Denis Le Vot, élu Homme de l’Année 2023

Quinze ans après le lancement de la Logan, Dacia devait entrer dans une nouvelle phase de son histoire. C’était le cahier des charges que Luca de Meo, directeur général du groupe Renault, avait confié à Denis Le Vot en le nommant directeur général de la marque roumaine en 2021.

Pour celui qui a touché à peu près à tous les métiers du constructeur depuis son arrivée en 1990, le défi était de taille : faire évoluer l’image de la marque roumaine encore cantonnée dans le purement low cost vers une marque "plus cool". Changement de logo, nouveaux codes graphiques, nouvelle gamme… La rupture marketing est aussi franche qu’elle a été rapidement mise en œuvre, sous l’égide d’un Denis Le Vot résolument volontariste. Le but étant de tirer la valeur vers le haut en augmentant le prix moyen, le fameux pricing power.

Des voitures essentielles mais pas "moches"

"L’essentialité ne veut pas dire des voitures moches", résumera Denis Le Vot à des journalistes. Pour autant, l’ancien de l’École des mines ne renie pas l’héritage de Louis Schweitzer, l’architecte du rachat de Dacia en 1999 qui voulait armer Renault d’une branche entrée de gamme. L’ancien patron du groupe français avait fait le pari que l’on pouvait réussir dans l’automobile en bloquant le contenu.

Tous les consommateurs n’ont pas besoin ou envie de plus de puissance, plus d’électronique, plus de confort… pour un prix de plus en plus élevé. Même si les ingrédients ont en partie évolué, c’est toujours la même recette. Chez Dacia, tous les voyants sont au vert. La croissance des ventes est de 14,7 %, avec 658 321 unités vendues en 2023.

"Cette dynamique résulte de sa nouvelle identité de marque forte, structurée autour de ses quatre modèles piliers (Sandero, Duster, Jogger, Spring, NDLR), tous en progression par rapport à 2022", met en avant le groupe. Une performance qui permet à la marque d’afficher "des parts de marché records en Europe" et elle "confirme sa deuxième place sur le podium européen des ventes à client particulier".

La marque espère amplifier sa force de frappe avec l’arrivée au printemps d’une nouvelle génération du très populaire Duster. Dacia veut également consolider sa percée dans la voiture électrique avec une Spring largement revisitée à l’été.

Pour Denis Le Vot, la mise en œuvre de ce repositionnement stratégique d’ampleur est le couronnement d’une carrière entièrement dédiée à Renault et à l’Alliance Renault‑Nissan. Arrivé en 1990 à la direction commerciale du Losange, il rejoint quatre ans plus tard la direction après‑vente et devient chef de service du développement de produits de 2^e monte, avant d’embrasser une carrière internationale qui le conduira en Russie, en Belgique ou encore en Turquie.

Une carrière pour l'Alliance

Parmi ses récents faits d’armes, notons sa nomination en 2016 à la direction des opérations de la région Eurasie, poste qu’il assume tout en intégrant le conseil d’administration d’Avtovaz. En janvier 2018, il devient directeur général et président du comité de direction de Nissan Amérique du Nord, avant de se voir confier, en mars 2019, la direction de la division véhicules utilitaires de l’Alliance RNM.

Aujourd’hui, Denis Le Vot est plus que jamais convaincu que Dacia a toute sa place dans un marché automobile en pleine transformation. "Nous n’avons jamais eu autant besoin de créativité qu’aujourd’hui et il est clair qu’il reste beaucoup d’espace entre une voiture à 7 500 euros et la Spring à 20 000 euros, fait remarquer Denis Le Vot, directeur général de la marque lors d’un échange en juin 2023 sur le site industriel de Mioveni en Roumanie. C’est toute la question de la mobilité de demain."

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Dans un contexte de transition énergétique mais également de hausse des prix, Dacia est la mieux positionnée pour maintenir le lien avec une clientèle populaire. "À condition d’être malin", admet Denis Le Vot. Car tout le secret de Dacia réside dans sa capacité à reprendre intelligemment des technologies ou des pièces déjà rodées et amorties sur d’anciens modèles de la marque Renault. Les ingénieurs de Dacia ont une expertise enviée par les plus grands constructeurs automobiles.

"Il faut éviter de faire avec Dacia ce que Volkswagen a fait avec Skoda", met en garde Bernard Jullien, professeur d’université, spécialiste de l’industrie automobile. De fait, la montée en gamme de Skoda lui a ouvert de nouveaux marchés, mais la marque tchèque est désormais une marque généraliste avec un positionnement tarifaire moins compétitif qu’attendu auparavant. Préserver cette culture d’une automobile smart et compétitive, c’est le défi de Denis Le Vot.

Il doit néanmoins répondre aux critiques sur une Spring produite en Chine et qui n’est désormais plus éligible au bonus écologique en France. "Initialement, la Spring était une opportunité. Elle a été créée en Inde, mais électrifiée en Chine. Mais conceptuellement, la Spring est une voiture européenne. Bien entendu, on se pose tous les matins la question de sa géographie. Mais ce serait une hérésie de déménager une production en milieu de vie d’une voiture", se défend Denis Le Vot.

Pour le patron de Dacia, l’essentiel est que "même si 70 % des ventes sont sur le modèle le plus cher de sa gamme, Dacia est toujours la marque la plus abordable du marché". Mission accomplie et récompensée par ce titre  d'Homme de l'Année 2023.

Avec Catherine Leroy

Rendez-vous en avril 2024 pour la cérémonie de remise du prix et faire plus ample connaissance avec ce nouveau membre du club des Hommes de l'année. Un club ouvert en 1981 et qui compte désormais 46 personnalités du monde de l'automobile.

Le jury de l'Homme de l'Année

Taimaz Szirniks, AFP

Florence Lagarde, Autoactu.com

Stéphane Meunier, L’Automobile Magazine

Peter Sigal, Automotive News Europe

Bertrand Gay, AutoStratInternational

Julien Bonnet, BFM TV

Albertina Torsoli, Bloomberg News

Simon Chodorge, Capital

Alain‑Gabriel Verdevoye, Challenges

Lionel Steinmann, Les Échos

Aurélien Fleurot, Europe 1

Érik Bielderman, L’Équipe

Jean‑Christophe Lefèvre, Flottes Automobiles

Luc Bazizin, France Télévisions

Serge Bellu, Grand Tourisme

Sylvain Reisser, Le Figaro

Rémi Le Bailly, Investir

La rédaction du Journal de l’Automobile

Sophie Fay, Le Monde

Jean‑Rémy Macchia, Ouest France

Lionel Robert, Paris Match

Jean‑Luc Roy, RMC

Christophe Bourroux, RTL

Antoine Vermeersch, L’Usine Nouvelle

Marie Nidiau, La Tribune

Les règles du prix de l’Homme de l’Année

Depuis la création de ce prix en 1981, ses modalités d’attribution n’ont pas changé. Le Journal de l’Automobile, qui souhaite que la voix de tous les journalistes qui évoluent dans le secteur de l’automobile soit entendue, propose à cette communauté de professionnels de se prononcer sur l’Homme qui a marqué l’année qui vient de s’écouler. Deux tours sont organisés : le premier permet à chacun de promouvoir trois personnalités. Le second détermine le vainqueur.