La Cour des comptes inquiète sur l'état de la production de batteries en Europe
Face à l’ambition de l’Union européenne d'arrêter les ventes de véhicules thermiques d'ici à 2035, la Cour des comptes s’inquiète. Selon l’institution, en dépit des efforts pour produire davantage de batteries pour les voitures électriques sur son territoire, leur nombre risque ne pas être suffisant pour répondre à la demande.
Dans un rapport publié lundi, la Cour des comptes pointe les problèmes de disponibilité des matières premières nécessaires à la fabrication des batteries, l'augmentation du prix de ces matières premières et de l'énergie, ainsi que la concurrence mondiale susceptible de saper la compétitivité européenne.
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"Quasiment chaque semaine, une nouvelle giga-usine de batteries est annoncée en Europe", a reconnu la responsable de l'audit, Annemie Turtelboom lors d'un point de presse. Pour autant, "les chances que l'UE devienne un leader mondial de la production de batteries ne semblent pas bonnes", avertit-elle.
"Nous sommes confrontés au risque de voir l'UE manquer son objectif" de ne vendre que des voitures neuves à zéro émission en 2035, ou de ne pouvoir "atteindre cet objectif que par l'importation de batteries ou de véhicules électriques, ce qui nuirait à l'industrie européenne", a-t-elle indiqué.
Un risque de pénurie de matières premières
"L'UE ne doit pas se retrouver avec les batteries dans la même position de dépendance que celle qu'elle a eue avec le gaz envers la Russie", a mis en garde la responsable. La Cour des comptes de l'UE prévoit qu'"à brève échéance, la production européenne de batteries sera confrontée à une pénurie mondiale de matières premières essentielles".
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Elle cite des projections des services de recherche (JRC) de la Commission européenne, selon lesquelles "la pénurie mondiale se fera véritablement sentir d'ici à 2030, date à laquelle la majeure partie de la capacité de production de batteries de l'UE deviendra opérationnelle".
Or, pour cinq matières premières clés (cobalt, nickel, lithium, manganèse, graphite naturel), l'UE est dépendante à 78 % des importations, en provenance d'un petit nombre de pays. Quelque 87 % du lithium brut est importé d'Australie, 68 % du cobalt de la République démocratique du Congo et 40 % du graphite naturel provient de Chine.
Une forte concurrence au niveau mondial
Or l'Union européenne ne dispose pas, avec ces trois principaux fournisseurs, d'accords de libre-échange qui pourraient garantir un accès durable à ces matières premières. Et certains pays sont associés à des risques géopolitiques pouvant mettre en péril l'approvisionnement, souligne la Cour des comptes, qui met aussi l'accent sur la hausse de la demande mondiale.
Quant à l'extraction de ces minerais dans l'UE, Annemie Turtelboom a relevé que si du lithium était présent au Portugal et en France, il y avait "en moyenne, une durée de 12 à 16 ans entre la découverte et le début de la production". Trop juste pour l'objectif de 2035, a-t-elle estimé, ajoutant que, toutes les matières premières nécessaires n'étant pas présentes en Europe, "cela ne résoudra pas tous les problèmes" de toute manière.
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La Chine représente actuellement 76 % de la production mondiale de batteries électriques et l'UE 7 %. L'UE est aussi confrontée à une forte concurrence de la part notamment des États-Unis, qui, par le biais de leur loi sur la réduction de l'inflation (IRA), offrent des incitations aux entreprises qui décident d'y implanter leurs usines de production de batteries. Pour y répondre, la Commission a proposé mi-mars des allègements réglementaires visant à promouvoir les industries vertes, dont les batteries, un texte actuellement en cours de négociation.
Vers une indépendance de l’UE en matière de batterie ?
Un autre projet législatif, présenté de concert, vise à diminuer la dépendance de l'UE en matières premières critiques en favorisant l'extraction en Europe et les coopérations commerciales avec des fournisseurs plus nombreux.
Pour autant, la Cour souligne d'autres dangers : "avec l'augmentation du coût de facteurs de production tels que l'énergie et les matières premières, les batteries, et par conséquent les véhicules électriques, pourraient devenir inabordables pour un grand nombre de propriétaires", entraînant "une baisse de la demande de véhicules électriques et une diminution de l'intérêt économique des investissements dans des installations de production".
L'institution demande notamment à la Commission européenne de mettre à jour son plan d'action stratégique sur les batteries publié en 2018, en accordant une attention particulière à la sécurisation de l'accès aux matières premières. (avec AFP)
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