fait loi. Rares sont celles qui ap­pliquent encore un système d’engage­ment dans la durée.

 

C’est notamment le cas de Fastback. La place de marché belge qui mise une partie de son avenir sur son expansion en France perçoit 1 650 euros par compte. Et depuis peu, elle prélève une commission de 1 % sur chaque vente. Ce qui a pour objectif de dissuader les acteurs qui ne jouent pas pleinement le jeu, notamment en ma­tière de positionnement tarifaire des voitures exposées.

 

Eveho a adopté la même ligne com­merciale. Par souci de lisibilité, seuls trois packs existent. Les tarifs d’abon­nement mensuels sont de 49 euros, 129 euros ou 399 euros pour disposer de différentes spécificités. "Les deux formules supérieures offrent des avan­tages aux clients indéniables par rapport à notre ancien catalogue. Les options ont été intégrées directement", précise Ar­mand Faure, CEO d’Eveho. Ensuite, Eveho touchera de manière forfaitaire 20 euros par transaction réalisée sur la place de marché.

 

Les transactions VO entre professionnels en France de janvier à septembre 2023.

 

Après avoir aban­donné les formules d’abonnement pour un mécanisme de commissionnement, EMA y songe à nouveau. Elles corres­pondront à un niveau premium et la plateforme s’engagera à rembourser le montant de la souscription à la pre­mière transaction réalisée.

 

L’idée étant d’encourager à jouer le jeu de la place de marché en positionnant les voitures à des prix raisonnables, d’un côté, et en formulant des propositions pour soute­nir l’offre, d’un autre côté.

 

L’Europe pour la taille critique

 

Coder une plateforme et la mettre en ligne demande de solides ressources. Il faut donc générer un grand nombre de transactions et ajouter des ventes com­plémentaires pour l’amortir. Ce qui ne s’avère pas chose aisée en ce moment. Entre le calme ambiant et la rivalité des enchéristes aux structures toujours plus affirmées, les places de marché ont de nombreux défis à relever.

 

"Beaucoup font moins de 2 000 transactions par an, voire moins de 1 000. Le volume reste la clé pour amortir les investissements, mar­tèle Guillaume Fonteneau, responsable France de Fastback. Notre nouvelle orga­nisation s’avère plus coûteuse, mais notre modèle économique nous assurera de la pérennité pour accompagner nos clients."

 

A lire aussi : Auto1 Group signe un trimestre de profitabilité

 

Le point rassurant est qu’après trois tri­mestres, les transactions de VO entre professionnels sont à la hausse en 2023. Selon AAA Data, 147 189 voitures sont passées d’une société à une autre, soit 2,6 % de plus que l’année précé­dente quand l’exceptionnelle pénurie frappait le secteur.

 

En moyenne, les produits échangés ont une ancienneté de quatre ans et les marques les plus prisées sont Renault (26 041 unités ; ‑4 %), Peugeot (23 293 unités ; +5,9 %) et Ci­troën (12 167 unités ; +23,7 %).

 

La taille critique pour les places de marché s’atteindra avec l’internatio­nalisation. Elles y pensent toutes ou presque. En débarquant en France et en trouvant un actionnaire d’Europe de l’Est, Fastback a un coup d’avance. Starterre a construit Caméléon en ce sens et Antoine Paul, chez Autolity, confie avoir programmé un plus large déploiement dès 2024.

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