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Constructeurs

Quand l’hydrogène peut relancer le moteur thermique

Publié le 9 décembre 2025

Par Christophe Jaussaud
6 min de lecture
À l’heure où le 100 % électrique à batterie a du mal à convaincre, notamment sur la mobilité lourde, les promesses de l’hydrogène utilisé comme carburant dans les moteurs à combustion interne (ICE) se concrétisent peu à peu.
hydrogène carburant
L’hydrogène utilisé comme carburant dans les moteurs à combustion interne (ICE) intéresse les constructeurs automobiles. ©Toyota ©Alpine

Utiliser l’hydrogène comme carburant n’est pas vraiment une nouveauté. MAN l’a fait dès 1966 dans un bus. Plus récemment, en 2007, nous avions pris le volant d’une BMW Hydrogen 7, la 6e itération d’un modèle à moteur thermique (ICE), en l’occurrence un V12, fonc­tionnant en brûlant de l’hydrogène.

 

Le constructeur munichois a ensuite fait une pause, mais d’ici quelques mois, le X5 reviendra à l’hydrogène, mais avec une pile à combustible cette fois. Cela étant, l’utilisation d’hydrogène comme carburant pour un ICE s’affirme comme une solution de décarbonation et les tra­vaux sur le sujet sont nombreux.

 

Et même très avancés pour certains. Ainsi, Horse propose à ses clients un 4 cylindres, baptisé M20 Hydrogen. Il s’agit d’un bloc diesel modifié dé­veloppant 90 kW (122 ch) et limitant ses émissions à moins de 1 g de CO2. De quoi viser, selon Horse, le monde des VUL dans un premier temps.

 

L’équipementier Phinia (issu de la scission de BorgWarner) a également dévoilé la troisième génération de son bloc fonctionnant à l’hydrogène en partant d’un quatre cy­lindres diesel de 2,2 l d’un utilitaire Stellantis.

 

 

Le "nouveau" moteur délivre une puissance de 100 kW (136 ch) et retrouve le même couple de 340 Nm qu’à l’origine. Autant de preuves que les ingénieurs ont réus­si à juguler les problèmes du carbu­rant hydrogène (pression dans la chambre, NOx, cliquetis, etc.).

 

Alpine a développé, pour son concept Alpenglow, un V6 de 740 ch et fonctionnant à l’hydrogène. ©Alpine

 

Un V6 hydrogène pour Alpine

 

D’autres travaux prometteurs sont me­nés par des constructeurs et souvent en lien avec la compétition. Car la FIA fi­nalise une réglementation qui permettra d’introduire à partir de 2028 des véhi­cules à hydrogène dans les compétitions d’endurance (WEC) et notamment les 24 Heures du Mans.

 

Le monde du rallye (WRC) n’est pas non plus fermé à des propulsions alternatives. Avec le concept Alpenglow, dévoilé en 2022, Alpine s’est emparée du sujet. Après avoir utilisé un quatre cylindres (Hy4) développant 340 ch, les ingénieurs ont présenté une nouvelle version du prototype en 2024 embarquant un six cylindres biturbo de 3,5 l de cylindrée (Hy6), ouvert à 100°, brûlant de l’hydrogène.

 

Ce bloc déve­loppe la bagatelle de 740 ch (544 kW) à 7 600 tr/min et il est même capable d’atteindre 9 000 tr/min. Le construc­teur précise que la technologie utilisée pour ce moteur "né pour la course" est "transposable à la série". L’hydrogène est stocké sous forme gazeuse dans trois réservoirs de 700 bars de 2,1 kg chacun.

 

Lors des dernières 24 Heures du Mans 2025, Toyota a dévoilé un concept utilisant de l’hydrogène pour alimenter son moteur thermique. ©Toyota 

 

Toyota en pointe

 

Mais le constructeur le plus avan­cé sur de tels projets est sans doute Toyota. En effet, le nippon fait rou­ler, en compétition, depuis 2021 des modèles cachant des ICE alimentés par hydrogène. Ainsi, une Corolla a participé à la série japonaise Super Taikyu. Au départ, elle embarquait de l’hydrogène gazeux et depuis 2023, elle est passée à l’hydrogène li­quide pour alimenter son 3 cylindres turbo.

 

Le nippon a aussi testé cette technologie dans une GR Yaris Hy­drogen. En 2022, le grand patron de Toyota, Akio Toyoda, a même pris le volant de cette voiture lors du rallye d’Ypres, en Belgique. Une nouvelle version de cette Yaris, développée par l’équipe de WRC, a encore roulé lors du rallye de Finlande cet été. Et en juin 2025, à l’occasion des 24 Heures du Mans, Toyota a dévoilé le GR LH2 Racing Concept, un prototype fonctionnant à l’hydrogène liquide, taillé pour le futur de l’endurance.

 

 

MAN, comme de nombreux constructeurs de poids lourds, propose aussi des camions équipés de moteurs thermiques fonctionnant à l’hydrogène. ©MAN

 

Indispensable dans la mobilité lourde

 

L’hydrogène peut donc être, techni­quement, un carburant comme un autre (sans tenir compte de la problé­matique de sa production et de sa dis­tribution). Si son usage dans l’univers des VP peut se discuter, dans celui des VUL et surtout des poids lourds, il apparaît comme une solution pertinente pour atteindre le zéro émission.

 

Même la SNCF y réfléchit pour remplacer les moteurs diesel des locomotives qui circulent encore sur 42 % de ses lignes (voir ci-dessous). "Nous croyons dans les solutions hydrogène pour la mobilité lourde", a indiqué dans nos colonnes Laurent Favre, directeur général d’OPmobility (lire le JA N° 1344).

 

"En Europe, tous les constructeurs de poids lourds ont des programmes hydrogène, qu’il s’agisse de piles à combustible ou, lors d’une phase transitoire, de moteurs thermiques fonctionnant avec de l’hydrogène", avait‑il encore indiqué, précisant que "Volvo, Daimler, MAN, Iveco pour ne nommer que ceux‑ci, mènent des déve­loppements et auront une telle offre en 2030".

 

MAN propose ainsi, en petite série, des hTGX équipés d’un moteur à combustion de 16,8 l de cylindrée alimenté par un réservoir (700 bars) de 56 kg d’hydrogène. De quoi parcourir 600 km mais surtout avec un ravitail­lement en une quinzaine de minutes.

 

 

Et le camion est considéré comme "zéro émission" par la réglementa­tion européenne avec moins de 1 g de CO2/tkm. Le constructeur n’oublie pas pour autant les batteries, mais voit le hTGX comme "une solution com­plémentaire neutre en carbone pour les applications spéciales telles que le transport lourd ou dans les zones géo­graphiques où l’infrastructure de recharge est difficile à mettre en place".

 

Dans tous les cas, qu’il s’agisse de voi­tures, d’utilitaires, de camions, de bus ou même de trains, la recherche de la neutralité carbone passera par un cocktail de technologies. Car aucune ne peut couvrir tous les usages.

 

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La SNCF envisage le moteur à combustion d’hydrogène

 

Pour remplacer les locomotives diesel qui sont encore présentes sur 42 % des lignes, la SNCF envisage sérieusement le moteur thermique à combustion d’hydrogène car les propositions à batterie et à pile à combustible ne répondent pas aux usages.

 

La durée de vie d’un ICE à hydrogène, mais aussi sa relative facilité d’installation à la place d’un diesel et son coût inférieur aux autres solutions plaident en sa faveur. L’hydro­gène pourrait être stocké à l’état liquide dans un wagon supplémentaire long de 8,7 m, offrant ainsi une autonomie de 1 000 km. (YG)

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