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Constructeurs

Emmanuelle Serazin : "Hyundai France fait du VO une pierre angulaire"

Publié le 14 juin 2024

Par Gredy Raffin
6 min de lecture
La filiale française de Hyundai est lauréate des EMVO 2024 pour son travail de modernisation de la vente de voitures d'occasion. Sa directrice des ventes corporate et VO, Emmanuelle Serazin, partage des éléments de compréhension de sa stratégie payante.
Entretien avec Emmanuelle Serazin
Emmanuelle Serazin, directrice des ventes corporate et VO de Hyundai. ©Hyundai

Le Journal de l'Automobile : Aux États-Majors du VO 2024, Hyundai a gagné en partie grâce à ses investissements dans le digital. Quelle est votre conviction en la matière ?

Emmanuelle Serazin : Ce projet a été mené dans l'optique d'être prêt avant l'heure. Nous voyons bien que l'intérêt pour le parcours en ligne monte, mais objectivement, il n'y a pas encore de conversion à grande échelle sur un parcours 100 % digital. Les acheteurs de voitures d'occasion basculent encore vers la concession pour obtenir des conseils auprès des experts. Ce qui prouve que les boutiques ont toujours un rôle à jouer et que nous devons nous appuyer sur elles pour l'avenir.

 

J.A. : Quelle posture tenez-vous face à vos partenaires ?

E.S. : La digitalisation du VO se fait par étape. Le réseau doit au fil du temps monter en compétence sur la vente multicanal, grâce à un accompagnement de notre part. La digitalisation des ventes est au cœur de la stratégie et cela va s’accélérer en premier sur le VO. Hyundai a une gamme de produits qui se renouvelle plus vite que la moyenne du marché. Le réseau ne peut donc plus effectuer le travail minimum sur la vente VO et l’animation du parc des voitures d'occasion. Hyundai fait du VO une pierre angulaire de sa stratégie de croissance.

 

Utiliser le VO comme un laboratoire de solutions

 

J.A. : Que cela signifie-t-il concrètement ?

E.S. : Les voitures d'occasion sont des moyens de proposer des solutions de mobilité innovantes. Il y aura un enjeu de multipropriétés sur un délai très court. Nous devons réfléchir en taux d'utilisation sur une période cible. Encore faut-il parvenir à conjuguer flexibilité et ROI pour les consommateurs et les distributeurs. Nous enrichissons nos connaissances, notamment avec les voitures électriques, dont les cycles sont plus courts et les baisses de valeur résiduelle plus prononcées. Pour Hyundai, il est question d'utiliser le VO comme un laboratoire de solutions et un centre de profit stabilisé.

 

J.A. : Les distributeurs y sont-ils préparés ?

E.S. : Quand le marché des voitures d'occasion s'est retourné, les compétences d'une partie des concessionnaires ont été mises en exergue. Maintenant qu'il y a de la matière, il faut investir dans le stock pour lisser les effets de crise avec le repricing. Je sais que c'est plus facile à dire qu'à faire, alors même que les réserves de VN ont augmenté partout, y compris chez nous.

 

J.A. : Après le domaine du digital, quels seront les prochains développements ?

E.S. : Ils seront moins visibles. Cependant, nous avons pris des décisions fortes, comme celle de constituer une équipe dédiée au siège. Ainsi, nous garantissons que le VO ne sera pas l'activité d'une minorité, mais un pilier. Nous tournons la page des consultants externes dédiés au VO. Nous construisons une stratégie en interne, focalisée sur les besoins. Dorénavant, les questions de budget, de segment de véhicule et de durée de détention seront les clés d'entrée des consommateurs et non plus systématiquement le modèle. Les VO doivent apporter une réponse.

 

 

J.A. : Comment se comportent les consommateurs ?

E.S. : Nous distinguons trois profils. Les "conservateurs" veulent acheter. Les "rationnels" veulent maîtriser leur budget. Les "flexibles" veulent avancer sans s'engager. Cette dernière catégorie a tendance à croître en proportion, notamment sur le marché BtoB. Nous leur avons apporté une réponse adaptée avec le lancement de notre d’abonnement BtoB, Hyundai Leasing. Et ces offres flexibles vont continuer de se développer avec des offres VN et VO. Nous pourrons reparler de Mocean Rent bientôt.

 

J.A. : Comment adapter l'accueil en concession ?

E.S. : La séparation des équipes ventes VN et VO est une obligation pour s’adapter aux attentes des clients, à ce marché chahuté et répondre avec la bonne spécialisation. Cela fait partie des standards imposés à nos distributeurs. Les chefs de région ventes assureront la consolidation stratégique pour éviter les blocages et les comportements destructeurs de valeur.

 

A lire aussi : L’abonnement BtoB, la formule du rebond pour Hyundai ?

 

J.A. : Parlant des concessions, qu'est-ce qu'un label ?

E.S. : Cette question doit se poser. Il y a une promesse client et une garantie, mais pas uniquement. Un label doit être une charte de confiance entre le client, le distributeur et le constructeur. Outre les promesses, un label doit inclure des obligations dans les domaines de l'organisation, de la formation et des outils.

 

J.A. : D'autant que la concurrence ne vient plus uniquement des autres marques automobiles…

E.S. : Il est difficile pour les acteurs tiers de se fournir en Hyundai d'occasion de moins de trois ans, mais au-delà de ce fait, ils sont des concurrents à considérer. Ils ont une conception du parcours client en ligne qui tend vers plus de fluidité et les clients peuvent y être sensibles. En revanche, bien souvent, il s'agit d'une coquille vide de services et là, nous avons une carte à jouer.

 

Instaurer la LOA comme filtre par défaut a été une erreur

 

J.A. : Vous faites allusion aux services annexes. Quelles sont les performances ?

E.S. : Nous vendons environ 28 000 VOP par an dans le réseau, dont une grande majorité de Hyundai. Notre clientèle n'a rien d'atypique. Elle s'aligne sur la moyenne du marché. Le financement atteint une pénétration inférieure à 30 %. En plus de vouloir augmenter les volumes de vente, nous travaillerons à l'amélioration de ce point. En consacrant une équipe dans les concessions, nous y parviendrons. D'autant que le modèle de rémunération les encouragera à proposer du financement pour garder les véhicules dans notre environnement, et ce, particulièrement sur les offres de VO électriques.

 

J.A. : Comment y amener les clients ?

E.S. : Nous avons compris quelque chose : en choisissant d'instaurer la LOA comme filtre par défaut, nous avons fait une erreur. Cela filtrait de facto des voitures d'occasion non éligibles (rupture de la chaîne de TVA). En retirant ce paramètre, nous avons augmenté la surface de notre stock visible et mécaniquement accru la volumétrie de leads. Cela n'empêche pas pour autant de communiquer systématiquement sur le financement en loyer. Ainsi, nous habituerons les clients à raisonner en valeur de la mobilité.

 

J.A. : Le multicycle VO implique aussi le reconditionnement. Quelle sera la doctrine à ce sujet ?

E.S. : Pour garantir une homogénéité, nous n'aurons pas recours à une stratégie d'externalisation. Nous avons réalisé des tests et nous sommes en train de finaliser un cahier des charges. Le modèle économique se révèle plus viable en s'appuyant sur les concessionnaires directement, mais nous pourrions également avoir recours à un maillage de centres régionaux rayonnant à 200 km pour centraliser les activités. Toutes les pistes sont à l'étude.

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