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Constructeurs

Le métavers sur toutes les lèvres

Publié le 19 juillet 2022

Par Gredy Raffin
6 min de lecture
Perméable aux nouvelles technologies, l’industrie automobile cherche à explorer le potentiel des métavers et des procédés inhérents. Ces mondes virtuels seront‑ils une aubaine pour les marques ? Les experts s’expriment pour apporter des premiers éléments de réponse.
Seat a promis d'investir dans la création d'un monde virtuel pour proposer une nouvelle expérience à sa communauté.

Il y a des événements qui laissent le sentiment d’avoir vécu un mo­ment historique. Cette impres­sion a probablement été commune à tous les journalistes qui, le 22 fé­vrier dernier, ont été invités à assis­ter à la conférence de presse don­née par Seat. Et pour cause, pour la toute première fois, une marque automobile avait convié les médias à retrouver les interlocuteurs dans un monde totalement virtuel.

 

Un théâtre digital pour annoncer un projet d’envergure de la marque espagnole : celui d’investir dans la technologie du métavers en lançant Metahype. Un canal par lequel la filiale du groupe Volkswagen ima­gine communiquer avec sa commu­nauté, lui présenter ses prochaines nouveautés, voire lui proposer des expériences immersives de roulage.

 

Cupra a organisé la première conférence de presse automobile dans le métavers en février 2022.

 

Virage technologique avéré ou poudre aux yeux pour détourner l’attention des problématiques majeures que rencontre l’indus­trie ? L’ouverture de l’automobile aux concepts de métavers interpelle. Seat n’est, en plus, pas la première marque à avoir des vues sur les mondes virtuels. Hyundai, Volvo et Land Rover ont déjà mené des expé­riences publiques. Le constructeur Porsche s’y est essayé également cet hiver, à Val d’Isère, en ouvrant une boutique éphémère où les visiteurs pouvaient utiliser un casque conçu par Reality Labs, filiale du groupe Meta (ex‑Facebook).

 

Le projet de la firme barcelonaise, même sup­portée par sa maison mère et ses moyens financiers colossaux, paraît bien ambitieux. "J’ai des doutes sur le plan technique déjà, partage un spécialiste du secteur. Meta a expli­qué qu’il lui faudra 10 ans pour par­venir à ses fins, je suis curieux de voir quelle stratégie de développement va suivre Seat qui est alors bien loin de son cœur de métier."

Capitaliser sur le logo de marque

 

Petit rappel pour les non‑initiés : il n’y a pas un seul mais plusieurs métavers. Chacun d’eux étant la propriété d’une entreprise de tech­nologie informatique. Il y a 20 ans, il s’agissait de se connecter depuis un ordinateur pour se sociabiliser. Progressivement, l’industrie du jeu vidéo a investi les lieux au fil de la modernisation des équipements.

 

Alors que vient faire l’automobile dans ce paysage numérique ? "Les marques se posent toujours des questions sur les réseaux sociaux et cela s’applique désormais aux mé­tavers", analyse Thomas Zavrosa, directeur associé chez Dékuple, agence spécialisée dans les données marketing. Pour lui, le sujet de l’ex­périence reste central, car la qua­lité de celle‑ci encouragera le pas­sage fréquent des consommateurs. "L’enjeu est de détacher les métavers de l’environnement du jeu pour aller vers des territoires plus spécialisés où la population va se diversifier", ex­pose‑t‑il sa vision.

 

A lire aussi : Le métavers peut-il être l’avenir de l’automobile ?

 

Dans le groupe Meta justement, Gilles Maillet, directeur de la di­vision auto, défend l’idée d’une technologie des réseaux sociaux qui "devient un outil plutôt qu’un support "dans lequel les métavers trouveront toute leur place aux cô­tés des autres moyens d’expression à destination des acheteurs de véhi­cules. "À moyen terme, reprend‑il, nous pensons qu’il y en aura bien plusieurs. Souvenons‑nous que les casques de réalité virtuelle font par­tie du parcours de vente de Peugeot et Citroën depuis longtemps. Nous amenons une forme de continuité et, avec nos partenaires, nous parti­ciperons à cette nouvelle ère de l’In­ternet."

 

Comme pour Facebook à ses débuts, le groupe se concentre d’abord sur l’expérience utilisa­teur (et il investit massivement en Europe à ce titre, soulignons‑le). Ensuite, dans un second temps, il s’ouvrira à la monétisation. Le di­recteur du planning stratégique de Kantar Media, Christophe Man­ceau, se montre plus sceptique, mais il admet que la technologie du mé­tavers couplée à celle des monnaies virtuelles permettra aux marques de créer de la valeur sur des objets déjà valorisés. Pour lui, à l’heure où l’autophobie progresse, les logos des marques peuvent gagner en dura­bilité avec l’emploi d’une méthode appropriée.

 

Hyundai accélère doucement

 

Cette valorisation appelle une autre technologie complémentaire à la no­toriété croissante, celle des NFT. Ces certificats numériques infalsifiables qui attestent de l’authenticité d’une œuvre digitalisée ont attiré l’atten­tion des plus grands constructeurs. Hyundai fait partie de la liste. Une fois n’est pas coutume, le groupe sud‑coréen a mis en œuvre un plan de développement pour investir le terrain avant les autres. Dans la fou­lée du concept Métamobilité exposé au CES de Las Vegas en janvier 2022, Hyundai a publié un court‑métrage intitulé Metamobility Universe qui dévoilait un partenariat avec Meta Kongz, une marque de NFT qui l’accompagnera dans la création d’une communauté.

 

Une association qui a aussitôt pris la forme d’une opération marketing inédite. En effet, les 9 et 10 mai 2022, Hyundai a publié 10 000 NFT sur son site officiel avec une promesse à la clé pour les acquéreurs : découvrir en avant‑première une nouveauté. "Il s’agit d’une expérimentation à l’échelle mondiale. Nous pourrons nous faire une idée plus nette de la po­pulation qui va nous suivre dans cette aventure", explique un porte‑parole de la filiale tricolore.

 

Hyundai s'est associé à Meta Kongz pour bâtir une campagne de communication.

 

Les équipes stratégiques de Fuse, l’agence de partenariats médias, de contenus de marque et d’influence marketing du groupe Omnicom Me­dia, se sont penchées sur le sujet pour avoir des réponses à apporter à leurs clients, tels que Volkswagen Group France. Une étude encore vide de statistiques chiffrées qui sert sim­plement à donner des tendances. "Pour le moment, nous estimons que le public est encore jeune, mais la courbe d’adoption de l’innovation va être rapide et la démocratisation ne tardera pas", rapporte Tiffany Bouthry, directrice de Fuse France. Et de souligner dans la foulée la conséquence des budgets à déga­ger à l’entrée avant de nuancer : "Il sera toutefois possible de mener des campagnes tactiques sans débourser des sommes faramineuses." Reste à afficher un bilan écologique accep­table qui ne ruinera pas les efforts réalisés par ailleurs pour le verdis­sement des véhicules.

 

Les constructeurs n’ont pas le monopole du monde virtuel. Des concessionnaires y prêtent un intérêt. LS Group fait partie de ceux‑là. Le 21 avril dernier, le groupe présidé par Édouard Schu­macher a ouvert la première gale­rie d’art automobile dans le méta­vers. Deux plateformes de réalité ont été investies pour mettre en ligne Car‑Advisor Revolution (To­gether), soit C‑AR(T). "Même si la galerie se trouve dans le monde vir­tuel, nous avons cependant acheté un terrain dans cet univers, où nous allons créer 800 m² d’exposition sur deux plateaux. Ce sera une expo­sition permanente où nous allons renouveler les œuvres d’art qui se­ront exposées dans des capsules", a présenté le président dont les pro­jets ne s’arrêteront pas à ce seul fait, selon ses dires.

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