Luca de Meo catapulte l'automobile dans le débat des européennes
Luca de Meo poursuit sa campagne européenne… Le directeur général de Renault, et accessoirement président de l’Association européenne des constructeurs automobiles (ACEA), multiplie les interventions pour mettre en garde les Européens contre l’inflation réglementaire qui pèse sur l’industrie automobile.
Il a adressé une "lettre" ou plutôt une sorte de dossier de presse à destination des Européens, parlementaires ou membres de la Commission européenne. Il s’agit de remettre en perspective les enjeux d’une industrie centenaire soumise à d’importantes turbulences.
"Européen convaincu"
"Soyons clairs : je suis un Européen convaincu (...), je crois dur comme fer au futur de l’industrie automobile européenne", précise l’Italien qui a exercé des responsabilités partout en Europe (en Italie, en Allemagne, en Espagne et désormais en France).
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Il juge néanmoins que dans un contexte d’importants investissements (250 milliards d’euros pour la seule transition énergétique), il est impératif que l’Europe "mette en place un cadre clair et stable".
Selon lui, la concurrence chinoise constitue une menace existentielle pour les Européens en raison de leur compétitivité. Avec 8,5 millions de voitures, le marché chinois représente 60 % des ventes de voitures électriques dans le monde. Et celles-ci ont déjà envahi le marché européen, contribuant à creuser le déficit commercial avec la Chine (400 milliards d’euros).
Pour Luca de Meo, les Européens se sont contentés de réglementer l’automobile sans l’accompagner d’une politique industrielle ambitieuse. "Les Américains stimulent, les Chinois planifient, les Européens réglementent", résume-t-il.
Un écart de prix de 25 %
Ainsi, l’écart de compétitivité entre une voiture électrique chinoise et européenne est évalué à 25 % du prix total en moyenne. En outre, Chinois et Américains délivrent plus facilement des financements. D’après une étude conduite par Polytechnique, le gouvernement chinois aurait octroyé entre 110 et 160 milliards d’euros de financements jusqu’en 2022, tandis que les États-Unis, dans le cadre du programme IRA lancé par Joe Biden, ont accordé 40 milliards d’euros de crédits d’impôts pour les technologies vertes. Ainsi, les États-Unis vont considérablement accélérer leur base de production de batteries électriques, tandis que la Chine est parvenue à établir un plan industriel cohérent pour s’imposer comme la future grande puissance automobile.
Dans sa présentation, Luca de Meo observe que de son côté, l’Europe s’est plutôt concentrée sur "un empilement de normes et de règles". "En moyenne, huit à dix nouvelles réglementations seront mises en place chaque année par les différentes directions de la Commission européenne d’ici 2030", peut-on lire dans le document.
Les droits de douane, une stratégie "défensive"
Dans une interview au journal Le Monde où il défend son texte, Luca de Meo n'adhère pas pour autant à l’idée de droits de douane avec la Chine. Il estime que ce sujet pourrait être vertueux à court terme, mais qu’il revêt une dimension "défensive". Il juge que l’industrie européenne ne peut de toute façon pas faire sans la Chine pour s’équiper en batteries ou en composants. "Ils ont pris une génération d’avance sur la voiture électrique", admet-il, avant de préciser : "Ils contrôlent les mines, la chimie et le raffinage des produits, nécessaires pour faire les batteries. Ce sont des activités que nous ne voulons pas en Europe parce qu’elles sont très polluantes".
Luca de Meo propose de "dealer" avec la Chine, du "donnant-donnant". L’Europe pourrait imposer aux industriels chinois des obligations de relocalisations industrielles sur le territoire européen et des coentreprises. Il s’inspire ainsi du même modèle mis en place par Pékin dans les années 1980 pour accueillir les industriels étrangers.
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