Contenu local : le coup de poker de la France face à l'échéance 2035

Officiellement la France s'est prononcée en faveur de l'échéance 2025, en se rangeant aux côtés de l'Espagne et contre la position défendue par l'Allemagne et l'Italie… Mais tout repose sur la subtilité de la négociation et la lecture de la position entre les lignes. Une sorte de "en même temps" qui n'a cependant pas manqué de provoquer la colère et l'exaspération de la filière industrielle automobile.
La position française s'est ainsi clarifiée lors de la Journée de la filière automobile puisque la négociation avec la Commission européenne repose désormais sur le sujet du contenu local dans les voitures européennes.
Pour résumer, la France acceptera des flexibilités, notamment au niveau des hybrides rechargeables ou des REEV souhaitées par les constructeurs allemands, à condition que ces derniers acceptent également une protection de l'industrie automobile européenne avec un minimum de contenu local.
"Nous devons avoir une réelle préférence pour le fabriqué en Europe, afin que nous puissions nous battre avec nos propres armes. Le libre-échange ne fonctionne que si tout le monde joue avec les mêmes règles", a affirmé Roland Lescure, ministre de l'Économie. Une sorte de réponse au discours d'Olä Kallenius, président de l'ACEA. Ce dernier intervenait en fin de matinée devant les industriels réunis à la Journée de la filière automobile. Et il n'a d'ailleurs pas pris de pincettes en évoquant la notion de contenu local réclamée par l'industrie automobile, mais surtout par les équipementiers.
"Quel que soit le type de distorsion, quelle que soit la méthode utilisée, au final cela consiste à ériger un mur et instaurer un tarif douanier. Dans ce monde complexe, nous devons nous efforcer de défendre au mieux le libre-échange. Si un contenu local est mal fait, cela peut également alimenter l'inflation", avance-t-il.
Mais comment calculer le contenu local ?
Comme d'habitude, le diable se cache dans les détails et, même au sein des industriels automobiles, constructeurs et équipementiers ne partagent pas la même vision de ce qu'est un contenu local et comment il doit être défini.
Pour l'industrie et notamment les équipementiers, ce contenu se définit par la valeur ajoutée économique qui se trouve à différents niveaux comme la production de composants, l'assemblage… un taux minimal de valeur ajoutée locale compris entre 65 et 70 % permettrait de définir si un véhicule est made in Europe ou non.
Mais cette vision n'est pas partagée par tous les acteurs et François Provost, directeur général de Renault, estime que cette valeur ajoutée doit être de 60 % et qu'il faut la calculer sur une moyenne des immatriculations réalisées en Europe.
Un sujet crucial qui va faire l'objet d'âpres négociations dans les semaines à venir. Car il déterminera également les aides fiscales accordées par l'Europe, les supercrédits que pourrait accepter la Commission européenne dans le calcul des émissions de CO2, voire le soutien aux commandes publiques européennes !
La France compte obtenir gain de cause en jouant sur tous les fronts et en utilisant tous les leviers possibles. Y compris celui des données (Data Act), ou encore du recyclage des batteries.
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