Quand le VN fait perdre la tête au VO…
...2005 a semble-t-il vu le VN retrouver de son attractivité au détriment des véhicules d'occasion récents et autres 0 kilomètre.
On le disait porteur, on le savait riche et véritablement alternatif au marché du VN, mais le VO a montré l'an dernier les limites de ses capacités concurrentielles. Bien qu'annoncé comme potentiellement croissant, le marché 2005 du véhicule d'occasion a, en effet subi des pressions qui ont stoppé son évolution. La faute à qui ? Beaucoup désigneront le VN comme un des éléments clés pouvant expliquer la stagnation du marché VO. En 2005, ce dernier s'est précisément porté à 5,83 millions d'immatriculations, en recul de 1,1 % par rapport à l'année précédente. Evolution inverse d'un marché VN en croissance, quant à lui, de 2,5 %. Pour être précis, il s'agit d'ailleurs de faire le distinguo entre VN et VO récents, puisque, s'il y a hésitation de l'acheteur, elle se situe ici. Face à cette croissance du marché VN en 2005, s'oppose alors non plus une stagnation, mais une baisse de plus de 6 % des VO de moins d'un an, à moins de 520 000 immatriculations. Comment l'expliquer ?
Une offre VN discountée
Premier élément de réponse : la surproduction des constructeurs. "Aujourd'hui, il y a une suroffre évidente. Les chiffres tendent, en effet, à prouver qu'il existe 10 % de VN en trop sur le marché européen, ce qui, ramené au marché français, correspond à peu de chose près à 200 000 véhicules", explique Dominique Allain, directeur d'Eurotax Glass's. Conséquence logique : les constructeurs rivalisent d'offres commerciales pour écouler les stocks. Et les tarifs attrayants du neuf rendent les VO récents moins intéressants. "Au dernier trimestre, notamment, nous avons assisté à un vrai massacre du marché VO", témoigne à son tour Jérôme Martin, P-dg de Parcours.
Lorsque l'on regarde les chiffres de ventes de VO récents, un constat s'impose : les constructeurs français sont davantage touchés par cette baisse que les autres. Renault (-17,3 %), Peugeot (-10,8 %) et Citroën (-9,1 %) ont ainsi, tous trois, fait l'expérience, l'an dernier, du ralentissement de ce secteur.
"Chez certains constructeurs, les immatriculations VN sont constituées à près de 30 % par des véhicules de démonstration, des véhicules de direction et des véhicules de location, transformés en VO au bout de 3, 9 ou 12 mois. Forcément, en fonction de la politique menée en la matière, les volumes influent à la hausse ou à la baisse sur le marché de l'occasion récente", explique Dominique Allain. D'ailleurs, l'intention affichée par Carlos Ghosn de limiter ce type de vente tendrait à prouver que le calcul n'est plus aussi intéressant. Notamment parce qu'il concourt au tassement des valeurs résiduelles de certains modèles. Aujourd'hui, quatre segments sur cinq montrent en effet des signes d'essoufflement. Le M2 et le H1 sont clairement les plus touchés. Et beaucoup parient déjà sur de sérieuses déconvenues des valeurs résiduelles des modèles présents sur ces segments. Mais, d'ores et déjà, la tendance se fait sentir chez les petites berlines. Mégane et autre 307 commencent aujourd'hui à en pâtir.
Les VN à "bas coût" en perturbateurs
Les tarifs, les garanties, la surproduction des constructeurs, les rabais sur le VN, la richesse de l'offre VO, l'Algérie… Pourquoi pas ? Mais pointer tel ou tel fait de la conjoncture ferait finalement oublier un autre facteur, de fond celui-là. Celui d'une attractivité en passe d'être retrouvé par le marché du VN. Le ratio des ventes VO par rapport aux ventes VN témoigne de ce nouvel état de fait. Entre 1999 et 2004, celui-ci était progressivement passé de 2,3 à 2,7 VO vendus pour un seul VN. Pour la première fois depuis sept ans, ce ratio s'est légèrement infléchi à un VN pour 2,6 VO. Baisse qui marque le coup d'arrêt de la tendance qui témoignait de l'attrait des acheteurs pour l'occasion. Peut-être la raison est alors à chercher du côté de la consistance même de l'offre VN. L'apparition des véhicules neuf à bas prix concurrencerait-elle l'offre VO ? Cette interrogation, nombreux sont les professionnels à se l'être posée. "La question est de savoir si le client va préférer choisir un véhicule neuf avec 3 ans de garantie ou, pour le même prix, une voiture d'un autre segment, mais avec du kilométrage et 6 mois de garantie", résume Dominique Allain. "Dans le cadre d'une première voiture, probablement pas car la typologie d'achat est différente et les attentes des clients ne se superposent pas. Dans le cadre d'une deuxième ou troisième voiture, le risque est plus important, plus particulièrement dans le segment des petites voitures", réagit-on chez Mazda. "Le boom des véhicules à bas prix peut en effet nuire au marché VO, mais uniquement sur le segment A, celui des Twingo, Lupo, Arosa… mais ce marché reste limité en quantité", ajoute-t-on chez Volkswagen. En effet, les véhicules "low cost" concernent principalement les petites, Aygo, C1, 107, Fox, dont les prix d'appel oscillent entre 6 420 et 8 990 euros. Seule la très médiatique Dacia Logan est plus à rapprocher des berlines ou des citadines trois volumes. D'une manière générale, les clients VO ont besoin d'une offre diversifiée. Et ces véhicules à bas prix ne répondent pas toujours aux attentes de tous. Il paraît ainsi tout à fait naturel que les ventes VO des constructeurs allemands spécialisés dans le haut de gamme ne soient pas touchés par la multiplication de ce type de véhicules.
Un espoir pour 2006 ?
L'influence des véhicules à "bas coût" n'apparaîtrait donc que limitée, dans son importance et dans la durée. Pourtant, selon une étude de l'Observatoire de l'Automobile réalisée en septembre dernier, la majorité des véhicules vendus depuis mars 2004, qu'ils soient neufs ou d'occasions, ont concerné des transactions inférieures à 15 000 euros. Ce qui met en évidence la prédominance du prix dans la décision d'achat. Dans cette même étude, l'organisme estime par ailleurs que 20 % des Français ayant fait l'acquisition d'une voiture récemment envisagent de se tourner vers un véhicule "low cost" pour leur prochain achat. Les acheteurs de VO seraient même davantage intéressés par ce type d'achat (23 %, contre 17 % aux acheteurs de VN). Des estimations qui ne semblent pourtant pas inquiéter les acteurs du marché de l'occasion.
Si l'on juge la difficulté passagère à l'évolution des stocks, peut-être est-il d'ailleurs possible de trouver des raisons d'envisager un retour à la normal. Du moins, c'est l'avis des professionnels. Les frénétiques opérations commerciales de fin 2005 ont laissé place à des conditions plus raisonnables, les stocks VO devraient à leur tour retrouver un niveau acceptable et redonner de la vigueur au secteur. "Le marché est cyclique. Alors ces derniers mois ont été difficiles mais il n'y a pas d'affolement à avoir. Depuis trois semaines, la tendance se calme", reconnaît Jérôme Martin. Un témoignage qui expliquerait l'optimisme de certains constructeurs pour les mois à venir. Malgré la conjoncture, les professionnels prévoient entre 3 et 3,5 % d'augmentation du marché VO en 2006. Certains voient même davantage. Volkswagen prévoit, par exemple, une croissance de 8,2 % de ses ventes VO pour 2006. Et Citroën vise même les 9 %. "Je trouve ça assez optimiste. Avec la conjoncture et une consommation des ménages modérée, il me paraît important de rester prudent sur ses pronostics", confie alors Dominique Allain. A ce sujet, l'Observatoire de l'Automobile estime que 17 % des Français ambitionnent d'acheter un véhicule neuf en 2006, c'est-à-dire le même nombre qu'en 2005 ! Entre optimisme et timidité, le marché du VO s'annonce donc une nouvelle fois mitigé. Le salut viendra peut-être alors des marques étrangères. A la fin du mois de janvier, leurs ventes de VO de moins d'un an étaient en progression de 18,7 % par rapport à janvier 2005 alors que les marques françaises affichaient un recul de 5,9 % !
David Paques
ZOOMEt si la nouvelle TVTS bousculait le marché du VO ? Et si les nouvelles dispositions fiscales imposées aux entreprises venaient bousculer le marché du VO ? En tous les cas, les réactions des acheteurs et autres gestionnaires de parc risquent d'influer quelque peu sur le VO de par leur changement de politique d'achat. Même si toutes les réactions à cette nouvelle formule de la Taxe sur les véhicules de sociétés ne seront évidemment pas radicales et démesurées. Un retour massif chez les loueurs de véhicules devenus trop polluants, donc trop coûteux, est, en effet, une hypothèse. Si le cas se présentait, un flot d'unités déferlerait alors sur le marché du VO. Si une entreprise qui gère son parc, en propre, décidait également de changer la typologie d'une flotte désormais fiscalement martyrisée, le constat serait le même. Et au regard de la taxation des indemnités kilométriques, peut-être est-il même permis d'imaginer des particuliers défrayés de la sorte, contraints par leurs employeurs de changer de véhicules. Si rien n'est encore constaté à ce niveau, ces hypothèses planent aujourd'hui comme de nouvelles menaces. |
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