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La rentabilité du financement en question

Publié le 16 janvier 2004

Par Alexandre Guillet
10 min de lecture
Combien rapporte l'activité financement lorsque l'on dispose d'un FM ? Combien doit-on rémunérer son FM ? Les réponses que nous ont fournies les concessionnaires nous permettent d'évaluer le poids de cette activité : elle rapporte de 3 à 6 % de la production de financement, soit jusqu'à 1...

...% du chiffre d'affaires total de la concession. La rémunération dépend en définitive de l'importance de la production primable par rapport à la production globale. Explications.


La rémunération des concessionnaires sur la vente de financement, voilà un sujet hautement confidentiel, même si les établissements financiers affirment que la concurrence entre eux ne se fait plus sur ce facteur : "tous les intervenants se tiennent", "nous avons atteint un plafond", peut-on entendre ici ou là. Aucun des établissements interrogés n'a souhaité répondre ouvertement à nos questions sur le sujet. Seuls 25 concessionnaires, dans le cadre de notre enquête sur les Finance Managers, ont accepté de répondre à nos questions indiscrètes sur leurs rémunérations et certains parmi eux de nous expliquer le processus de négociation. L'échantillon n'est naturellement pas représentatif, il concerne des concessions de taille importante qui ont les moyens et qui ont fait le choix de rémunérer un FM, des concessions qui affichent des CA allant de 13 à 40 millions d'euros, soit bien au-dessus de la moyenne nationale. La faiblesse de l'échantillon ne nous permet pas de faire une étude comparée des différentes pratiques, d'autant que chaque concessionnaire négocie sa rémunération individuellement.
Les quelques exemples que nous citons permettent néanmoins de définir des ordres de grandeur et de tracer le portrait robot suivant : la concession qui dispose d'un FM réalise en moyenne un chiffre d'affaires de 26,65 millions d'euros, commercialise pour 4,9 millions d'euros de financement et perçoit pour cela une rémunération de 190 000 euros. Ainsi, dans une concession possédant un FM, la vente de financement représente 18 % du CA global, dans une fourchette allant de 10 à 30 %. La rémunération atteint quant à elle 3,8 % de la production de financement.
Globalement, le taux de rémunération progresse avec le volume d'activité : dans la tranche de CA annuel de financement de 2,64 millions d'euros, le gain est de 3,4 %, alors que dans la tranche de 6,82 millions d'euros, il sera de 4,9 %. Toutefois, quel que soit le volume d'activité, des écarts très importants existent d'une concession à une autre, les taux de rémunération s'échelonnant de 1 à 6 % de la production. Outre les conditions de l'accord négocié avec l'établissement partenaire, les écarts sont liés au fait que toute la production n'est pas "primable". Chaque établissement fixe ses propres conditions mais, globalement, les prêts suivants ne sont pas rémunérés : les prêts remboursés par anticipation, les prêts de moins de 24 mois, les prêts à taux promotionnels, les prêts pour des VO de plus de 7 ans, les prêts de moins de 3 000 euros… Ainsi, les concessions qui utilisent beaucoup les taux promotionnels, de leur captive notamment, affichent des taux de rentabilité de financement en dessous de la moyenne.

Les encours financiers, un des nerfs de la guerre

Pour conquérir un concessionnaire, l'établissement de crédit doit être performant dans trois domaines : la qualité de son service et l'originalité de ses produits de financement ; ses taux de crédit et de commissionnement ; enfin, l'encours financier et les prêts qu'il peut accorder. C'est souvent par ce dernier point que commence toute négociation : la mise à disposition d'un encours




EN BREF

Les FM formés par les établissements financiers indépendants


  • Cofica CU : 240

  • CGI : 237

  • Viaxel : 170*

  • Géfiservices : 127

  • Finalion : 30*

    *en 2002

  • financier à un taux plus ou moins privilégié (Euribor [2,15 %] + 0 à 2 points) qui va permettre au concessionnaire de financer ses stocks VO, VN ou PR. D'un établissement à un autre, cet aspect est plus ou moins développé : chez CGI, cet encours est mis à disposition chez 50 % des concessionnaires partenaires ; chez Géfiservices, il intervient dans 90 % des cas. "Alors que le système bancaire est de plus en plus frileux, que les constructeurs se mettent de nouveau à demander des cautions, cet aspect du partenariat devient essentiel", estime Jean-Jacques Lemoigne, directeur commercial de Géfiservices. Ce concours de trésorerie à court terme doit normalement être renégocié tous les ans. Le concessionnaire reste ainsi libre de changer de partenaires financiers, mais se trouve dans une situation instable. Il peut toujours avoir recours à la captive de son constructeur mais celle-ci pratique pour le financement du stock VN, le "floor plan", des taux plus élevés (Euribor + 3 à 5 points).
    L'apport d'un encours financier à un taux privilégié implique un engagement de la part du concessionnaire : "En général, pour un encours donné, il faut réaliser une production de financement correspondant au triple du montant", schématise un concessionnaire, dont les propos sont confirmés par un établissement de crédit. Toutefois, un directeur de site, qui bénéficie des accords négociés par son groupe, n'a pas à répondre à un tel ratio : "Si on arrive à avoir une production annuelle correspondant à nos encours, c'est suffisant."
    Le soutien financier peut être supérieur à un an, pour aider le concessionnaire dans son développement. Dans le cadre d'une opération de croissance externe, le prêt peut être traité comme une avance sur les commissions futures. "Par exemple, explique ce concessionnaire, un prêt de 450 000 euros correspond à 5 % de commission sur une production de 9 millions d'euros. Je m'engage donc avec ce partenaire sur un volume de financement de 3 millions par an sur trois ans." Ce fonctionnement n'est qu'un mode de calcul car, au niveau comptable, il est interdit de considérer ce prêt comme une avance sur les commissions futures du concessionnaire.

    Le concessionnaire veut une rémunération minimum garantie de 4 à 5 %

    Lorsque l'établissement de crédit est implanté dans la concession, il faut, tous les ans, renégocier la rémunération du concessionnaire. Si les données que nous avons pu collecter placent cette rémunération nette dans une fourchette allant de 3 à 6 % de la production totale, les conventions commerciales varient d'une concession à une autre en fonction de son pouvoir de négociation et de ses partenaires financiers. "Généralement, le concessionnaire veut une rémunération minimum garantie de l'ordre de 4 à 5 % de sa production primable, explique un établissement de crédit.




    EN BREF

    La part des FM dans la production de financement


  • Cofica CU : 50 %

  • CGI : 45 %

  • Viaxel : 35 %*

  • Géfiservices : 25 %

  • Finalion : 30 %

    *en 2002

  • Ensuite, des primes lui sont versées en fonction de la qualité des dossiers : la durée, la pénétration des assurances…" Le taux pratiqué est également souvent pris en compte dans la rémunération même si, légalement, il est interdit d'inciter le concessionnaire à pratiquer des taux élevés.
    Voici quelques exemples de modes de rémunération. Cette concession perçoit mensuellement entre 1,2 et 1,8 % de sa production de financement et, semestriellement ou annuellement, si elle atteint ses objectifs, obtient une prime "qui couvre en général les agios dus sur les encours financiers accordés et nous permet d'obtenir un total de 5 % de marge sur la production totale", explique ce chef d'entreprise. Cette autre concession, appartenant à un très grand groupe, obtient une marge immédiate de 5 à 6,4 % du montant financé versée à la livraison (dont les assurances qui rapportent 0,5 % chacune). "Les objectifs annuels sont définis pour le groupe. S'ils sont atteints, nous recevons annuellement notre quote-part, soit de l'ordre de 1 % de notre production", explique le directeur de site. Cet autre groupe, enfin, partage les gains à 50/50 avec son partenaire financier : "Même si les objectifs ne sont pas atteints, nous avons fixé un plancher de rémunération à 3,3 %, mais nous touchons en général de l'ordre de 6 %."
    Par expérience, les établissements prescrivent des procédures pour rémunérer les FM, mais le chef d'entreprise reste naturellement libre de faire à sa façon. "Nous conseillons de mettre en place une méthode qui tienne compte du gain par voiture", explique Didier Calmont, directeur marketing de CGI. Cependant, généralement, le concessionnaire définit le "pay plan" du FM en fonction de ses propres objectifs (type de crédit et partenaire à favoriser, pénétration des assurances, etc.).

    La rémunération des FM ou le "pay plan"

    Pour la plupart des FM, entre 30 et 50 % de la rémunération est fixe. Un fixe qui avoisine les 1 000 euros bruts mensuels. Ensuite, les méthodes de rémunération vont du plus simple au plus compliqué. Tel FM gagnera ainsi mensuellement 0,6 % de sa production primable (au-dessus d'un taux de 9,6 % environ pour assurer la rentabilité de la concession et de l'établissement de crédit). Ensuite, il recevra des primes quadrimestrielles, de l'ordre de 500 euros si l'objectif de production est atteint et l'équivalent si le taux de pénétration des produits annexes est obtenu (placer 50 % d'assurance décès, d'assurance perte financière et d'extension de garantie VO par crédit). "Il faut faire des choix, mais quoi qu'il arrive, si l'on veut inclure ces prestations dans la mensualité, on ne peut pas se permettre de pratiquer des taux trop élevés", commente ce FM.
    Dans cette concession, on a cherché la simplicité : en plus de ses 1 800 euros mensuels, le FM reçoit une prime quadrimestrielle de 2 300 euros si son chiffre d'affaires est atteint, si le taux est respecté (en l'occurrence 9,1 % en moyenne) et si la pénétration des trois produits annexes (assurances et garanties) est obtenue, soit 1,5 produit par crédit. Ces produits complémentaires sont essentiels car ils représentent de l'ordre de 50 % de la prime quadrimestrielle.
    La rémunération peut être également forfaitaire. Par exemple, chaque dossier peut rapporter entre 30 euros et 45 euros (hors prime d'objectif) en fonction du nombre de prestations incluses dans la mensualité. Une autre méthode de rémunération, peu satisfaisante car peu motivante, est parfois utilisée : le FM est payé uniquement en fonction de la pénétration du crédit. "Quels que soient les taux, les montants financés et les assurances incluses, il suffit de vendre un crédit pour deux ventes", explique le FM.

    La rémunération des vendeurs à prendre en compte

    Les vendeurs sont aussi rémunérés sur le financement pour les inciter à présenter le client au FM et parfois à préparer le client à un certain type de financement, comme le crédit ballon. Dans cette concession, par exemple, les vendeurs obtiennent, en plus de leurs 7 % de marge restante sur les VN, trois points en cas de crédit ballon et seulement un point en cas de crédit classique vendu par le FM. C'est en effet à eux de mettre en condition le client, de respecter la méthode de vente pour arriver à lui fournir une budgétisation de son achat. Ils perdront, en revanche, deux points de marge s'ils ne présentent pas le client au FM. Dans cette autre concession, les vendeurs sont rémunérés mensuellement selon une grille de pénétration du financement : elle peut aller jusqu'à 0,7 % des montants financés si la pénétration est supérieure à 60 %. Cette prime est supprimée s'ils ne présentent pas 80 % de leurs clients au FM.


    X.C.


     





    ZOOM

    Le nez dans les affaires

    Les concessions qui mettent en concurrence plusieurs établissements financiers doivent s'assurer que leur FM n'est pas sous influence. "Pour notre part, nous interdisons à nos partenaires financiers de rémunérer directement notre FM, de quelque manière que ce soit. C'est à la direction de décider quel partenaire il devra privilégier en fonction des objectifs que doit atteindre la concession, explique ce concessionnaire. Nous avons négocié avec eux un budget incentive que nous centralisons et que nous redistribuons en fonction du mérite sur l'ensemble de l'activité financement." L'intervention des établissements de crédit peut aller jusqu'aux vendeurs, par exemple à travers des bons d'achat offerts.

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