Entretien avec Michael Schneider, président-directeur général Sixt France et Bruno Brocourt, directeur du développement Sixt France : "Notre ambition est d'atteindre les 10 % de parts de marché en 2008"
...sur le rachat d'Europcar…
Journal de l'Automobile. En guise de préambule, pouvez-vous nous présenter la nouvelle cartographie européenne de Sixt ?
Michael Schneider. Jusqu'en 1997, nous étions un groupe exclusivement allemand. Depuis, nous nous sommes ouverts à l'international et avons connu une très forte croissance. Nous sommes aujourd'hui présents dans 85 pays avec 3 500 agences et une flotte de courte durée de 150 000 véhicules. Ce qui fait de nous le 4e loueur européen en LCD. En ce qui concerne la LLD, nous avons 100 000 véhicules en parc en Europe. Et nous sommes, là aussi, en pleine croissance. Le chiffre d'affaires consolidé du groupe est de 2,350 milliards d'euros.
JA. Comment se porte Sixt sur le marché français ?
Bruno Brocourt. Nous affichons une croissance de 60 % par rapport à 2004. Nous avons désormais 85 agences sur le marché français et 200 collaborateurs qui y travaillent. Aujourd'hui, en LLD, nous avons plus de 3 000 voitures. Et c'est un chiffre en progression. Côté courte durée, nous oscillons entre 6 et 8 000 véhicules.
JA. Comment êtes-vous organisés au niveau du réseau d'agences ?
BB. 75 % de nos agences sont des franchises. Les autres sont gérées en propre. En fait, nous gérons les agences présentes dans les grandes villes. C'est ce qui explique que les agences que nous avons en gestion, réalisent 75 % de notre chiffre d'affaires.
JA. Que pensez-vous apporter au marché français ?
BB. Les clients s'adressent à nous pour trouver des véhicules un peu plus haut de gamme que chez les autres loueurs. Nous avons, en effet, un parc d'un certain standing, mais nous avons surtout des véhicules très bien équipés. Par exemple, tous nos véhicules disposent d'un GPS. C'est un service, mais ça correspond aussi à une forte demande client. De la même manière, tous nos véhicules sont climatisés. Nous essayons toujours d'apporter un peu plus. En Europe, nous sommes un peu innovateurs sur le marché. Et nous sommes reconnus comme tels, notamment sur un plan technologique.
JA. C'est-à-dire ?
BB. La force du groupe est aussi d'avoir songé à tout ce qui se passe derrière le comptoir. Notre site Internet est, par exemple, très performant. Notre système de délivrance de clé est totalement autonome. Un client qui a notre carte Sixt Express réserve un véhicule, passe par la borne de délivrance, généralement implantée dans les aéroports, puis il prend sa voiture directement. Cela existe chez nous depuis plus de dix ans. Et nous restons persuadés que plus nous amenons de technologie, plus nous gagnons en rapidité pour le client, donc en productivité pour nous.
JA. Peut-on dire que Sixt ne vise que des entreprises ou des clients aisés ?
MS. Ce n'est pas parce que nous avons des Mercedes et d'autres véhicules haut de gamme en parc que nous n'avons que des clients huppés. Nous nous intéressons à tout le monde. Sur le marché, on se rend compte que ceux qui se sont spécialisés ont aujourd'hui des difficultés. Notre intention est donc de répondre à l'ensemble des demandes "clientèle". La philosophie du groupe tient en une phrase : "Le client est notre boss".
JA. Quelles orientations le groupe compte-t-il suivre cette année ?
BB. En 2006, notre grand projet est d'intégrer les gares. Comme tous les loueurs, la majeure partie de nos locations intervient après des déplacements. Qu'il s'agisse d'avion ou de train. Il faut savoir que les trajets en train représentent 21 % des dépenses qu'une entreprise effectue pour la mobilité de ses employés. (NDLR : L'avion représente 49 %). Notre volonté est donc d'adosser Sixt au TGV.
JA. De quelle manière cela va-t-il se traduire ?
BB. Nous voulons développer notre réseau de franchisés en France, mais pas de n'importe quelle façon. Nous ne voulons pas ouvrir des points pour pouvoir dire que nous sommes présents. Nous sommes plutôt dans une optique de "recrutement de franchise". Nous voulons des gens intégrés à notre philosophie. Et comme il est bien souvent difficile de changer ses habitudes, nous préférons la création de franchise à la reprise. C'est pour cette raison que nous prenons le temps. En ce moment, nous sommes, par exemple en phase de recherche active sur le Nord de la France et dans la région de Rouen.
JA. Vous êtes-vous fixés des objectifs chiffrés ?
MS. Notre ambition est d'être un leader sur le plan européen. Aujourd'hui, nos concurrents ont en moyenne 500 points de vente. Nous espérons, quant à nous, atteindre les 200 points de vente d'ici 2008. En France, notre ambition est ainsi d'obtenir 10 % de part de marché en 2008.
JA. Pourriez-vous nous donner de plus amples détails sur Sixti ?
BB. C'est un produit que nous avons lancé en mai 2003. Nous avons 60 points de vente Sixti en Europe, dont 12 en France, pour un parc de 3 000 véhicules. C'est un concept tout à fait corporate, uniquement répandu chez les franchisés italiens. Nous réalisons sur ce produit 15 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel.
JA. Comment s'organise le réseau Sixti par rapport Sixt ?
BB. En réalité, Sixti est une marque commerciale. Ce n'est pas un réseau d'agences à part entière. C'est d'avantage un produit disponible dans certaines agences du réseau Sixt. Au-delà du concept "low cost", c'est un produit facile d'accès et très flexible. Nos véhicules sont réservables à tous moments de la journée. C'est un produit qui se focalise sur les grandes villes. Je dirais même que c'est assez parisien, même si nous sommes également présents sur la Côte d'Azur.
JA. Comment pouvez-vous afficher de tels prix ?
MS. Nous jouons sur la structure, la gestion et la productivité du parc. Pour être tout à fait clair, il faut que nous ayons le meilleur taux d'utilisation du parc possible. Les conditions d'achats sont exactement les mêmes que pour Sixt. Ce n'est pas sur ce point que nous réussissons à faire baisser le prix. C'est en fait en réduisant la structure de traitement que cela est rendu possible. Le paiement, la préparation…
JA. Pensez-vous qu'il y ait un vrai marché pour la location de voitures low cost ?
MS. Au même titre que pour le transport aérien, je pense que c'est un marché qui sera toujours limité. Les compagnies aériennes estiment, par exemple, que le marché low cost ne dépassera jamais les 21 % du marché français. Dans l'automobile, le low cost restera également une niche et stagnera, à mon avis, autour des 20 %.
JA. N'est-ce pas aussi une manière de toucher une autre clientèle ?
BB. Pour nous, c'est davantage une manière d'amener les gens à louer des voitures. Il faut savoir qu'en France, seuls 7 % de la population a déjà loué une voiture dans sa vie. Sixti vise donc à attirer une nouvelle clientèle.
JA. Finalement, vous ne communiquez pas beaucoup sur ce produit ?
BB. Aujourd'hui, nous sommes les seuls en Europe à avoir un vrai système low cost. Et nous avons, en effet, pris le parti de ne pas communiquer davantage. En fait, c'est en voyant les Smart à nos couleurs que cela a fonctionné. Notre meilleure pub sont nos voitures. Notre succès se fonde avant tout sur le bouche à oreille.
JA. La nouvelle TVTS : bonne ou mauvaise chose ?
MS. Avec la taxation des indemnités kilométriques, cela peut-être une belle opportunité pour le LCD. C'est une évolution importante. C'est, en tous les cas, une niche de progression.
JA. Justement, comment voyez-vous l'avenir de la location en France ?
MS. En termes de prestation, nous devons préserver notre concept de mobilité. En revanche, côté prestataires, je pense qu'il y a encore beaucoup trop d'acteurs sur le marché français. Il y aura donc forcément une évolution et certainement sous la forme de concentrations diverses.
Propos recueillis par David Paques
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