Opel, l'éclair qui ne fait plus d'étincelles

Rien ne va plus chez Opel. Après avoir connu un rebond en 2023, les immatriculations de la marque à l’éclair ne cessent de se contracter. En 2024, elles ont reculé de 7,5 % pour atteindre 40 007 unités, ce qui a représenté une part de marché de seulement 2,3 %.
Alors qu’elle était dans le top 10 des marques distribuées en France il y a une dizaine d’années, Opel se positionne désormais à la 15e place. Et ce n’est pas mieux depuis le début de l’année. Sur les trois premiers mois, la marque allemande a reculé de 36,9 % à 8 267 unités.
Et sur ce volume, la location courte durée a représenté près de… 40 % des immatriculations ! Pire, la rentabilité du réseau a été l’une des plus mauvaises du marché et du groupe Stellantis.
En 2024, elle a été de ‑1 %, alors qu’en 2023, le réseau était dans le vert avec un petit +0,4 %. "Et encore, ce ‑1 % reste une moyenne, s’insurge un important distributeur de l’est de la France. Chez certains groupes, la rentabilité est de ‑ 3 %, voire plus… Du jamais vu !"
Comment le réseau est‑il arrivé à cette situation ? "Avec le repositionnement d’Opel voulu par Carlos Tavares, nous avons perdu une très grande partie de notre clientèle, observent tous les concessionnaires interrogés. Le positionnement généraliste premium, le même que celui de Peugeot, avec le fameux slogan «Deutsche Qualität», a été une catastrophe. Les prix des modèles ont flambé et les clients n’ont pas suivi."
"Avec les économies d’échelle souhaitées par PSA, puis par Stellantis, comment voulez‑vous vendre une Opel qui est très proche d’une Peugeot, tout en ayant moins de soutien commercial ?, peste un opérateur du nord de l’Hexagone. En France, Opel a toujours été une marque de moyenne gamme offrant un bon rapport qualité/ prix. Vendre des Corsa à 12 900 euros était une bonne partie de notre fonds de commerce et c’est ce qui séduisait notre clientèle."
Une image floue
Si, avec l’inflation, rares sont les modèles aujourd’hui en dessous des 15 000 euros, force est de constater qu’avec en plus l’électrification de la gamme, les prix chez Opel se sont envolés. "Tout comme les clients, lâche un distributeur de l’ouest de la France. Ils se sont tellement envolés, qu’ils n’existent plus !" "La clientèle traditionnelle d’Opel s’est tournée dans une certaine mesure vers les constructeurs coréens, mais en grande partie vers Dacia et surtout vers MG", notent plusieurs distributeurs qui ont les deux marques dans leur portefeuille.
"Avec une part de marché de 2,3 %, Opel n’est plus dans la shopping list des clients et en après‑vente, le parc se réduit comme peau de chagrin", poursuit un concessionnaire de la région Auvergne‑Rhône‑Alpes.
Une situation aujourd’hui qui semble tellement compliquée que certains distributeurs n’hésitent pas à dire que la marque est morte et qu’elle n’existe dans la galaxie Stellantis que pour les marchés allemand et britannique.
"Certains distributeurs voudraient s’en séparer, comme DS d’ailleurs, mais elle n’a plus de valeur sur le marché", lâchent un ou deux concessionnaires, un brin dépités.
Opel veut réagir
Opel ne nie pas cette baisse des résultats, mais veut temporiser la situation. Nommé en mars dernier, le nouveau patron à la tête d’Opel France, quatrième dirigeant depuis 2019, travaille d’arrache‑pied pour sortir la marque de l’ornière.
"L’arrêt du Crossland et l’arrivée retardée du Frontera sont une des raisons pour laquelle la marque présente des résultats en baisse, explique Charles Peugeot. Le Frontera devait être lancé fin 2024, mais nous avons choisi de décaler sa date de commercialisation de trois mois pour offrir un véhicule qui affiche la meilleure qualité du marché."
Le dirigeant met également en avant la transformation de la marque avec, notamment, la mise en avant du véhicule électrique. Opel faisait, en effet, partie des marques du groupe Stellantis qui devaient rapidement basculer vers le tout électrique.
Bascule qui semble beaucoup plus compliquée que prévu. "Face au marché de l’électrique qui ne décolle pas autant que nous l’avions envisagé, nous avons dû faire évoluer notre stratégie et nous avons décidé de privilégier notre offre mHEV, une nouvelle orientation qui a nécessité quelques mois d’adaptation", poursuit Charles Peugeot.
Enfin, la restructuration de la gamme a clairement nui aux performances de la marque. Si les distributeurs regrettent que le portfolio de produits se soit réduit comme peau de chagrin et qu’il soit trop proche de celui de Peugeot, Charles Peugeot avance plutôt comme raison la suppression de la version spécifique Business. "Une erreur. Nous allons la remettre en place dans les semaines à venir sur l’ensemble de la gamme", indique‑t‑il.
Aides à tous les étages
Cette décision fait partie des nouvelles mesures que la marque va développer pour se relancer. "Nous allons d’abord nous appuyer sur notre gamme avec l’arrivée, donc, du Frontera, mais également du restylage du Mokka et de la nouvelle génération du Grandland qui est une alternative sérieuse au Peugeot 3008, notamment grâce à son habitabilité, présente Charles Peugeot. Et nous notons que cette offensive produits porte déjà ses fruits car nous avons enregistré deux fois plus de commandes lors des journées portes ouvertes de mars que par rapport au mois précédent. Avec 10 000 visiteurs, nous avons su générer du trafic dans nos concessions."
Ensuite, la marque promet de repenser sa politique tarifaire et d’être "moins chère que Peugeot". Sans désavouer les décisions de Carlos Tavares, on sent clairement une évolution de la stratégie commerciale qui, indéniablement, n’avait pas été une réussite. "Nous activons des actions commerciales sur le VN et nous allons également travailler le véhicule d’occasion (Opel a enregistré une baisse de 2,8 % depuis le début de l’année et est la marque qui recule le plus sur le VO, NDLR) pour offrir des produits mieux placés ", poursuit le dirigeant.
Sur les véhicules utilitaires, Opel veut également être réactif. "De par la capillarité du réseau, nous avons quelques atouts", souligne Charles Peugeot, qui vise à moyen terme une croissance de 20 % sur ce créneau.
Enfin, le constructeur va également revoir la rémunération des activités après‑vente, pour donner de l’air à son réseau. À terme, il vise 3 % de part de marché.
Toutes ces mesures suffiront‑elles à atteindre cet objectif et à redonner du baume au cœur aux distributeurs ? La mission du nouveau dirigeant risque d’être ardue car un grand nombre d’opérateurs, "à force de promesses non tenues", ne semblent plus vraiment y croire.
Et malgré les qualités intrinsèques des nouveautés, aucun produit ne se démarque de la concurrence, y compris au sein de Stellantis. Dans un contexte sévère, Opel devra avoir des arguments tarifaires pour convaincre.
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