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Constructeurs

"En Europe, les constructeurs doivent fermer 10 à 12 usines rien que pour survivre"

Publié le 26 juillet 2012

Par Christophe Jaussaud
3 min de lecture
Au lendemain de l'annonce d'un plan de soutien à l'industrie automobile française que beaucoup jugent pour le moins timide, voire inapproprié, il est intéressant de revenir sur la crise de l'automobile américaine mais surtout sur les solutions apportées, à l'époque, par le gouvernement Obama.
Au lendemain de l'annonce d'un plan de soutien à l'industrie automobile française que beaucoup jugent pour le moins timide, voire inapproprié, il est intéressant de revenir sur la crise de l'automobile américaine mais surtout sur les solutions apportées, à l'époque, par le gouvernement Obama.

La restructuration du secteur automobile aux Etats-Unis entre 2008 et 2009, à un moment où il était endetté et accumulait les pertes dans un contexte de chute des ventes, fait écho à la situation actuelle du marché automobile européen, comme l'explique dans une interview Dave Cole, spécialiste de l'industrie automobile à l'Université du Michigan.

Aux Etats-Unis, combien d'emplois ont été supprimés et d'usines ont été fermées?

D.C. : Un nombre substantiel. GM emploie maintenant 50 000 personnes (aux Etats-Unis) contre 100 000 avant la crise. Une usine d'assemblage, c'est environ 250 000 unités par an et Ford, Chrysler et General Motors ont supprimé environ deux millions d'unités, donc une dizaine d'usines. L'une des raisons qui fait que le secteur va mieux, c'est qu'il n'y a plus le même excédent de capacité de production qu'avant. En Europe, le même genre de chose va devoir arriver, même si c'est plus difficile là-bas. L'un des problèmes de l'industrie, c'est que si l'on opère sous le seuil de rentabilité, on perd une quantité d'argent colossale. C'est ce qu'on voit chez PSA par exemple. L'utilisation des capacités de production est assez faible et c'est catastrophique pour leur rentabilité.

Quelle a été la recette de la réussite du plan de sauvetage du secteur aux Etats-Unis?

D.C. : Les réductions de dette ont été très utiles, les fermetures d'usines aussi, mais ils ont créé un modèle d'activité entièrement nouveau avec un taux d'utilisation beaucoup plus élevé, l'élimination d'un certain nombre de marques, la consolidation des plateformes utilisées. Avec tout ceci, ils sont rapidement devenus très rentables. Le coût du travail a chuté de façon spectaculaire et l'augmentation de la productivité a augmenté avec la faillite. L'un des effets secondaires, c'est que le type d'ouvrier qui est demandé est désormais très différent de ceux de l'ancien modèle. Avant, on pouvait travailler sur une ligne d'assemblage en n'ayant pas son bac. Maintenant, il faut deux ans d'université. La crise maintenant, c'est de savoir si on peut trouver assez d'ouvriers aussi qualifiés, et en Europe c'est pareil. Le résultat c'est qu'avant, les voitures fabriquées aux Etats-Unis avaient un désavantage compétitif de 2 000 dollars par voiture par rapport aux voitures japonaises. Maintenant c'est devenu un avantage de 2 000 dollars (en raison aussi du différentiel yen-dollar pour les importées, N.D.L.R.).

Pour Chrysler, le mariage a-t-il été providentiel avec Fiat?

D.C. : Fiat était en difficulté lui-même, et ses dirigeants se sont dit que, combiné avec Chrysler, ils avaient une chance (de survivre). Les gens pensent souvent que c'est Fiat qui a été le chevalier blanc de Chrysler. Mais à l'heure actuelle, c'est Chrysler qui garde Fiat en vie. Ils sont allés mieux pendant un temps, mais avec la crise qui s'aggrave en Europe, Fiat et Chrysler sont de nouveau dans une situation risquée, à moins qu'ils ne parviennent à restructurer les opérations en Europe. Le malaise en Europe est très sérieux. On court à la catastrophe sauf si les constructeurs parviennent à fermer des usines. Ils doivent en fermer 10 à 12, rien que pour survivre.

Propos recueillis par l'AFP

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