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Industrie

Christophe Périllat : "Valeo est au cœur du véhicule de demain"

Publié le 25 mai 2022

Par Catherine Leroy
7 min de lecture
Le nouveau directeur général de Valeo va accompagner la croissance et le nouveau plan stratégique qui va guider le groupe pour les trois ans à venir. Mobilité électrique, voiture autonome, électronique... L'équipementier déborde désormais de son champ d'action traditionnel pour devenir un acteur à part entière des nouvelles mobilités.
Christophe Périllat, directeur général de Valeo.

Journal de l'Automobile : Les marchés automobiles souffrent toujours de la pénurie de semi-conducteurs qui pénalisent la production. Quelle visibilité avez-vous sur le niveau d'approvisionnement ?

Christophe Périllat : Les marchés restent bons malgré des capacités de production réduites. Au final, nous voyons que 13 millions de voitures n’ont pas été produites à cause des deux années où la pandémie a sévi. Sur le premier trimestre 2022, les pertes de production sont estimées entre 1,5 million et 1,6 million de véhicules, pour des raisons bien connues désormais. 70 % de ces non-productions trouvent leur cause dans la pénurie de semi-conducteurs, le reste étant à mettre au compte du Covid en Asie pour 18 % d'entre elles et 13 % à cause de la guerre en Ukraine. Il faut plus de quatre ans pour construire une nouvelle usine de semi-conducteurs et deux années pour augmenter la capacité d’une usine existante. A la fin de l’année 2022, les premières capacités additionnelles se mettront en place. Aujourd’hui, nous le voyons, l’automobile a bénéficié d’arbitrages supplémentaires, favorables de la part de ces producteurs et de nouvelles capacités ont donc été allouées. Valeo, qui est un grand électronicien, consomme près de 250 millions de composants par jour. Nous sommes un grand acheteur et donc nous vivons à plein cette crise depuis 2021.  Mais globalement la situation s’améliore trimestre après trimestre.

 

J.A. : L'invasion de l'Ukraine par la Russie vous a-t-elle obligé à revoir les risques géopolitiques dans les différentes régions du monde où Valeo est présent ?

C.P. : Nous regardons beaucoup plus les risques géopolitiques, c'est certain, car dans l’industrie, chaque pièce compte et peut faire dérailler la production en cas de manque. Notre objectif est de protéger les usines.

 

J.A. : Le cours des matières premières flambe. Quels sont les impacts sur votre activité et les conséquences sur les prix des véhicules pour les clients finaux ?

C.P. : L’industrie automobile travaille très dur pour baisser les coûts de l’électrification des véhicules et ce travail doit être fait pour amener les innovations, les nouvelles technologies, à des prix de marché qui permettent la production de masse. En parallèle, effectivement, notre industrie subit une hausse des coûts matières premières : le prix de l’acier a été multiplié par trois, celui de l’aluminium augmente également tout comme le prix du pétrole. La seule possibilité est que l’ensemble des surcoûts qui pèsent sur les équipementiers soit passé au client. C’est normal. Nous ne pouvons pas vendre de l’acier et en donner 40 %. Bien sûr, toute l’industrie travaille à baisser ces coûts mais la réalité économique est bien présente. Nous avons des discussions constructives avec les constructeurs sur ce sujet. Nous leur expliquons avec beaucoup de transparence car au final il faudra que la transmission de ces hausses de prix soient passées à 100 % au client. Nous avons déjà estimé l’impact net de l’inflation à 200 millions d’euros sur les résultats de Valeo pour 2022.

 

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J.A. : Vous êtes partenaire de Renault pour la fabrication d'un moteur électrique sans terres rares. Est-ce une solution pour, à l'avenir, échapper à cette dépendance en matières premières dont le prix et l'extraction font débats aujourd'hui ?

C.P. : Deux constructeurs dans le monde actuellement travaillent sur des moteurs électriques qui n’utilisent pas de terres rares : Renault et BMW. Développer une technologie qui permet d'échapper au risque d’approvisionnement ou même de la volatilité des prix est un véritable atout. Les terres rares sont au cœur de l’électrification du marché et l’arbitrage sur ces technologies développées par Valeo se fera en fonction de la disponibilité et du prix.

 

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J.A. : La fonction éclairage fait l'objet de toutes les attentions et de beaucoup d'investissements chez les équipementiers. Quels sont les enjeux ?

C.P. : Valeo a toujours été convaincu que l’éclairage était un business très intéressant. D’autant plus intéressant quand le véhicule devient électrique car l’éclairage gagne du territoire à l’avant et à l’arrière, des espaces entiers se libèrent pour l’éclairage qui devient une réelle signature pour une marque et ses modèles. Nous assistons à une montée en puissance des leds, qui deviennent de plus en plus intelligents, permettent de projeter des informations utiles sur le route. L’éclairage devient une fonction d’aide à la voiture, déborde de son territoire, de sa simple fonction. C’est un métier d’optique qui devient de plus en plus un métier d’électronique, auquel nous croyons beaucoup et d'ailleurs Valeo est un acteur mondial de cette fonction.

 

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J.A. : Votre plan stratégique pour 2025, Move Up, se base justement sur cette fonction. Quelles seront les implications pour les autres métiers de Valeo ?

C.P. : Il faut comprendre que la voiture de demain sera électrique, avec un niveau d’assistance de plus en plus intuitif, plus épuré, qui aura besoin d’une signature, d’un style. Nous avons défini notre plan stratégique à partir de cette transformation. Notre plan Move Up 2025 définit notre mission afin de permettre cette mobilité dans l’électrique, en accélérant dans le domaine des Adas avec l’éclairage et en réinventant cette interaction permanente entre le conducteur et la voiture. Les écrans, les commandes, la réalité augmentée… c'est ce que permettra le software dans l’automobile. Il s’agit d’une couche logicielle que les constructeurs feront mais que d’autres proposeront également. Les Adas vont apporter tous les capteurs nécessaires pour percevoir l’environnement, comment avancer dans une ville ou sur une simple route. Nous avons des capteurs dans toutes les technologies et il ne faut pas oublier que si le véhicule autonome existe, car il existe déjà, le pas a été franchi notamment en Allemagne, c’est parce qu’il y a de l’intelligence mais aussi les capteurs que nous proposons.

 

J.A. : Vous maîtrisez la technologie LiDAR depuis de nombreuses années. Quelles sont les avancées en la matière ?

C.P. : Nous avons pris la décision, il y a douze ans maintenant d'investir dans cette technologie avec la vision stratégique que le niveau 3 de l'autonomie des véhicules ne pourrait être atteint sans la maîtrise de cette technologie. Aujourd'hui, nous disons la même chose qu'il y a douze ans. Sans LiDAR, certains objets ne peuvent pas être détectés. Dans la voiture autonome, 99 % de la technologie est finalement assez simple à maîtriser mais pour atteindre 100 %, nous avons besoin de capteurs redondants et précis. A ce titre, la troisième génération de LiDAR apporte une résolution presque 300 fois supérieure à celle obtenue avec la deuxième génération. C'est une technologie évolutive qui nous donne cette force et une très belle avance sur nos compétiteurs.

 

J.A. : Valeo a entamé une diversification en dehors de l'automobile pour d'autres formes de mobilité.  Où en êtes-vous ?

C.P. : Valeo aura 100 en 2023. Nous ne sommes plus uniquement un équipementier du secteur automobile mais bien à la source d'une nouvelle forme de mobilité. Nous maîtrisons les technologies pour une mobilité adjacente à l'automobile. Tout ce qui est électrique et "mobile", nous intéresse, que ce soit les deux roues, trois roues où de petits véhicules urbains. Nous travaillons ainsi dans le domaine du vélo, secteur où les volumes sont très importants, et où les technologies de Valeo trouvent facilement leur place. 14 clients dans ce domaine nous font déjà confiance et les premières livraisons vont arriver cette année notamment grâce à un moteur électrique à 7 vitesses.

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