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Distribution

Les distributeurs mitigés sur la nouvelle édition du Mondial de l'Automobile

Publié le 19 octobre 2022

Par Louis Choiset
7 min de lecture
De retour après quatre ans d’absence, le Mondial de l’Automobile laisse sur leur faim certains professionnels. Entre inquiétude, déception et nostalgie, des distributeurs ont réagi à cette nouvelle édition marquée par le désistement de nombreux constructeurs européens, laissant la place aux ambitions chinoises.
Les groupes de distribution pointent du doigt le manque de constructeurs sur le Mondial de l'Automobile 2022.

"Je viens au Mondial depuis mes 14 ans et chaque année je m’attends à une vraie fête de l’automobile. Cette édition est très timide, il y a très peu de constructeurs présents et moins de spectacle", déclare Bertrand Jouffrault, directeur Citroën DS Dijon du groupe JMJ, comme pour annoncer la couleur de la première journée de Mondial.

 

A l’heure où les journalistes commencent à quitter les lieux, ils laissent derrière eux un salon où l’ambiance festive attendue monte peu à peu. C’est autour d’un verre, musique en fond, que les distributeurs se rassemblent sur les différents stands des constructeurs. L’heure est aux retrouvailles avec, comme grand sujet de conversation, cette édition du Mondial.

 

"C’est la kermesse de l’automobile", plaisantent certains, pendant que d’autres regrettent avec nostalgie les années passées. "Moi qui ai connu pendant 25 ans le Mondial de l'Automobile, c'est toujours un peu triste de voir une désaffection de ce salon très important. Aujourd'hui, il va falloir se servir d'autres médias pour pouvoir montrer nos produits et les nouveautés", témoigne Nicolas Bernard, directeur général de Prestige Auto Rochelais. Un sentiment partagé par Franck Revert, directeur DB77 du groupe Riester : "Avant c'était un salon de 15 jours, là, c'est une semaine. Il se déroulait dans les grands halls et aujourd’hui ce sont de plus petits. J’ai longtemps travaillé pour Peugeot et nous avions l’habitude d’une grande fête, nous voyons désormais un stand de la marque bien plus réduit."

 

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Au fil de la soirée et des discussions, le coupable de cette amertume se dessine peu à peu. La principale raison évoquée est l’absence de constructeurs historiques français, à l’image de Citroën, mais aussi européens comme le groupe Volkswagen, BMW, Volvo ou encore Mercedes. Ils manquent à la fête, préférant la faire ailleurs.

 

"C'est toujours un plaisir d’y être invité, cependant ce salon est plus triste qu'à l'habitude parce que moins d’acteurs et moins de marques. Il s'agit d'un grand rendez-vous pour l’automobile, c’est donc dommage pour le secteur. Les constructeurs ont fait des choix qui étaient les leurs et il y aura peut-être une perte de repères pour les clients", pense François Parascandola, président du groupe éponyme. L’absence de ces grands acteurs laisse donc la place à d'autres.

 

La présence massive des constructeurs chinois

 

Alors que la soirée suit son cours autour des stands de Renault, DS et Peugeot, les langues se délient au sujet de l’autre grand événement du salon : la forte présence des constructeurs asiatiques. Entre les chinois BYD, MG Motor, Great Wall Motors, Seres et le Vietnamien Vinfast, ces acteurs occupent des stands aussi grands que ceux des constructeurs historiques européens.

 

Une première pointée du doigt par Bertrand Jouffrault :"Les constructeurs asiatiques ont pu profiter de la porte ouverte par les constructeurs européens. L’industrie européenne laisse la place aux nouveaux venus. Ils ont aussi bénéficié de l’opportunité laissée par l’Europe qui se désindustrialise complètement. Cet événement met l’automobile au centre des débats mais nous sommes en France et avec le peu de marques françaises représentées, il ne faudrait pas que cet événement devienne le salon de Shanghai ou de Pékin". Il ajoute : "En tant que distributeurs, nous ne sommes pas inquiets, si ce n’est pas avec des marques françaises et européennes, nous travaillerons avec ce qui est présent sur le marché. Nous sommes ouverts mais ce serait dommage pour l'industrie nationale."

 

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D’autres, comme François Parascandola, voient la chose avec plus d’intérêt que d’inquiétude. "Nous observons la confrontation entre les constructeurs français et les trois gros constructeurs chinois qui leur font face. Nous allons volontiers voir ce qu’il se fait sur leur stand car c’est très intéressant. Il ne faut pas mésestimer ces acteurs-là, ils ont une faculté à construire, à être réactifs et à s'adapter, comme MG l'a fait et comme BYD est en train de le faire. Il faut les regarder de près et peut-être prendre des positions avant que les autres ne le fassent à notre place."

 

Un intérêt déjà bien intégré par certains distributeurs français qui travaillent déjà avec des marques chinoises. C’est le cas du groupe Peyrot, qui possède trois contrats avec la marque MG à Toulouse (31) et Brive (19). "Lorsque nous distribuons une marque qui représente 2,5 à 3 % du marché, en mettre une autre à côté permet de mutualiser les forces. Les chinois arrivent avec des modèles inspirés de ce qui a déjà été fait mais ils sont beaucoup moins chers. Il y a un engouement certain, mais est-il durable ? En tout cas, cela nous a permis d’élargir l’offre sur de petits sites", déclare Rémi Peyrot, directeur général du groupe.

 

De nombreux enjeux

 

Malgré un sentiment général de déception, cet événement continue de nourrir de nombreuses attentes de la part des distributeurs. Notamment ceux de la marque Jeep, peu représentée sur le marché français. Une image que Franck Revert espère voir évoluer grâce à ce salon. "Pour une marque comme Jeep, assez peu connue en France, c'est l’occasion d’un renouveau. Jeep est plutôt perçue comme une marque avec de gros moteurs essence, et là nous débarquons avec un SUV 100 % électrique, l'Avenger, qui possède une grosse autonomie pour sa taille. C’est une opportunité pour une marque qui représente moins de 1 % du marché et qui a besoin de changer son image."

 

Ce n’est d’ailleurs pas le seul événement pour la marque sur ce salon, comme l’explique Nicolas Bernard : "Les attentes autour de ce salon étaient nombreuses. Principalement la rencontre avec Christian Meunier, qui est le patron de Jeep. Nous sommes venus avec beaucoup de questions sur l'avenir de la marque."

 

DS fait également partie de ces marques qui attendent beaucoup du salon. Notamment au niveau de la notoriété à entendre Michel Varziniac, directeur d'une concession Citroën et DS à Beaune (21) pour le groupe Chopard : "Cet événement est l’occasion de donner de la visibilité à une marque encore jeune comme DS, qui continue son chemin pour se faire connaître du plus grand nombre. Avec un beau stand, la marque peut profiter de ce salon qui est censé faire rêver. Le regret, c’est sur l’environnement autour du stand."

 

L'occasion de se retrouver

 

Au milieu de ces discussions critiques à l'égard de ce début de Mondial, les distributeurs se réjouissent malgré tout de certains aspects du salon. "Il est intéressant de voir cette culture automobile qui change. Cette nouvelle mobilité qui interpelle et la manière de commercialiser les véhicules aujourd'hui, demain et après-demain. Cela permet de revenir chez nous, dans nos affaires, et de nous dire, là, il faut travailler autrement et différemment”, témoigne Ivan Pariset, directeur de plaque Pays de Gex chez Jean Lain Mobilités.

 

L’occasion d’apprendre, mais aussi de se retrouver et de partager de bons moments. "Nous sommes heureux de renouer avec la tradition même si le salon ne dure qu’une semaine et qu’il n’y a pas tout le monde. L’idée est de se retrouver, on se connaît tous, le réseau est petit, nous voulons aussi repartir avec une motivation supplémentaire en voyant tous ces nouveaux modèles", se réjouit Rémi Peyrot. François Parascandola ajoute : "C'est un moment de partage aussi pour le réseau, une occasion de se voir. Les réunions étaient moins fréquentes ces derniers temps, laissant place aux visioconférences. Nous sommes heureux de nous retrouver, constructeurs et concessionnaires."

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