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Industrie

Un nouvel élan pour le recyclage des batteries en France ?

Publié le 23 juin 2025

Par Christophe Jaussaud
5 min de lecture
Après l’abandon de projets d'envergure, portés par Stellantis, Orano, Suez ou Eramet, la filière du recyclage des batteries tente de trouver un nouvel élan. La start-up Battri vient d'inaugurer, dans le nord de la France, une usine de traitement des précieux accus. D'autres projets devraient bientôt se concrétiser.
Battri a inauguré, vendredi 20 juin 2025, sa première usine de recyclage de batteries automobiles. ©Compte LinkedIn de la Communauté Urbaine d'Arras

À l'avenir, pour retrouver un semblant de souveraineté dans les matériaux critiques, le recyclage des batteries en Europe sera indispensable.

 

Après l'abandon de certains projets dans l'Hexagone, la start-up Battri vient d'atteindre un premier palier en inaugurant son premier site de recyclage de batteries automobiles. Il se situe dans le Pas-de-Calais et s'étend sur un terrain de 15 000 mètres carrés.

 

Elle produira à Saint-Laurent-Blangy de la "black mass", une poudre noire de minéraux et métaux mélangés, premier maillon vers une circularité totale des batteries. Outre le nickel, le cobalt, le lithium, le manganèse et le graphite contenus dans les batteries, l'usine, qui devient ainsi une sorte de mine urbaine du XXIe siècle, recueillera aussi du cuivre, de l'aluminium et des polymères.

 

Deux projets suspendus dans le Nord

 

Le projet de la start-up, qui a levé 20 millions d'euros, remplace pour l'instant deux autres projets industriels annoncés dans le nord également, puis suspendus sans tambour ni trompette fin 2024 par Suez-Eramet d'un côté, et Stellantis associé à Orano de l'autre.

 

 

D'autres projets sont dans les starting-blocks comme celui de la start-up lyonnaise Mecaware qui prévoit de s'installer à Béthune pour raffiner des métaux issus de batteries sur le site de l'ex-usine Bridgestone fermée en 2021.

 

Ou celui du groupe français de traitement des déchets et de recyclage Derichebourg qui a annoncé en mai un partenariat avec le fabricant de batteries coréen LG pour construire une usine de black mass à Bruyères-sur-Oise (95).

 

Au service de la souveraineté

 

"Il y a sept ans, il n'y avait aucune usine de batteries électriques en France, c'étaient des Japonais, des Coréens et des Chinois qui fabriquaient", a rappelé la ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher lors de l'inauguration.

 

L'usine Battri est située dans la "vallée de la batterie" du nord de la France, tout près des usines que le gouvernement a aidé à faire sortir de terre depuis sept ans : ACC, AESC, Verkor et Prologium.

 

©Compte LinkedIn Agnès Pannier-Runacher

 

"Avec ce site nouveau, nous avançons dans la construction d'une filière complète qui va nous permettre au-delà de la fabrication, de recycler les batteries et les déchets des usines de construction de batteries", a-t-elle ajouté, afin à la fois de "réindustrialiser le pays" et "baisser nos émissions de gaz à effet de serre".

 

 

Ces projets sont permis notamment par le nouveau règlement européen sur les métaux critiques (CRMA) entré en vigueur le 23 mai : le recyclage des matières premières critiques contenues dans les batteries des véhicules électriques est désormais facilité.

 

D'ici à 2030, le CRMA préconise que 25 % des métaux critiques soient issus de matières recyclées en Europe, que 40 % des métaux critiques importés soient raffinés sur le continent et que 10 % soient extraits de mines européennes.

 

Objectif avoué : tenter de rééquilibrer la souveraineté de l'Europe dans un domaine dominé par la Chine.

 

Autre élément encourageant : à partir du 18 août, une nouvelle filière REP (Responsabilité élargie du producteur, qui signifie l'adoption d'un principe de pollueur-payeur pour le traitement des batteries en fin de vie) sera mise en place pour les batteries automobiles, qui jusqu'à présent n'en avaient pas.

 

Et les déchets deviendront des ressources industrielles. Avec la nouvelle REP, "on va multiplier par dix l'accès à la ressource", a dit Agnès Pannier-Runacher.

 

Dans l'attente de clients

 

Reste qu'il manque des cases en Europe pour atteindre la circularité, c'est-à-dire pour pouvoir produire des batteries neuves à partir de matériaux recyclés.

 

En particulier, l'Europe manque de producteurs de précurseurs d'anode ou de cathode, les matériaux actifs utilisés pour les batteries, produits à partir de sulfate ou d'hydroxyde de nickel, de cobalt ou de manganèse issus de la black mass, une industrie très majoritairement chinoise.

 

Lors de la suspension de son projet d'usine hydrométallurgique de recyclage de batteries pour véhicules électriques près de Dunkerque en octobre, associé à Suez, le groupe Eramet avait cité le manque de marché en Europe comme principale raison de sa décision.

 

Raison pour laquelle, dans un premier temps, Battri, start-up plus agile et aux coûts fixes plus bas que ceux des industriels bien établis, vendra sa black mass aux États-Unis ou en Corée, en attendant que des usines de fournisseurs de matières actives émergent en Europe.

 

La Commission européenne espère pouvoir introduire des clauses dans les marchés publics incluant une dimension de recyclage obligatoire dans les batteries produites en Europe, pour pouvoir soutenir l'émergence d'une telle filière industrielle, avait laissé entendre le commissaire chargé de l'Industrie Stéphane Séjourné en mars, lors d'une visite de l'usine Renault de Douai. (avec AFP)

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