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Constructeurs

"Fiat n’a jamais été aussi forte que lorsqu’elle a été sincère"

Publié le 13 avril 2012

Par Christophe Jaussaud
6 min de lecture
Olivier François, directeur de la marque Fiat - Alors que Chrysler enregistre des résultats étonnants aux Etats-Unis, Fiat souffre en Europe. Bientôt de l’histoire ancienne pour Olivier François, qui revient sur ce que va être Fiat dans l’avenir et sur ses ambitions.

JOURNAL DE L’AUTOMOBILE. Alors que la 500L se profile, pourriez-vous nous faire un état des lieux de Fiat avant cet important lancement ?
OLIVIER FRANÇOIS.
Fiat est à la croisée des chemins. Sous l’effet de la crise, nous avons dû nous poser des questions sur notre identité et ce que nous voulions être à l’avenir. Au chapitre produits, nous allons nous appuyer sur les deux piliers complémentaires que sont la 500 et la Panda. Avec la 500, prise comme produit mais aussi comme philosophie et vecteur d’image, nous offrons l’image de l’Italie du design, l’Italie sophistiquée, l’Italie des solutions simples et géniales. Avec la Panda, là encore prise au-delà du produit, nous mettons en avant la générosité, la bonne humeur et, sans nul doute, un côté malicieux et pratique. Le concept de la Panda contient, en germe, une partie du futur de Fiat, et cette famille sera développée, nous n’en faisons pas mystère. Ainsi, nous avons plus de facilité à nous définir.

JA. Ce nouvel ADN Fiat sonne-t-il le glas de vos ambitions sur les segments supérieurs ?
OF.
Non, nous voulons étendre cet ADN à d’autres segments. Cependant, pour vous répondre complètement, je ne pense pas que Fiat ait vocation à refaire des grandes berlines luxueuses. En revanche, nous aurons un futur sur le segment C, où nous avons connu des difficultés avec la Bravo qui, malgré ses qualités intrinsèques, ne correspondait finalement pas à l’ADN de la marque. Nous ne nous cantonnerons donc pas aux segments A et B. Pour illustrer la transmission de cet esprit Fiat, prenons l’exemple du Freemont même si je conviens qu’il est particulier. Nous en avons vendu plus de 30 000 unités car, au final, même si nous n’avons jamais caché qu’il s’agissait d’un produit américain, nous avons su lui insuffler ce nouvel ADN. A l’image d’une Panda, il est pratique, généreux et accessible. Pour autant, nous n’allons pas faire du cross-badging une règle. Fiat n’a jamais été aussi forte que lorsqu’elle a été sincère. Et nous allons l’être.

JA. En attendant la généralisation de cette philosophie, que représente Fiat aujourd’hui sur le marché européen et où voulez-vous en venir, à terme ?
OF.
Nous affichons aujourd’hui une part de marché européenne de 5,6 %. Quant à celle que nous visons à l’avenir, elle dépend de deux éléments : la gamme dont nous disposerons et notre capacité à la vendre d’une manière optimale. Concernant la gamme future, nous travaillons encore, avec mon équipe, à sa définition et, en fonction de sa largeur, la part de marché envisagée n’est pas la même. Cependant, avec un portefeuille produits complet et idéal, Fiat peut prétendre à 10 % du marché européen. Il faut, également, pour cela, que le marché italien retrouve un niveau supérieur à celui qu’il connaît actuellement. Quant au deuxième élément, les ventes rentables, il est encore plus prégnant en temps de crise car celle-ci nous oblige à une gestion attentive de nos ressources afin d’avoir la capacité d’investir pour rebondir une fois la reprise amorcée.

JA. Vous allez donc devoir faire des choix dans la constitution de votre gamme future ?
OF.
Nous devons trouver une réelle convergence entre les produits et cette vision de la marque afin de redéployer Fiat sur de nouveaux segments. Nous avons évoqué le segment C, mais aussi le renouvellement du segment B classique, celui de la future Punto, et les segments porteurs comme celui des crossovers. Autant de défis que nous devons relever afin d’avoir ces produits au bon moment, mais aussi être capables de les produire et les vendre dans des conditions qui nous garantissent des marges pour ensuite continuer à investir.

JA. Justement, concernant la production, Sergio Marchionne a déclaré que les usines italiennes devaient impérativement exporter davantage. Dans ce but, vos capacités installées pourraient-elles être utilisées par Jeep dont on annonce un petit SUV pour 2013 ?
OF.
Déjà, quoi qu’on puisse en dire, nous avons un très fort sentiment de responsabilité sociale et nous mettons vraiment toute notre énergie et notre passion au service de la garantie de l’emploi dans nos usines. Cela étant, le fait que nos usines italiennes alimentent quasi exclusivement le marché européen nous fait naturellement courir un risque si ce dernier se rétracte. Cette problématique est également valable aux Etats-Unis. Nous devons donc répartir les charges et les risques afin qu’un mouvement dans une région ne déstabilise pas l’ensemble de notre outil industriel. Quant à l’éventualité de produire des Jeep en Italie, je ne peux vous répondre, mais Jeep est probablement la marque la plus mondiale du groupe Fiat. Et c’est une opportunité pour nos usines européennes.

JA. Fiat tend également à devenir une marque plus mondiale en arrivant sur le marché chinois. Quels sont vos objectifs dans ce pays ?
OF.
La Chine est effectivement fondamentale et nous allons nous doter, avec notre partenaire GAC, des moyens nécessaires pour exister sur ce marché. Nous serons présents au prochain salon de Pékin fin avril, pour y dévoiler notre stratégie. Nous y lancerons officiellement la Fiat 500, qui est l’icône de la marque, mais aussi le Freemont. Nous présenterons également en première mondiale la Viaggio, une berline qui sera produite sur place mais non exclusivement réservée au marché chinois.

JA. Un mot des Etats-Unis, finalement votre deuxième marché domestique, où Fiat rime exclusivement avec 500. Quelles sont vos ambitions dans ce pays ?
OF.
Le fait de ne pouvoir compter, pour l’heure, que sur la 500 est certes une limite, mais aussi une formidable opportunité. En effet, il n’y a pas ou peu d’histoire Fiat dans ce pays, nous pouvons donc nous y construire sur l’ADN de la 500, notre produit le plus iconique. Elle incarne les deux choses pour lesquelles l’Italie est la plus aimée et reconnue aux Etats-Unis, à savoir la mode et le sport. C’est une formidable porte d’entrée. Maintenant, nous devons développer une gamme autour de ces valeurs et après les 500 Gucci et Abarth, viendront la 500 électrique et la 500L. Il faut néanmoins garder à l’esprit que nous ne voulons pas vendre un million de véhicules aux Etats-Unis, mais grandir pas à pas, faire les choses bien. Jusqu’ici, les faits nous donnent raison et nous venons d’ailleurs d’enregistrer une croissance de 69 % en janvier dernier. Il y a une saine concurrence avec Mini, elle est surtout le signe que le segment sur lequel nous évoluons est porteur. Cela augure d’un bel avenir pour Fiat.
 

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