Entretien avec Jacques Chauvet, directeur commercial France Renault : "Nous totalisons 4000 immatriculations de plus qu'à fin février 2004"
...comme la Clio en fin d'année, mais aussi de nouvelles concurrentes, notamment sur le segment B.
Journal de l'Automobile. Renault, au-delà de ses excellents résultats globaux, a réussi à se maintenir en France sur un marché assez difficile en 2004. Quels seront vos atouts en 2005 ?
Jacques Chauvet. Ces résultats font de Renault le constructeur généraliste le plus rentable d'Europe. Nous avons progressé de 100 000 voitures dans le groupe, un volume toutefois à mettre à l'actif de Renault car les ventes de Dacia sont venues compenser le recul de Renault Samsung Motor. Pour 2005, les objectifs sont connus, le président a annoncé une marge opérationnelle à 4 %, donc c'est sur cette base que nous travaillons. Alors, pour la France, cela veut dire que nous allons tenir et défendre nos positions commerciales qui sont de 27 % en VP et 32 % en VUL. A fin février, nous sommes d'ailleurs en phase avec le plan de marche puisque nous totalisons 4 000 immatriculations de plus qu'à fin février 2004.
JA. La Clio n'est plus toute jeune, la Twingo risque de souffrir avec l'arrivée des C1, 107 et Aygo, cela pourrait être difficile sur ce segment…
JC. La Twingo, malgré ses douze années d'existence, résiste bien. Quant à la Clio, elle est effectivement en fin de vie, mais elle sera remplacée cet automne. Nous avons toutefois un petit retard d'immatriculations sur la Clio car nous avons connu un problème d'approvisionnement avec un fournisseur qui a allongé les délais. Aujourd'hui, ce dernier atteint 58 jours et il est compréhensible qu'un client ne veuille pas forcément attendre si longtemps pour une Clio. Mais ce qui est important pour nous, c'est qu'au total, avec Twingo, Clio et Modus, nous sommes à 12 % du marché, c'est-à-dire 25 % de plus que l'année dernière.
JA. Vous venez d'évoquer la Modus, le ralentissement de la production est-il un signe de difficultés ?
JC.Non. Pour ce qui est du marché français, la Modus respecte le plan de marche avec un volume voisin des 39 000 unités. A l'échelle européenne, ce volume est de 77 000. Cependant, il est vrai que dans certains pays, où la culture des monospaces est moins établie, le démarrage a été plus dur que prévu. Ceci dit, nous n'avons que légèrement réduit la cadence, de 1 350 à 1 150 par jour.
JA. Qu'en est-il de vos ambitions avec les nouveaux produits présentés ici, telles la Laguna et la Vel Satis restylées ?
JC. La Laguna et la Vel Satis restylées seront lancées à l'occasion d'une opération portes ouvertes à la mi-mars. Sur ces deux nouveautés, nous avons privilégié le design intérieur et la qualité de vie à bord, avec notamment un nouveau système de navigation et de communication et des matériaux dont la qualité est en hausse. Alors, il est vrai que ce n'est pas une phase II très lourde en style extérieur, mais cela devrait permettre à la Laguna de tenir sa place. Elle était première sur son segment en 2004 et nous voulons le redevenir en 2005. Pour Vel Satis, nous avons pour ambition de maintenir le volume de ventes.
JA. La Logan va débarquer dans le réseau en juin. Ne va-t-elle pas être fortement concurrencée par les trois cousines tchèques vendues aux environs de 8 500 euros?
JC. Déjà, nous serons moins chers avec un premier prix autour de 7 500 euros. Puis la Logan, pour reprendre la formule d'un de mes collègues, va être l'occasion d'acheter un véhicule neuf vraiment très compétitif. C'est une voiture grande, spacieuse, robuste, facile à construire et de bonne qualité, qui sera donc très accessible. La Logan est une vraie réponse pour les consommateurs au pouvoir d'achat modéré qui ne peuvent acheter de voitures neuves. Après, je ne suis pas sûr qu'il y aura une forte concurrence avec les trois petites cousines tchèques, comme vous dites, car en termes d'habitabilité, de dimensions, de prestations et de prix, ce ne sont pas du tout les mêmes voitures. Je pense même que ces véhicules s'adressent à des clientèles assez différentes. La Logan sera lancée en juin à travers le réseau Renault, avec un corner dans le showroom qui demande peu d'investissements au distributeur. Nous espérons en vendre 5 000 en France cette année. Ensuite, il y aura d'autres véhicules dans la gamme, cela deviendra plus important.
JA. Que pense le réseau de cette Dacia Logan ?
JC. La partie du réseau que nous avons sondée est très demandeuse. Après le très grand succès que la Logan a connu dans les pays d'Europe orientale, nous nous sommes dit qu'il y avait sûrement un tel marché en Europe de l'Ouest. Nous l'avons également fait pour que d'autres circuits de distribution s'en occupent, mais aussi parce que le réseau nous l'avait demandé. Malgré son prix très serré, la Logan sera également rentable pour ce dernier. Je ne peux pas vous donner la marge car justement nous sommes en train de la discuter avec le groupement des concessionnaires.
JA. Vous qui venez des pièces de rechange, comment jugez-vous le commerce du VN en France ?
JC. Le marché de la pièce est un marché très important pour le constructeur mais aussi pour le réseau, car il représente une part importante de leur rentabilité. En arrivant dans le commerce VN en France, j'ai été frappé par la taille, le poids et la capillarité du réseau qui est, de plus, très attaché à la marque. J'ai également découvert un réseau exigeant vis-à-vis du constructeur et je crois que nous avons une dimension commune qui est d'essayer de réduire les coûts de distribution. Nous sommes sur un marché qui est extrêmement concurrentiel. A la différence de la pièce de rechange, il y a l'offre des constructeurs et celle des grossistes, ce qui fait que les constructeurs ne dominent pas comme dans le commerce VN. Pour les VN, c'est en fait sur la forme de distribution que la concurrence est très forte. Ce n'est donc pas les mêmes réflexes ni les mêmes règles du jeu.
JA. Que pensez-vous du texte européen sur la libéralisation du marché de la pièce visible ?
JC. Je pense que les constructeurs ont deux bonnes raisons de conserver leur position. Il y a d'abord un effet de taille. Par exemple, Renault a créé un site Internet, Renault Parts, qui a coûté 40 millions d'euros. Peu d'acteurs de ce marché peuvent financer un tel site. Nous avons réalisé la première année plus de 100 millions d'euros de CA sur ce site et nous devrions en faire 250 millions cette année. L'effet de taille joue incontestablement en faveur du constructeur. Deuxièmement, pour ce qui est de Renault, nous avons anticipé et développé des offres comme Renault Minute, Renault Carrosserie, mais aussi Ixell ou Motrio. D'ailleurs, le formidable succès de Motrio montre que les MRA ne veulent pas rester tout seuls, qu'ils veulent faire partie du troisième cercle de la famille. Pour conclure, je pense donc que les constructeurs ont les moyens de résister à cette ouverture. De plus, les années passant, le parc va être constitué de voitures très électroniques et technologiques, une certitude qui confère à nouveau un réel avantage aux réseaux constructeurs. Il faut maintenant que le texte de la Commission soit voté par le Parlement d'ici fin 2005, après qu'il aura pris connaissance d'un rapport commandé par la Commission sur l'aspect de la sécurité. Mais, surtout, je pense qu'il s'agit réellement d'une erreur car le but final qui est de faire baisser le prix pour le consommateur est voué à l'échec. L'exemple anglais le montre.
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