Groupe Dubreuil : presque un siècle au service du commerce
La page d’accueil de son site Internet donne le ton, le groupe Dubreuil ne se contente pas de figurer parmi les plus importants distributeurs Stellantis de France, d’être le premier opérateur Opel, mais il est aussi fortement implanté dans l’aérien avec Air Caraïbes, le matériel BTP, le machinisme agricole, les énergies et dans une moindre mesure, dans le poids lourd et l’hôtellerie. Une activité protéiforme très rare dans le commerce automobile.
Seul le groupe normand Vikings affiche un profil similaire avec une présence dans d’autres secteurs, en l’occurrence, l’hôtellerie et les casinos. "Une gymnastique d’esprit passionnante et des directeurs d’activité très compétents", résume Paul‑Henri Dubreuil, depuis douze ans à la tête du groupe vendéen fondé par son grand‑père en 1924 à La Roche‑sur‑Yon (85).
Sept activités
Sur ces sept métiers, l’automobile est majoritaire. Ce département représente, en effet, 36 % des 2,7 milliards d’euros de chiffre d’affaires du groupe réalisé en 2022. Une activité pour autant relativement récente au regard de l’ancienneté du groupe qui a commencé dans l’épicerie en gros. C’est d’ailleurs le désengagement dans la distribution alimentaire dans les années 80, initié par Jean‑Paul Dubreuil, le père de Paul‑Henri, qui a permis au groupe de se développer dans l’automobile.
L’aventure a commencé avec BMW pour très vite se poursuivre avec Peugeot (en 1987) qui deviendra la marque leader, suivie dans les années 2000 par la distribution d’Opel, puis plus récemment de Citroën.
"Contrairement à d’autres groupes, nous n’avons pas cherché à nous diversifier en prenant d’autres marques, note Paul‑Henri Dubreuil. Probablement parce que la diversification, nous l’avons déjà avec toutes nos autres activités au sein du groupe !"
Cette stratégie de ne commercialiser que peu de marques, et toutes du même groupe, tombe à point nommé. Surtout lorsque l’on est distributeur Stellantis. "Cela permet de créer des synergies très fortes, notamment sur le back‑office et sur les coûts de structure, indique le dirigeant. Mais elles ne sont pas automatiques. Regrouper les marques au sein d’un même site peut être intéressant pour des raisons d’économie d’échelle. Pour autant, nous constatons que sur l’activité VO, cette politique n’est pas si profitable que ça."
Et de donner un exemple s’appuyant sur sa récente expérience à Chartres (28) à la suite de la création de son village Stellantis. "Si la concentration est très positive sur l’activité après‑vente, elle l’est beaucoup moins pour l’occasion, car les clients ont l’impression d’avoir moins le choix, constate‑t‑il. Abriter Opel chez Peugeot ou Citroën a du sens car cela permet de donner de la visibilité à la marque, mais regrouper Peugeot et Citroën sur un même site, et notamment dans les grandes villes, me paraît moins pertinent."
Il prône donc plus une approche pragmatique, adaptée à la géographie et aux habitudes de consommation locales, qu’un développement monosite uniforme.
Un VO important
Au sein du groupe Dubreuil, le VO a toujours été une activité soutenue, source de rentabilité. "Nous disposons de trois sites de préparation VO, présente Paul‑Henri Dubreuil. Le premier a été ouvert en 2007 aux Essarts (85). Le second, situé au Mans (72), date de 2020 et nous allons inaugurer un troisième, à Saint‑Porchaire (17) cette année."
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Depuis longtemps, le groupe a mis en place un site Internet manouvellevoiture.com, ainsi qu’une application qui lui avait d’ailleurs permis de remporter le prix de l’Innovation Occasion lors de l’édition 2021 des Grands Prix de la Distribution Automobile du Journal de l’Automobile. "Notre stratégie est d’avoir des VO prêts à partir avec un haut niveau de qualité", souligne le dirigeant.
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Si le VO a toujours été complémentaire de l’activité VN, Paul‑Henri Dubreuil estime qu’il l’est encore plus dans une période de très forte hausse des prix : "Il permet d’équilibrer l’activité dans un moment où, en plus de l’inflation, les interrogations de la part des clients sont légion."
Vers un marché tendu
Le dirigeant est, en effet, préoccupé par la situation. "Nous sommes passés d’une activité où, pardonnez‑moi l’expression, on poussait de la tôle à une situation où les prix des voitures augmentent et les offres commerciales baissent, résume‑t‑il. Si les marges unitaires par véhicule augmentent, en tant que commerçant, je ne peux me réjouir de vendre moins."
Sur deux ans, ses volumes Peugeot et Opel ont baissé respectivement de 23 et 21 %. Et de résumer la situation. "Si le marché national tourne autour de 1,5 à 1,6 million de véhicules annuels, et je pense que nous allons structurellement vers cette tendance, nous allons devoir apprendre à vivre différemment."
Une approche qui n’est pas sans conséquence d’autant plus que "les constructeurs ont pris l’habitude d’afficher des marges importantes, ce qui risque de ne pas durer. Je pense qu’ils vont devoir apprendre à rouvrir les vannes de la remise, même si nous ne reviendrons pas à ce que nous avons pu connaître avant la pandémie".
D’un point de vue distribution, cette réduction du marché va accélérer la concentration des acteurs. "Mais d’une manière générale, quelle que soit la taille de notre activité, notre assurance vie, c’est d’être avant tout performants", insiste‑t‑il.
Être commerçant avant tout
Car aussi important soit le groupe, Paul‑Henri Dubreuil n’oublie pas qu’il est un commerçant avant tout, faisant perdurer ainsi l’ADN de l’entreprise. Le groupe, qui fêtera l’année prochaine son siècle d’existence, a toujours été distributeur de produits de grande consommation. D’abord dans l’épicerie en gros en 1924, comme nous l’avons vu plus haut, puis en 1935, l’activité se développe avec la distribution de vin en gros, puis dans les années 50, la distribution de carburant, suivie vingt ans plus tard par l’ouverture d’un supermarché à Luçon (85).
D’où l’importance d’avoir une relation forte avec le client. "Je ne remets pas en cause le digital, mais on observe que pour le VN, ce canal de vente ne prend pas du tout, commente‑t‑il. L’achat d’une automobile est impliquant, le client a besoin de proximité, de conseils et encore plus aujourd’hui dans cette période de transition. La relation client, on ne la sous‑traite pas, c’est le cœur de notre métier. Au final, je ne pense pas que le digital soit un danger pour les distributeurs comme certains ont pu le craindre."
Car l’humain est au cœur des préoccupations du groupe. Une approche peut‑être maintes fois entendue chez les distributeurs mais dont l’organisation même du groupe l’illustre. "Ne distribuer que quelques marques permet non seulement de réduire les charges comme nous l’évoquions, en mutualisant toutes les fonctions support, mais cette politique libère surtout les directeurs de concession des tâches administratives. Cela leur permet de se concentrer sur le commerce et les services afin de répondre aux attentes de nos clients", illustre Paul‑Henri Dubreuil.
Se structurer pour améliorer sa performance
Il ne voit pas non plus d’électrification à marche forcée. "Vendre de force à un client un produit qu’il ne veut pas ou dont il n’a pas besoin risque de tendre le marché pendant de nombreuses années, met‑il en garde. J’observe encore beaucoup de freins, notamment psychologiques, mais pas seulement. La difficulté par exemple de se recharger dans les habitats collectifs inquiète beaucoup d’automobilistes."
Pour pallier les incertitudes du marché, le groupe Dubreuil s’est appuyé sur les ventes à professionnel qui ont fortement progressé l’année dernière. Pour Peugeot, leur part de marché est passée entre 2020 et 2022 de 55 à 61 % et pour Citroën, elle a bondi de 45 à 58 %. "Nous sommes structurés autour d’une organisation centrale afin d’être les plus performants", précise‑t‑il.
Vers le milliard
Le groupe ne prévoit pas de représenter d’autres marques du groupe Stellantis, "même si nous allons prochainement distribuer des pièces pour les marques ex‑FCA", présente‑t‑il. Paul‑Henri Dubreuil a développé sa présence en décembre dernier en intégrant au sein des entités Clara (Peugeot) et Claris (Citroën), l’intégralité des affaires Peugeot, Citroën et DS Automobiles du groupe rochelais Michel. Dans le détail, il s’agit des concessions Citroën de Charente‑Maritime (17), celles de La Rochelle, Rochefort, Saint‑Jean‑d’Angély, Saintes et de Royan. S’ajoutent celles situées dans l’Indre (36), à Châteauroux, et dans la Creuse (23), à Guéret.
Le groupe vendéen a également intégré les concessions DS Automobiles de La Rochelle et de Royan, ainsi que le point de vente Peugeot à Guéret. L'ensemble pèse 3 500 Citroën, 500 Peugeot et 200 DS Automobiles pour un chiffre d’affaires de 145 millions d’euros. Une transaction qui va permettre au groupe Dubreuil de rejoindre le club de moins en moins fermé des distributeurs milliardaires en chiffre d’affaires. Même si cela n’est pas une finalité en soi pour Paul‑Henri Dubreuil.
Le groupe Dubreuil en quelques chiffres
- Chiffre d’affaires : 2,7 milliards d’euros dont 1 milliard d’euros dans l’automobile et les pièces
- Marques distribuées : Peugeot, Citroën, DS Automobiles, Opel
- Nombre de collaborateurs : 5 800 dont 2 350 dans l’automobile
- Départements d’implantation : Charente, Charente‑Maritime, Creuse, Dordogne, Eure‑et‑Loir, Ille‑et‑Vilaine, Loire‑Atlantique, Maine‑et‑Loire, Mayenne, Sarthe, Deux‑Sèvres, Vendée
- Nombre de VN en 2022 : 21 155
- Nombre de VO en 2022 : 17 400
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