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Constructeurs

Carlos Ghosn est révoqué chez Nissan, mais l'Alliance doit être sauvée

Publié le 22 novembre 2018

Par Catherine Leroy
4 min de lecture
Nissan vient de révoquer Carlos Ghosn de son poste de président. Mitsubishi pourrait en faire de même le 26 novembre 2018. Mais des voix s'élèvent pour évoquer un coup monté et un refus de la part de Nissan d'aller vers une fusion avec Renault...
Le conseil d'administration de Nissan vient de révoquer Carlos Ghosn de son poste de président de Nissan.

 

Comme attendu, le conseil d'administration de Nissan a voté jeudi 22 novembre à l'unanimité la révocation de Carlos Ghosn de son poste de président. Dans un communiqué publié sur le site du Tokyo Stock Exchange (TSE), le constructeur explique cette décision par des "actes graves confirmés", mentionnant "une minimisation de ses revenus durant une longue période dans les rapports financiers, une utilisation frauduleuse à des fins personnelles de fonds d'investissement et de notes de frais".

 

Rapports financiers annuels inexacts

 

Une fois la stupeur de l'annonce de l'arrestation de Carlos Ghosn passée, l'heure est aujourd'hui aux suppositions et aux déclarations souvent anonymes. Pour l'instant, aucune information officielle émanant du procureur de Tokyo ne vient étayer les motifs invoqués par Hiroto Saikawa, l'actuel patron de Nissan, à savoir une fraude fiscale et un abus de biens sociaux. En revanche, les fausses déclarations évoquées lors de la conférence de presse d'Hiroto Saikawa n'auraient pas de lien avec une fraude fiscale, mais concerneraient un document destiné aux marchés financiers. En réalité, Carlos Ghosn serait soupçonné d'avoir certifié des rapports financiers annuels inexacts remis aux autorités financières japonaises. Si les soupçons sont avérés, il serait alors responsable pénalement de ces fausses informations.

 

Selon un juriste financier japonais interrogé par l'AFP, "ce document est destiné à dresser un état des lieux complet de la situation et des finances de l'entreprise à destination des marchés. Plus l'inexactitude est de nature à fausser le jugement des investisseurs, plus la sanction est sévère".

 

Aucune preuve formelle n'a également été révélée concernant les faits "d'abus de biens sociaux" reprochés à Carlos Ghosn. Là encore, les exemples cités émanent du nouvel homme fort de Nissan et des fuites dans la presse de l'enquête interne menée par Nissan visiblement depuis près d'un an, soit peu de temps après que Carlos Ghosn l'ait nommé directeur exécutif de Nissan.

 

Nissan n'a donc pas attendu les conclusions du procureur de Tokyo pour démettre Carlos Ghosn de son poste de président. Mitsubishi, troisième constructeur de l'Alliance, devait se prononcer lundi tandis que Renault, à Paris, reste très prudent en confiant l'intérim du poste de PDG à Thierry Bolloré, actuel directeur général.

 

Le conseil d'administration de Renault aurait également demandé à Nissan de lui transmettre l'ensemble des informations en sa possession dans le cadre des investigations internes de Nissan.

 

Coup monté ?

 

Si l'avenir du président de l'Alliance semblé scellé, reste à définir celui de l'Alliance elle-même. Car, semble-t-il, l'enjeu de ce "coup d'Etat" se recentre de plus en plus sur ce mariage à deux, puis à trois, et les crispations ressenties par Nissan depuis au moins 2015. Pour preuve, Hiroto Saikawa n'avait même pas prévenu son premier allié, en l'occurrence Renault, de l'enquête interne menée durant de longs mois.

 

Nissan, le partenaire sauvé de la faillite par Renault en 1999, contribue aujourd'hui à la moitié du volume de ventes de l'Alliance (soit 5,81 millions de véhicules sur un total de 10,61 millions, contre 3,76 pour Renault et 1,03 pour Mitsubishi).

 

Côté finances, Nissan a généré un chiffre d'affaires de 100 milliards d'euros, soit deux fois plus que Renault (58 milliards d'euros). La vapeur est ainsi renversée. Un agacement d'autant plus fort que Renault dispose de 43 % du capital de Nissan contre 15 % chez Renault pour ce dernier, autant que l'Etat français ! Mais avec des droits de vote en moins.

 

Trop d'Etat

 

Ce sujet marque la deuxième très forte crispation de Nissan vis-à-vis de Renault. Le constructeur japonais ne peut accepter que le gouvernement français puisse décider de l'avenir de son principal actionnaire. En l'occurrence, le choix, en 2015, d'Emmanuel Macron, alors ministre de l'Economie, de baisser le pouvoir de l'Etat dans Renault à 15 % à condition d'installer un système qui lui confère 22 % des droits de vote.

 

La rancoeur de Nissan s'accumule ainsi jusqu'aux rumeurs de fusion entre Renault et Nissan évoquées dès le printemps 2018. Selon le Financial Times, un dossier de fusion était dans un état très avancé. Mais, visiblement, la relation gagnant-gagnant demandée par Nissan n'était pas assez équilibrée.

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