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Un tramway nommé désir

Publié le 11 mai 2007

Par Alexandre Guillet
4 min de lecture
Une jeune femme me disait récemment qu'elle se sentait "complètement démotivée" et ajoutait même "n'être plus dans son désir". Ce propos peut paraître déplacé dans un cadre professionnel, mais au-delà des confusions et des effets de mode, il témoigne que si nous ne manquons...
Une jeune femme me disait récemment qu'elle se sentait "complètement démotivée" et ajoutait même "n'être plus dans son désir". Ce propos peut paraître déplacé dans un cadre professionnel, mais au-delà des confusions et des effets de mode, il témoigne que si nous ne manquons...

...de rien, nous pouvons ressentir cruellement le manque de l'essentiel.


Notre vie est faite de projets personnels, d'élans qui sont des réponses au manque que nous ressentons. Cette dynamique de vie, notamment absente chez les personnes en dépression, s'appelle désir. Alors que le désir est une dégustation qui est du côté de la promesse de jouissance, ce que nous appelons besoin va, au contraire, nous placer dans la précipitation, cherchant à combler le manque au plus vite, comme pour mieux le bâillonner alors qu'il resurgira à la première occasion. Tandis que le besoin nous fait connaître la frustration, le désir est généreux et nous rend ambitieux dans notre accomplissement personnel. Il est à l'opposé de l'envie et de la jalousie limitées à la convoitise. Si notre désir est personnel, nos besoins et motivations le sont aussi, tout comme nos démotivations. Pour résumer, nous sommes motivés lorsque notre activité professionnelle s'inscrit dans notre projet de développement personnel. On voit tout de suite le numéro d'équilibriste que nous réalisons, puisque dans la majorité des cas nous sommes dans le projet de l'autre.

Ce n'est pas le feed-back négatif qui démotive, c'est l'absence de feed-back

Cependant, de judicieuses contreparties nous permettent de survivre. Elles nous procurent le sentiment d'être utile, d'occuper une place, sans oublier la rétribution la plus significative : l'argent, même si ce métal instable nous motive et nous démotive tout à la fois. Toute manifestation qui nous permet de comprendre que les autres nous apprécient, ainsi que le travail que nous réalisons, constitue un signe de reconnaissance, clef de notre motivation : nous sommes tellement accros que nous préférons recevoir des signes négatifs plutôt que d'en être privés. On comprend mieux pourquoi les managers sont formés à donner du feed-back, car l'évaluation est un acte de




ZOOM

Elisabeth Damour est consultante en ressources humaines et son parcours professionnel l'a mené de Londres à Saõ-Paulo et ensuite à Paris où elle a créé le cabinet Suivi d'Effets en 1999.
Elle collabore depuis de nombreuses années avec des entreprises où l'innovation est culturelle : L'Oréal, Decathlon, Alstom, Wedgwood et bien sûr l'industrie automobile avec BMW, Seat, MAE, Renault etc.
Suivi d'Effets est spécialisé dans des interventions de teambuilding et de coaching pour les équipes de design et de R&D.
www.suivideffets.com

reconnaissance et le fondement de l'appartenance. Ce n'est pas le feed-back négatif qui démotive, c'est l'absence de feed-back. Si vous êtes familiarisé avec la Typologie de Taibi Kahler (1), vous savez que le simple fait de communiquer dans un canal de communication approprié est un "super-motivateur" puisqu'il nourrit en positif le "Besoin Psychologique". Par exemple, une personne de type de personnalité "Travaillomane" a besoin de structurer son temps et elle préférera des interactions qui décrivent des faits et qui sont logiques. Quant au "Rebelle", qui met une ambiance trop ludique à votre goût, inutile de décider de l'isoler : vous paierez cher vos mesures inappropriées par des manifestations négatives. Vous pouvez toujours faire le choix d'éviter de recruter des Rebelles, mais vous ne serez pas dédouané pour autant car nous sommes tous logés à la même enseigne. Un Travaillomane en dysfonctionnement se met à sur-contrôler, il se désorganise, devient agressif et perturbe tout le monde par ses exigences.

La démotivation ne se donne pas forcément en spectacle dans la lenteur, la mollesse ou la résignation

Comment intervenir pour redonner pro-activité et goût de l'action ? Laisser l'autre parler de ses désirs et exprimer ses besoins demande du temps : c'est un exercice sur le fil du rasoir, partagés que nous sommes entre notre désir de comprendre l'autre et la crainte de se laisser aller à être trop gentil, en un mot, de se laisser engloutir… Peur souvent inconsidérée, car ce dont l'autre a besoin, c'est que nous soyons juste un petit peu attentif à son mal être. Nous conclurons que devant tant de complexité dans les manifestations de nos manques, le premier soin intensif pourrait être de simplement tendre l'oreille. Tendre l'oreille sans perdre de vue cette charte primaire des besoins des collaborateurs : s'exprimer, être informé, être responsable, être autonome, être dirigé, aidé et sanctionné, s'organiser, apprendre et créer, être estimé.


Elisabeth Damour, Coach,
elisabeth.damour@suivideffets.com


(1) : La Process Com identifie six types de personnalité : dans un prochain article nous vous livrerons de nouveaux indices sur nos comportements de réussite et de sabotage.

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